Pour lancer son calendrier d’activités en marge de la Journée des droits humains, observée ce 10 décembre, l’Ong Dis-Moi (DroItS huMains Océan Indien) Maurice a organisé un atelier de réflexions autour de cette thématique universelle. Plusieurs personnalités étaient conviées au lancement, nommément les ministres Ashok Subron, de l’Intégration sociale, et Gavin Glover, Attorney General. La mairesse des Villes Sœurs, Gabriella Batour, était également de la partie.
« L’inclusion des droits de la nature et de l’environnement était une condition sine qua non de la participation de Rezistans ek Alternativ (ReA) dans l’alliance qui se trouve aujourd’hui aux commandes du pays. » Ashok Subron a axé essentiellement son intervention sur cet aspect qui, souligne-t-il, « fait partie des droits humains ».
Il poursuit « je lance ici un appel vibrant à chaque citoyen. Anou mobilize pou anpess bann seki fer opozisyon a larekonesans lazistis sosyal ki inklir lanvironman ! L’Attorney General autant que moi-même savons à quel point il y a des pressions qui sont exercées sur nous par ceux qui ont des Vested Interests sur ce plan. Et ainsi que l’a annoncé mon collègue de la Justice, au sein de ce gouvernement, nous travaillons avec beaucoup de sérieux pour inclure les droits de la nature dans notre Constitution. »
Pour le ministre de l’Intégration sociale et leader de ReA, les droits humains sont intrinsèquement liés à l’écosystème. « Li sinp : nou na pa pou existe san lezot ek tou seki antour nou, don lanatir ! »
L’harmonie avec la nature, le respect de l’habitat, les droits civils et politiques… « Tous vont de pair avec les droits économiques, sociaux et culturels. Durant ces dernières 70 à 80 années, notre monde a connu une des plus grandes crises écologiques de son histoire. Il est impératif, à la lumière des dégâts qui se sont produits, que nous joignions tous nos efforts dans la reconstruction et la réhabilitation de l’écosystème de notre planète. Et cela passe, évidemment, par chaque pays, dont le nôtre », ajoute-t-il.
Ashok Subron a souhaité inscrire son intervention dans la même veine que celle de Lindley Couronne, président de Dis-Moi. Les deux hommes ont ainsi remonté le temps pour réitérer que la déclaration des Droits humains a été faite en 1948 « dans un monde meurtri par la Seconde Guerre mondiale et dans le sillage de tant de barbarie qui avait marqué cette époque ». Lindley Couronne n’a pas manqué de relever que « nous ne nous sommes pas totalement libérés des monstres… Des menaces pèsent encore sur notre monde, notamment avec le Trumpisme et l’État islamique. »
L’Attorney General a évoqué la très prochaine création et mise en opération de la Constitutional Review Commission. « Je vois déjà les petits sourires en coin, mais croyez-moi, nous avons beaucoup avancé sur ce dossier. D’ici à la fin de décembre, ou tout au plus début janvier, ce sera chose faite. Nous procédons actuellement à la composition de cette commission, et les choses iront rapidement », rassure-t-il.
Gavin Glover exprime son souhait que « le 10 décembre soit un jour où nous nous pausons et où nous réfléchissons, tous ensemble, à ce qu’il incombe de faire et de mettre en œuvre pour améliorer les conditions de vie où les droits de tout un chacun sont respectés; un moment pour revenir sur les fondements de notre pacte social ». Et de poursuivre : « Les droits humains n’existent pas que dans des tribunaux et les textes; il s’agit de la réalité concrète, du quotidien de chaque citoyen. »
L’Attorney General a salué les efforts consentis, dans cette lutte pour le respect des droits humains, de la société civile, dont l’Ong Dis-Moi. « Les membres de la société civile font ce qu’aucun gouvernement ne pourra jamais faire. Leur rôle est crucial. » Il est également revenu sur l’importance d’instances qui garantissent les libertés de chacun, à l’instar de la Commission des Droits de l’homme. « Nous en avons eu une belle preuve suivant les incidents qui sont survenus à la prison de Melrose. » Gavin Glover a ainsi réitéré « l’engagement ferme de ce gouvernement de revoir en profondeur la Constitution de notre pays, pour le bien de chaque Mauricien ».
Les autres intervenants au lancement de la campagne de Dis-Moi, soit la mairesse de Beau-Bassin/Rose-Hill, Seeksha Ramjeeawon, présidente de Dis-Moi Zen, étudiante de l’UoM, et Laure Chowrimootoo, responsable de la commission du 3e âge de Dis-Moi) ont abordé l’importance de respecter, renforcer et améliorer les droits fondamentaux de chaque être humain. Quentin Biehler, directeur de l’IFM, a abondé dans le même sens.
Quand l’art s’engage !
Il était tranquillement assis aux côtés de Marie France Favory dans les travées où avaient pris place les membres du public. Henri Favory, artiste pluriel et illustre homme de théâtre mauricien, a fait une réapparition totalement inattendue ce 10 décembre à l’IFM. Et fidèle à lui-même, il ne s’est pas contenté de suivre impassiblement l’événement. Si Marie-France Favory a déclamé une Fable de La Fontaine devant l’assistance, avec force interactions et interjections, Henri n’a pas été en reste. Le metteur en scène de créations fortes et poignantes, telles que Nu traverse, a lu, lui aussi, une fable de la Jean de La Fontaine, et ce, en Kreol Morisien.
Autre artiste qui a illuminé cette matinée consacrée au lancement de la campagne de Dis-Moi : la slameuse Zainab Soyfoo. Du couple Favory à cette jeune femme, le verbe était l’arme indiquée pour faire réfléchir sur la condition humaine et le respect de ses droits.
Ashok Subron a saisi l’occasion pour saluer Marie France et Henri Favory, de même que l’abbé Filip Fanchette, présent lui aussi parmi le public. « J’ai grandi et énormément appris de cette génération à laquelle appartiennent ces aînés. Ils m’ont inculqué tant de choses, des valeurs de la vie. Puis, de ma génération et celle à laquelle appartient également Lindley Couronne, et aux jeunes activistes que je vois ici, je peux dire que je continue d’apprendre et d’avancer. »
Outre le couple Favory et Zainab Soyfoo, le chanteur Alain Auriant et l’artiste Nono ont aussi marqué l’événement de leur présence. Une artiste égyptienne, Noha Abeer, a présenté une expo de ses toiles.
Calendrier d’activités
Après le lancement de la campagne, la deuxième partie de la journée du 10 décembre était consacrée à des ateliers d’expression Libérer la parole de la communauté LGBT, par Young Queer Alliance (YQA) et le Collectif Arc-En-Ciel (CAEC). Ont suivi des activités de peinture avec l’artiste Nono. Et la soirée s’est close avec la projection et rencontre autour du film L’Étreinte, dans le cadre du Ciné Club de l’IFM.
La journée du 11 décembre était placée sous le signe des Droits des enfants. Des membres du bureau de l’Ombudsperson for Children et d’Ong ont animé cette partie.
Aussi au programme : une sensibilisation sur l’environnement avec BIS LAMER (Reef Conservation). Des ateliers créatifs d’écriture et de dessin pour les enfants ont aussi ponctué la journée. Un spectacle a été présenté par des enfants. Une session de formation professionnelle pour les travailleurs sociaux était animée par Virginie Bissessur, directrice de Pedostop.
Aussi au menu, la projection, suivie d’un débat, du film Un silence si bruyant. Il s’agit d’un documentaire percutant d’Emmanuelle Béart et d’Anastasia Mikova sur les ravages de l’inceste et le combat des victimes pour se reconstruire.
Le 12 décembre, les droits des personnes en situation de handicap et des personnes âgées devait être au programme. Également prévue : une séance interactive de jeux et l’atelier Vivre avec mon handicap, organisé par la Commission des personnes en situation de handicap de Dis-Moi et les associations FMMH/Talking Library/APDH.
D’autre part, une rencontre, a été organisée par CROP/Dis-Moi Senior/Senior Citizens Council et une autre avec la réalisatrice Andrea Bescond autour de la projection du film Quand je serai grand. Ce document présente une plongée dans le quotidien d’un EHPAD où le manque de moyens menace l’accompagnement humain, jusqu’à l’arrivée bouleversante d’une classe d’enfants. Une Masterclass, avec pour thème La place des femmes au cinéma, a vu, elle, la participation de Véronique Le Bris (Festival du film au féminin) et d’Andrea Bescond.
Et en point d’orgue à la campagne, le 13 décembre devait être marqué par une conférence-débat et de la musique. Lindley Couronne, directeur général et fondateur de Dis-Moi, a animé Droits humains : Passé, présent et perspectives.
Une deuxième conférence-débat autour du Rôle des fondations politiques progressistes dans la lutte pour la justice sociale : le cas de la Fondation Rosa Luxemburg (RLS) était animée par le conférencier Fredson Guilengue, responsable principal des programmes au RLS. La campagne s’est achevée avec la cérémonie de clôture et la remise des certificats de formation, qui a précédé un spectacle animé par Stephan Gua, Alain Auriant et Bilygane.

