Le temps Pascal – Une aventure spirituelle : au coeur du mystère de la Rédemption

Des millions de chrétiens célèbrent Pâques, réactualisant ainsi par le regard de la foi la victoire triomphale du Fils de Dieu sur la Mort après le sacrifice sanglant au calvaire. « Ces chrétiens revivent la joie de Pierre, Jean et Marie-Madeleine devant le tombeau vide et vaincu. Mais nous nous garderons bien de simplifier Pâques, ‘anniversaire de la Résurrection du Sauveur’et de la présenter comme un événement isolé. » (1)

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Pourquoi ? « En réalité, dans la pratique de l’Église catholique romaine, Pâques est partie prenante d’un cycle détermine dans l’Année liturgique de l’Église. Ce cycle comprend trois périodes : une période de préparation (le Carême), le sommet du cycle qui en est le temps pascal, et le prolongement qui va au-delà la Pentecôte. Trois périodes de la vie de l’Église extrêmement fécondes en symboles, gagnant en intensité durant la Semaine Sainte, particulièrement, le jeudi, le vendredi et le samedi. » (Idem)

Une initiation au mystère de la Rédemption

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Pendant le Carême, les fidèles sont initiés au mystère de la rédemption qui constitue la pièce maîtresse du cycle de Pâques. L’Église y évoque « la Création du monde, l’origine de l’humanité, la faute originelle, la foi des patriarches, l’espoir de la Rédemption… » (2) C’est pendant cette période qu’ont lieu les quarante heures dans les paroisses. Le Saint Sacrément est exposé solennellement pendant quarante heures consécutives, et les fidèles viennent pour y prier. « Ces quarante heures rappellent le temps pendant lequel le corps du Sauveur demeura dans le tombeau. » (Idem)

Suivant la tradition, c’est un mercredi, le Mercredi des Cendres, que commence le Carême et rappelle la faiblesse humaine : « Nous sommes poussière et pêcheurs ». Par le Carême, le chrétien participle d’une manière physique au jeûne de Jésus-Christ au désert de la tentation et spirituellement, sa lutte contre le diable, le Prince de ce monde. Le Carême prépare le chrétien « à mourir spirituellement avec lui au jour de Pâques » en vue d’une vie chrétienne nouvelle et plus fervente.

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La Semaine Sainte et ses trois jours solennels

Puis arrive la dernière semaine précédant Pâques. C’est la Semaine Sainte. Les jours les plus solennels en sont le Dimanche des Rameaux, le Jeudi-Saint, le Vendredi-Saint et le Samedi-Saint – et représentent pour l’Église une période de préparation immédiate à la célébration de la fête de Pâques. Le dimanche des Rameaux, aussi appelé dimanche de la Passion, est marqué par « une bénédiction et procession des Rameaux en souvenir de l’entrée triomphale de Jésus à Jérusalem. » On fait la lecture de la Passion. En fait, durant toute cette semaine, l’Église attire l’attention des fidèles de manière plus insistante sur les souffrances, la Passion de Jésus-Christ.

Le Jeudi-Saint commémore l’institution des Sacrements de l’Ordre et de l’Eucharistie. Pour célébrer l’institution du sacerdoce, tous les prêtres se rencontrent à la Cathédrale pour une messe spéciale durant laquelle l’Evêque consacre les Saintes Huiles. Ces Huiles, l’huile des infirmes, l’huile des catechumènes et le Saint-Chrême sont consacrées dans trois urnes et vont servir pour l’année entière. Après la messe, chaque prêtre prend une part des trois huiles saintes pour sa paroisse. L’après-midi, la messe est célébrée dans chaque paroisse. Au cours de la messe, après la liturgie de la parole, le prêtre procède au lavement des pieds, rite d’amour et d’humilité accompli par le Christ lui-même le Jeudi Saint. Douze paroissiens, à l’instar des douze apôtres, prennent par au lavement des pieds.

Après la cérémonie de la messe, le prêtre dépouille l’autel, acte symbolique du dépouillement du Christ dans la Passion, et vide le tabernacle. Le Saint-Sacrement est porté processionnellement vers le reposoir (un tabernacle provisoire), où les fidèles sont invités à adorer et à veiller « avec leur sauveur en agonie » —, car dans la nuit, le Jeudi-Saint débute la Passion de Jésus-Christ. Certaines personnes font une heure d’adoration, d’autres plusieurs jusqu’à minuit.

Après la participation à l’agonie de Gethsémanie, l’Église se met en deuil en mémoire de la mort du Christ. C’est Vendredi-Saint. La liturgie de la parole du jour tourne autour de la Passion selon Saint Jean. La Croix est dévoilée, et les fidèles l’adorent. Ce jour-là, les fidèles se conforment strictement au jeûne et à l’abstinence et pratiquent des prières pénitentielles comme le Chemin de Croix. Dans certaines régions, des chrétiens portent processionnellement une grande croix jusqu’à l’église. L’adoration de la Croix et les pratiques pénitentielles se poursuivent dans la journée du Samedi-Saint.

Les cloches muettes se remettent à résonner

Enfin vient la glorieuse nuit du Samedi-Saint, où l’Église célèbre la vigile pascale. Le feu nouveau et le cierge pascal, symbole du Christ ressuscité, sont allumés. Les fidèles, qui ont chacun apporté un petit cierge, l’allumaient au cierge pascal et entrent en procession dans l’Église. À trois reprises, l’assemblée entonne « Lumière du Christ ». Le cierge pascal, symbole de Jésus-Lumière ressuscité, est mis à l’honneur pendant toute la nuit. L’Église est belle à voir, illuminée d’une multitude de cierges.

Dans la nuit, c’est la messe de la Résurrection. Dans le coeur des fidèles s’élève le cri de triomphe paulien :
Ô mort, où est ta victoire ? Ô mort, où est ton aiguillon ? »
Les cloches qui sont demeurées muettes depuis le Jeudi Saint sonnent joyeusement, alors que le chrétien, son cierge allumé, semble dire :
O Crux, ave, Spes Unica (Salut, Ô Croix, notre unique espérance)
rejoignant ainsi Saint Paul dans son célèbre justificatif de la résurrection :
Si le Christ n’est pas ressuscité… vaine est notre foi.
Pâques, c’est la fête du chrétien qui est sauvé par le Christ ressuscité. Centre et sommet de l’année liturgique, Pâques est d’une telle richesse religieuse que l’Église catholique romaine ne trouve pas un dimanche suffisant pour l’embrasser dans sa totalité. Aussi la prolonge-t-elle sur toute un octave jusqu’au dimanche suivant et, de là, jusqu’aux fêtes de l’Ascension et de la Pentecôte.

Le dimanche des Rameaux qui précède le dimanche de Pâques, Jésus fait son entrée triomphale à Jérusalem (Crédit photo : Magazine Souvenir – Pâques 2012, Éditeur – Bescom Ltd)

Le cycle continue au-delà des huit semaines du temps pascal

Le temps pascal, qui compte huit semaines, s’achève avec la Pentecôte, rappel de la descente du Saint-Esprit sur les Apôtres réunis dans la chambre haute. Les chants d’allégresse ponctués des Alléluia résument le fait de la résurrection. Cependant, la conclusion du temps pascal ne met pas un terme au cycle pascal qui commence avec le Mercredi des Cendres, ne s’achèvera qu’au premier dimanche de l’Avent. C’est une façon pour l’Église de faire comprendre aux fidèles que « chaque dimanche est la Fête de Pâques renouvelée… » Par ce rappel hebdomadaire du mystère de Pâques, les chrétiens sont « incorporées toujours davantage à ce Royaume de Dieu, qui aura le triomphe définitif à la fin des temps. »

B. Burrun

La veillée pascale et ses variantes

« La veillée de Pâques conclut souvent avec la célébration de l’Eucharistie (connu dans certaines traditions comme la sainte communion). Certaines variations de la veillée pascale existent : un certain nombre d’églises lisent les leçons de l’Ancien Testament avant la procession de la bougie Pascale, puis lisent l’évangile immédiatement après l’Exsultet.
Certaines églises préfèrent organiser cette veillée très tôt le dimanche matin au lieu du samedi soir pour cadrer avec le récit évangélique des femmes qui viennent au tombeau à l’aube le premier jour de la semaine. Ces services sont connus sous le nom de service du lever du soleil et se produisent souvent dans un cadre extérieur tel que le cimetière de l’église ou le parc voisin.

Le premier service du lever du soleil a eu lieu en 1732 parmi les frères célibataires de la Congrégation de Moravie à Herrn Hut, en Saxe, dans ce qui est maintenant l’Allemagne. Après une veillée toute la nuit, ils sont allés avant l’aube au cimetière de la ville, l’Acre de Dieu, une colline au-dessus de la ville pour célébrer la résurrection parmi les tombes des défunts. Ce service a été répété l’année suivante par toute la congrégration et ensuite s’est répandu avec les Missionnaires de Moravie à travers le monde.

Des célébrations supplémentaires sont généralement offertes le dimanche de Pâques lui-même. Typiquement, ces services du dimanche suivent l’ordre habituel dans une congrégation, mais aussi incorporent des pratiques plus festives. On incorpore des instruments musicaux en cuivre (trompettes, etc.) aux instruments traditionnels utilisés pour ce service. » (3)

Pâques, un héritage du judaïsme

« Elle (l’Église chrétienne) avait hérité du judaïsme le Pâques et la Pentecôte, fêtes de printemps séparées par sept semaines considérées comme plus ou moins saintes. Les chrétiens d’origine juive avaient avant 70 continué à célébrer ces fêtes à la manière israélite, tout en y ajoutant à Jérusalem, au moment de la Pâques, une commémoration de la mort et de la résurrection de Jésus-Christ. Certaines des Eglises extérieures à la Palestine leur avaient emprunté dès le 1er siècle cette coutume, tout en évitant de s’associer aux cérémonies synagogales.

L’usage de célébrer une Pâque et une Pentecôte chrétiennes prévalut partout avant la fin du IIe siècle. Le caractère joyeux de la Pentecôte et des semaines qui la précèdaient n’a jamais été contesté, puisqu’on y commémorait les apparitions du Ressuscité et l’effusion du Saint-Esprit sur les disciples. Par contre, la querelle Pascale évoquée ci-dessus manifesta, à travers le conflit relative à la date, une profonde divergence sur le sens de la fête de Pâques : commémoration de la mort de Jésus pour les « quartodécimains » qui la célèbraient le jour de la Pâques juive. La fête avait aux yeux des Eglises qui la plaçaient le dimanche suivant le sens d’une évocation de la resurrection, que précédaient simplement un jeûne du vendredi marquant le deuil provoqué par la Crucifixion et, en certains endroits, un jeûne du samedi… » (4)

Références
1. Burrun, Breejan, « Le cycle de Pâques : une aventure spirituelle au cœur du mystère de la Rédemption », in Week-end, avril 1980
2. Rolin, Chanoine, « La vie liturgique et sacramentelle » in « Histoire de l’Église », Éditions de l’École, 1961
3. « À propos de la Passion du Christ » in Le Mauricien, mercredi 17 avril 2019
4. Puech, Henri-Charles, « Histoire des Religions – Tome II », 1983, Encyclopédie de la Pléiade

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