Éducation Préscolaire gratuite : 25-1 : le nouveau ratio élèves-enseignant inquiète

La gratuité des écoles préscolaires entre en vigueur à partir de janvier 2024. Le Grant-In-Aid scheme for free pre-primary education, mesure budgétaire annoncée cette année par le Premier ministre, est en passe d’être finalisée. Les écoles préscolaires souhaitant bénéficier de cette aide ont jusqu’au 7 septembre pour s’inscrire auprès de l’Early Childhood Care and Éducation Athority (ECCEA). Le programme sera sur une durée de trois ans.

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Une session de présentation par la ministre de l’Éducation, Leela Devi Dookhun-Luchoomun, a été organisée jeudi auprès de plusieurs gérants d’écoles préscolaires. Néanmoins, à quelques mois de la rentrée 2024, les avis restent mitigés quant à la mise en application de cette nouvelle mesure. En effet, les écoles maternelles éligibles devront s’assurer de la présence d’un manager par école, d’un seul enseignant pour 25 écoliers, d’un assistant-enseignant pour 50 écoliers et d’un School Attendant pour 50 enfants également. « Avant, l’on pouvait gérer une classe de 25 enfants seules, mais les enfants de nos jours ne sont plus les mêmes. Comment va-t-on faire ? Ce n’est pas du tout pratique », nous confie une enseignante de maternelle des hautes Plaines Wilhems. « Après, oui, c’est une bonne chose, mais il y a encore, selon moi, beaucoup d’éléments à revoir. La réalité du terrain est très différente de la réalité des personnes à la tête des institutions », dit-elle.
D’ailleurs, les écoles préscolaires souhaitant s’inscrire au programme d’aide devront répondre à trois critères d’éligibilité : elles doivent être enregistrées auprès de l’ECCEA, avoir un directeur à plein temps et avoir un minimum de 10 enfants inscrits âgés de trois ans à l’âge d’entrée au primaire. Les écoles préscolaires ayant entre 10 à 25 enfants inscrits bénéficieront d’une aide de Rs 240 000 par an, et pour celles avec plus de 175 enfants inscrits, l’aide financière grimpera jusqu’à Rs 650 000 par an.
Le Grant-In-Aid scheme for free pre-primary education propose ainsi de prendre en charge tous les coûts liés au fonctionnement des écoles, notamment au niveau du personnel et des coûts opérationnels. Il est indiqué, dans le document disponible en ligne, que les frais de personnel couvriront les salaires des directeurs, des enseignants, des enseignants adjoints et des auxiliaires de vie scolaire (voir encadré), tandis que les coûts opérationnels comprendront les dépenses relatives au matériel/équipement éducatif, à la papeterie, à l’équipement de bureau, aux Utilities, dont les frais de téléphone, d’eau et d’électricité, entre autres.
S’agissant des salaires, l’État les alignera selon les recommandations du PRB (voit tableau ci-après). Le personnel recevra son salaire directement sur son compte bancaire à la fin de chaque mois. Et à compter de 2029, les directeurs d’établissements devront tous détenir un Diploma in Early Childhood Management.

Membres du personnel préscolaire
Salaire
Directeur
Rs 35 000
Enseignant de Grade 1
Rs 16 785
Enseignant de Grade II
Rs 15 890
Enseignant de Grade III
Rs 15 000
Assistant Teacher
Rs 15 890
School Attendant
As per existing Remuneration Regulations

Ce qu’il en pense Rishi Nursimulu (Dukesbridge) :
« Le mot clé dans l’éducation, c’est la qualité, pas la gratuité »

Rishi Nursimulu est le fondateur de Dukesbridge, qui compte 10 écoles maternelles à Maurice. Après la rencontre avec la ministre de l’Éducation, ce dernier espère que ses suggestions faites seront prises en compte pour une meilleure planification et mise en application de cette nouvelle mesure. Car si rendre les écoles maternelles gratuites reste une décision louable, lui, comme plusieurs autres opérateurs du secteur craignent une baisse de niveau et, parallèlement, une hausse de frais de scolarité des écoles privées avec la suppression de la subvention existante de Rs 400 accordée à chaque enfant mauricien. Il nous en dit plus.

Que pensez-vous de la mesure annoncée sur la gratuité des écoles maternelles ?
Pour les petites écoles gérées personnellement par les propriétaires, ce sera un grand soulagement pour ceux qui sont en difficulté financière. Toutefois, dans la pratique, je n’arrive pas à comprendre comment une école de 25 enfants avec un seul enseignant pourra s’en sortir. Une enseignante pourrait-elle se répartir seule entre les tranches d’âge 3, 4 et 5 ans qui ont des programmes différents ? Pour les grandes écoles établies, l’operational grant ne couvre pas le loyer et beaucoup d’autres frais, et elles ne seront pas autorisées à demander un complément aux parents. Donc, dans sa forme actuelle, le scheme ne s’applique vraiment pas pour ces écoles.

Pour les parents, tout dépendra s’ils seront à l’aise de voir leurs enfants dans une classe nombreuse. Bien entendu, il existe une différence de qualité quand un enseignant s’occupe de 12-13 enfants au lieu de 25. J’apprécie que le gouvernement ait fait de son mieux compte tenu du budget actuel. Mais les parents qui ont les moyens continueront d’envoyer leurs enfants dans des écoles privées payantes pour bénéficier d’une plus grande attention individuelle. Le revers de la médaille est que les frais de scolarité de ces écoles privées devront augmenter vu la suppression de la subvention existante de Rs 400 qui est actuellement accordée à chaque enfant mauricien. Il deviendra alors plus coûteux pour les parents d’envoyer leurs enfants dans des écoles privées, ce que je trouve personnellement triste parce que certains se retrouveront peut-être obligés d’envoyer leurs enfants dans les écoles gratuites avec leurs classes nombreuses. J’espère sincèrement que le gouvernement revoie la décision d’enlever ces Rs 400 aux enfants, car cela va à l’encontre de l’équité dans l’éducation.

Les écoles maternelles de Dukesbridge seront-elles concernées par cette mesure ?
Lorsque le Premier ministre avait annoncé son intention de rendre les écoles de qualité accessible à chaque enfant, cela m’a touché et on a bien voulu soutenir cette initiative louable. Nous avons plus de 10 écoles maternelles à Maurice et dans certaines régions comme à Moka, nous avons même trois campus ; nous avions donc envisagé que l’un d’entre eux soit gratuit pour aider ceux qui ne peuvent pas payer nos frais. Cependant, maintenant que les paramètres du projet ont été révélés, je ne trouve pas comment le mécanisme répond à l’objectif du Premier ministre au final. En effet, au lieu de donner un accès gratuit aux bonnes écoles, je trouve plutôt que ces dernières seront obligées de baisser leur qualité pour entrer dans le scheme en raison du ratio de 25 : 1, en plus de l’impossibilité de payer un loyer pour un espace approprié, etc. Je l’ai toujours dit : le mot clé dans l’éducation c’est la qualité, pas la gratuité. Il est regrettable qu’aucune consultation n’ait été menée auprès des opérateurs, mais j’espère quand même que la ministre tiendra compte des suggestions que je lui ai faites depuis que les détails du projet ont été dévoilés jeudi dernier. Nous voulons travailler ensemble pour soutenir l’initiative du Premier ministre et rendre l’éducation de qualité plus accessible à ceux qui n’ont pas les moyens. Now let’s see.

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