Environnement : L’érosion des plages, un problème qui ne date pas d’hier

Le monde change et les îles sont les premières à le ressentir. En début de mois, des travaux de renforcement de la plage devant un grand hôtel de l’Est faisaient débat. Si l’hôtel et les autorités affirment que tout est fait dans les règles, force est de constater que ce problème d’érosion ne date pas d’hier et qu’il est encore moins isolé. Sur les 496 km de zones côtières et les 130 plages publiques de la République de Maurice, l’heure est au constat.

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Après le passage du cyclone Batsirai, le ministère de l’Environnement et l’Association des hôteliers de l’île Maurice (Ahrim) ont décidé d’établir un bilan de l’état des plages largement affectées par les vagues et les rafales. Et d’ailleurs, cyclone ou pas, ils sont nombreux à constater qu’à certains endroits les plages « rétrécissent » et dans d’autres elles « s’agrandissent. » Un phénomène de “depletion and accretion” naturel certes, mais qui s’aggrave à cause des activités de l’homme qui s’obstine à construire trop près du High Water Mark (HWM). C’est d’ailleurs ce que pense Adi Teelock, de Platform Moris Lanvironnman (PML), qui depuis de nombreuses années milite pour la protection de l’environnement.

« Ce phénomène d’érosion des plages est partout et tant qu’on ne regardera pas le problème dans l’ensemble, l’on ne résoudra rien. » Adi Teelock est ainsi catégorique qu’il faut revoir les définitions dépassées du High Water Mark dans certaines régions et qu’il faut aussi être plus strict dans l’octroi des permis EIA aux projets de construction dans les régions côtières. Elle explique qu’il est aussi important de mettre en place des infrastructures vertes comme mesures de défense avec une végétation côtière adaptée. Il faut d’ailleurs noter qu’en 2016, il a été décidé que les arbres des filaos se trouvant dans les “dynamic beach zones” devaient être remplacés par une liste établie de plantes.

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« Ce qui se passe devant l’hôtel Saint Géran est symptomatique de ce qui se passe dans d’autres endroits, dans le sens où l’hôtel a fait dans le passé deux ou trois demandes d’EIA pour des coastal protection works pour justement empêcher la plage de s’éroder », dit-il, en ajoutant que tant que ces travaux de réaménagement et de réhabilitation ne se feront pas sur l’ensemble de la plage, le problème persistera. « Au final, l’on prend des mesures qui ont aggravé le problème au lieu de le résoudre et avec le changement climatique et les infrastructures en dur trop près de la mer, ce problème deviendra de plus en plus récurrent. »

« About 17% of the beaches are suffering from long term erosion, 23% are being accreted »

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Adi Teelock soutient par ailleurs que « la dynamique et le mouvement des vagues et des marées peuvent provoquer ledepletion des plages d’un côté et l’accretion de l’autreCe sont des phénomènes naturels et il ne faut pas les bloquer, sinon cela va perturber la dynamique du littoral naturel. » Elle explique ainsi qu’il aurait fallu de vraies mesures, et un cadre légal précis pour empêcher ces formes d’érosion qui restent étroitement liées aux activités humaines, et qui sont traitées de manière isolée. « Il faut adopter une politique de strategic retreat », affirme-t-elle. PML est ainsi d’avis que le coastal setback de 30 mètres du High Water Mark est trop insuffisant et qu’il faut augmenter cette limite. « Nous attendons d’ailleurs la National Environment Policy suite aux Assises de l’Environnement », dit-elle.

Adi Teelock précise aussi qu’il n’y a pas que les hôtels qui sont concernés par ce problème d’érosion des plages, mais aussi toutes les infrastructures se trouvant trop près de la mer, notamment des appartements qui au moment des constructions respectaient soit le setback de 30 mètres, mais qui, aujourd’hui, avec l’érosion des plages et les conditions changeantes, se retrouvent beaucoup trop près de la mer. Par ailleurs, lors des Assises de l’Environment en 2019, il avait aussi été proposé, dans le Master Plan for the Environment Sector in Mauritius 2020-2030 du ministère de l’Environnement, que les « leases on Pas Geométriques /coastal zones with beach seafront to remove the retaining hard structures within 30 metres from the HWM in cases of renovation/reconstruction of hotels, campements and other buildings” soient revues.

Par ailleurs, il existe de nombreuses études qui ont été faites sur l’érosion des plages mauriciennes et qui tirent la sonnette d’alarme. Dans le Western Indian Ocean Journal of Marine Science publié en 2017, si l’on évoque l’augmentation du niveau de la mer comme étant l’une des causes de l’érosion des plages, les activités humaines de plus en plus nombreuses sur les régions côtières sont aussi citées avec insistance. “A study on coastal erosion for fourteen sites (JICA, 2015), which included sandy beaches and cliffs, using aerial photographs under the Environment, Climate Change Adaptation and Disaster Management Scheme funded by the Japanese International Cooperation Agency (JICA), showed that about 17% of the beaches are suffering from long term erosion and that around 23% are being accreted. The remaining beaches are considered stable. At Pointe aux Cannoniers, in the north of the island, the shoreline has retreated by 10 m on average and up to 18 m within the 45 years from 1967, with the volume of sediment loss amounting to 10,000 m3. The degradation has been caused by rapid erosion resulting mainly from cyclones and heavy swells generated by polar lows far to the south of the Mascarenes Islands.” 

Le Western Indian Ocean Journal of Marine Science parle aussi de la dégradation des récifs coralliens : “The degradation of coral reefs (MEO, 2011) might be one of the reasons for the decrease of sand supply and one of the causes of beach erosion, due to reduced protection of the coastal zone. The erosion process could also have been exacerbated by rapid development in the coastal zone, construction within the dynamic beach zone, and previous lagoonal sand mining activities.”

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