« Violence, drogue et fragilités sociales : le Président de la République, l’évêque de Maurice et l’évêque de Port-Louis lancent un appel unanime à l’action et à la responsabilité collective »
Violence, drogue, perte de repères, fragilités économiques et tensions internationales : les messages diffusés à la MBC à l’occasion de Noël et du Nouvel An dressent un diagnostic lucide de l’état du pays et du monde. Du Président de la République aux évêques de Port-Louis et de Maurice, les constats convergent et appellent à un même impératif : transformer l’espérance en action et répondre aux attentes par des résultats concrets.
Dans son message diffusé à Noël et au Nouvel An, le Président Dharam Gokhool a replacé Maurice dans un contexte international instable et complexe. Rappelant qu’il évoquait déjà, un an plus tôt, « le grand changement politique intervenu dans notre pays » ainsi qu’un climat mondial marqué par tensions, conflits et guerres dans plusieurs régions, il constate que « les conflits se prolongent, les tensions s’exacerbent », et que les petites économies ouvertes comme Maurice sont particulièrement exposées aux guerres commerciales et économiques. « Maurice, pays profondément dépendant du commerce international ainsi que de la coopération bilatérale et multilatérale, en subit inévitablement les conséquences sur le plan économique », souligne-t-il.
Un contexte international préoccupant et ses impacts économiques
Le Président a dressé un bilan des secteurs clés de l’économie nationale, rappelant les gains réalisés en 2025 dans le global business, la finance, l’informatique et le tourisme, tout en soulignant la nécessité de renforcer les efforts dans l’industrie, l’agro-industrie, la blue economy et l’économie circulaire pour assurer un développement plus équilibré et résilient.
Violence et drogue : des réalités sociales inquiétantes
Au-delà des enjeux économiques, Dharam Gokhool insiste sur les défis sociaux : « le fléau de la drogue, la violence sous toutes ses formes, et plus particulièrement les violences liées aux réseaux sociaux », la cybercriminalité et « l’érosion des valeurs fondamentales ». S’y ajoutent des crises climatique, énergétique et alimentaire, ainsi qu’une crise démographique liée au vieillissement de la population. Ces réalités, souligne-t-il, exigent « des réponses lucides, coordonnées et durables ».
Ces constats font écho aux messages des évêques. Celui de Port-Louis, Mgr Jean Michaël Durhône, alerte lui aussi sur une violence qu’il qualifie de « préoccupante », omniprésente « au sein des familles, sur nos routes, sur nos plages, sur les réseaux sociaux ». Cette violence interpelle toute la société et oblige à s’interroger sur le mal-être qui traverse le pays et menace la paix sociale. L’évêque associe également cette violence aux difficultés économiques rencontrées par de nombreux Mauriciens : baisse du pouvoir d’achat, familles peinant à terminer le mois et inquiétudes pour l’avenir. « Ces réalités ne peuvent nous laisser indifférents », souligne-t-il.
« Un monde troublé, divisé, pour ne pas dire malade »
L’évêque de Maurice, Mgr Sténio André rejoint cette analyse en décrivant « un monde troublé, divisé, pour ne pas dire malade », marqué par la montée des violences, des suicides, et par un profond malaise social. Pour lui, le monde est « sans repères » et les comportements violents, parfois mortels, ainsi que les commentaires désagréables sur les réseaux sociaux, en sont des symptômes.
Priorités pour 2026 : inclusion, cohésion et lutte contre la drogue
Le président Gokhool rappelle que l’inclusion est « une priorité nationale ». Elle se concrétise par la mise en place d’un comité ministériel sur l’intégration sociale, visant à améliorer les conditions de vie des personnes les plus vulnérables et à renforcer la cohésion sociale. L’île Maurice continue également de s’engager dans le dialogue international, participant à des tables rondes et à des consultations avec les Nations unies.
La lutte contre la drogue constitue un autre point majeur. Pour le Président, « la guérison et la réinsertion sont possibles », citant l’exemple de jeunes ayant surmonté la dépendance et qui accompagnent désormais d’autres jeunes. Mgr Durhône rappelle, quant à lui, qu’il faudra mener « une lutte sans merci contre le trafic de drogue » et poursuivre la sensibilisation sur les dangers des addictions.
Sur la question des violences sur les réseaux sociaux, le Président appelle à un encadrement renforcé, non seulement légal, mais aussi académique, moral et spirituel. Des initiatives comme les compétitions nationales de dissertation sont évoquées pour promouvoir l’esprit critique, le respect et les valeurs citoyennes auprès de la jeunesse. Mgr Sténio André, tout en partageant cette préoccupation, met en garde contre la tentation de blâmer systématiquement les institutions : « Il est facile de blâmer les autres, l’État, l’Église ou encore les associations ». Pour lui, Noël appelle d’abord à une remise en question personnelle et collective.
L’éducation et l’inclusion sociale sont également des priorités partagées. Mgr Durhône souligne la nécessité de réfléchir à « un projet éducatif au service de l’épanouissement de chaque enfant mauricien et qui ne laisse personne au bord du chemin ». Pour les évêques, la cohésion sociale repose sur la participation collective et sur la valorisation de la diversité religieuse, ethnique et culturelle, afin de construire une société plus juste, plus fraternelle et plus solidaire.
Optimisme et exigence de résultats : transformer l’espérance en action
Malgré la gravité des constats, les messages de fin d’année se rejoignent dans un refus du fatalisme. Dharam Gokhool se dit « résolument optimiste pour l’avenir », rappelant que « la résilience et le courage font partie de notre ADN national ». Il appelle à un leadership fondé sur « l’exemplarité, l’éthique et l’action », et souligne l’exigence d’obtenir « des résultats visibles et tangibles dans tout ce que nous entreprenons ».
Pour les évêques, l’espérance ne peut être dissociée de l’engagement. Mgr Durhône insiste sur la décision collective de « continuer à marcher ensemble » face aux défis sociaux et économiques, tandis que Mgr Sténio André souligne que chacun doit accepter sa part de responsabilité pour construire une société plus humaine et plus juste.
À travers ces messages, se dessine un tableau exigeant et réaliste : une société confrontée à de profondes fragilités, mais appelée, par la lucidité, l’action concrète et la responsabilité partagée, à transformer inquiétude et tensions en sursaut collectif et à faire de l’espérance un moteur de progrès durable.

