Indépendance : le DPP dresse le bilan d’une année charnière

2025 aura marqué un tournant décisif pour l’Office of the Director of Public Prosecutions (ODPP). Dans la dernière édition de sa Newsletter de l’année, le Directeur des poursuites publiques (DPP), Me Rashid Ahmine, Senior Counsel, affirme que des avancées majeures ont permis de restaurer pleinement le mandat constitutionnel de l’institution après une décennie de restrictions et de contraintes majeures.

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Rashid Ahmine se félicite en priorité « du rétablissement de l’autonomie financière de l’ODPP, placée pendant dix ans sous le contrôle administratif du bureau de l’Attorney General’s Office. » Un autre changement fondamental est intervenu au titre de la reconnaissance du DPP comme seule autorité habilitée à engager des poursuites en matière de corruption et de crimes financiers, ainsi que la clarification sans équivoque du fait que toute détention préventive d’un suspect requiert l’aval du DPP.
« Ces réformes n’auraient pas été possibles sans la constance de l’ODPP à défendre son indépendance, telle que garantie par la Constitution », estime Me Ahmine. Une indépendance que l’institution entend continuer à préserver et à renforcer, alors que Maurice s’impose désormais comme un modèle sur le continent africain en matière d’autonomie du bureau du DPP, certaines juridictions étrangères s’en inspirant pour mieux se prémunir contre toute ingérence.

Cette reconnaissance internationale s’est également traduite par la distinction décernée cette année à Me Nataraj Muneesamy, assistant DPP, lauréat du prix International Prosecutor of the Year, salué pour avoir exercé ses fonctions sans crainte de pressions indues. Parallèlement, le DPP plaide pour une modernisation en profondeur de la Prosecution Authority, dont la structure demeure largement inchangée depuis la création du poste, en 1968. À cette fin, un rapport stratégique, intitulé Proposed Constitutional Amendments, Legislative Basis and Inter-Agency Cooperation with a National Crime Agency, a été publié. Ce document, fondé sur les meilleures pratiques internationales, propose notamment des amendements à l’article 72 de la Constitution, l’adoption d’une loi spécifique encadrant la Prosecution Authority, ainsi que des réformes concernant le recrutement et la rotation des professionnels au sein de l’ODPP.

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Ces propositions s’inscrivent dans un contexte jugé opportun, alors que le gouvernement a annoncé la création d’un National Prosecution Service (NPS), qui serait placé sous l’autorité du DPP. Une réforme jugée nécessaire face à l’évolution de la criminalité moderne, désormais marquée par la montée des crimes transnationaux, cybercriminels, financiers et de la traite humaine.
Le DPP insiste sur le fait que le rôle de la Poursuite ne se limite plus à intervenir une fois l’enquête achevée. Il appelle à une approche intégrée, impliquant les avocats du Parquet dès le début des investigations complexes, avec un accent particulier sur la récupération des Proceeds of Crimes. Dans cette optique, il milite pour la création urgente d’une académie de formation spécialisée destinée aux avocats de son bureau.

Au chapitre de la coopération, l’année écoulée est qualifiée de satisfaisante, avec un renforcement des liens entre l’ODPP, la police, la Financial Crimes Commission, la Mauritius Revenue Authority et plusieurs autres agences nationales, ainsi qu’avec des Ong et le monde universitaire. Cette collaboration accrue a déjà donné lieu à des propositions concrètes, notamment en faveur de la criminalisation du Street Harrasment.

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Le DPP met également l’accent sur l’importance de la confiance du public dans l’administration de la justice, dans un contexte où les décisions du Parquet sont de plus en plus scrutées. Depuis son entrée en fonction, il y a trois ans, il affirme avoir personnellement examiné toutes les représentations du public, soit environ 526 demandes reçues au cours de l’année, certaines ayant donné lieu à des rencontres avec des victimes ou leurs familles. Des communiqués, des réponses aux questions parlementaires et des initiatives de sensibilisation, dont une première journée portes ouvertes organisée le 30 mai, ont également été mis en place.

Se projetant vers l’avenir, le DPP soutient que 2026 s’annonce comme une année décisive dans la lutte contre la criminalité, avec l’adoption attendue de législations majeures, la mise en place d’une National Crime Agency, l’accélération des procès en matière de corruption et de crimes financiers, ainsi que le développement de salles d’audience à haute technologie. Il appelle aussi à un renforcement de la lutte contre le trafic de drogue, les crimes environnementaux, et à une mise à jour en profondeur du Code Pénal et des règles de procédure pénale.

En conclusion, Rashid Ahmine rend hommage au professionnalisme et à l’engagement du personnel de l’ODPP, saluant leur travail dans des conditions souvent difficiles.

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