PRÉVENTION: « Nous pouvons facilement nous procurer de la drogue à des prix abordables »

Une journée d’information et de formation pour lutter contre la drogue et le sida a eu lieu dimanche au Sir Razack Mohammed Sub Hall à Phoenix à l’initiative du Centre Idrice Goomany (CIG) en partenariat avec le Phoenix Oyama Kyokushinkai Karate Club. La journée, qui a débuté à 10 h 30, n’a vu la participation que d’une vingtaine de jeunes.
Le formateur Imran Dhannoo, directeur du centre Idrice Goomany, et Feizal Nahaboo, le président du Phoenix Oyama Kyokushinkai Karate Club se sont réunis dimanche pour une journée de formation sur les méfaits de la drogue et du sida. De plus en plus de femmes sont concernées par la drogue, l’alcool et les maladies sexuellement transmissibles. « Aujourd’hui, les jeunes sont différents de nous quand on avait leur âge », a témoigné le formateur Imran Dhannoo. Quand on leur demande ce que le mot drogue évoque pour eux, ils répondent « nisa », « mové » ou encore « danger ». Mais d’autres avouent aussi en avoir pris. « Mes amis consomment souvent du gandia à l’école ou derrière l’établissement. Et à force de regarder les autres j’ai fini par les imiter », a expliqué un jeune de 17 ans. Ces substances illicites sont pourtant interdites à Maurice, mais « nous pouvons facilement nous en procurer à des prix abordables », ajoute le jeune homme, alors que d’autres jeunes autour de lui acquièscent. Et d’ajouter : « Même si fumer ces substances nous donne du plaisir, mes amis et moi faisons en sorte de ne pas en devenir accros, car cela nous pousserait à augmenter notre consommation et nous n’aurions pas assez d’argent pour en acheter. Beaucoup de collégiens tombent dans ce piège et demandent souvent de l’argent aux autres pour s’en procurer. »
La journée d’information s’est poursuivie avec l’intervention de certains collégiens qui ont affirmé que l’alcool et la cigarette étaient monnaie courante dans l’enceinte de leur établissement. Cependant, les déclarations de certaines collégiennes en ont surpris plus d’un. « Dans nos écoles, c’est l’homosexualité le plus grand souci. Près de la moitié des filles se touchent en public et ont même des relations sexuelles dans l’école et ça ne choque plus personne. »
Au final, même si les jeunes se disent conscients que la drogue est quelque chose de négatif, cela n’empêche pas sa consommation que ça soit par influence ou par curiosité. « Beaucoup de jeunes mélangent des drogues ou prennent des sirops pour la toux avec d’autres substances pour avoir un nisa comme ils disent ! On trouve aussi des jeunes qui prennent de la drogue pour avoir une meilleure performance sexuelle. Cela se fait de plus en plus », a expliqué Imran Dhannoo. Et d’ajouter : « À Maurice, on consomme des drogues bas de gamme qui sont encore plus nocives pour la santé, comme le brown sugar qui est sniffé ou injecté. »
La cigarette est aussi très prisée des jeunes et de plus en plus tôt. « La première fois on fume pour avoir une expérience, ensuite à l’occasion, puis de façon de plus en plus régulière et par la suite on fini par ne plus pouvoir s’en passer », a déclaré Imran Dhannoo. « Le plus désolant, ce sont les femmes enceintes qui consomment de la drogue. En naissant, leurs bébés ont des chances de survie minimes car ils ont de la drogue dans leur organisme. » Et pour étayer ces propos, un des formateurs a démontré comment la fumée s’accumule dans les poumons et quelles en sont les conséquences pour l’organisme.
Une causerie sur les différentes drogues, cigarettes et produits hallucinogènes a donné lieu à un bref débat entre les jeunes et les formateurs sur les conséquences de la cigarette sur l’organe sexuel masculin. Imran Dhannoo a tenu à montrer aux jeunes différentes publicités sur l’alcool et la cigarette pour expliquer qu’on « utilise souvent l’image de la femme pour vendre ces produits. Ce sont des publicités mensongères ! On utilise l’association alcool-sexe pour vous faire consommer davantage. Pourtant, il faut savoir que l’alcool entraîne l’impuissance sexuelle », a-t-il dit.
Le sida de plus en plus présent à Maurice
La deuxième partie de la journée était axée sur le sida. Selon les organisateurs de la journée, on estime aujourd’hui qu’il y a quelque 8 800 Mauriciens âgées entre 15 et 49 ans vivant avec le VIH. Les chiffres officiels font état de 5 188 porteurs du virus à décembre 2011. Chaque mois, il y a environ 50 nouveaux cas de personnes séropositives. Un jeune sur 4 n’utiliserait pas de préservatif. 90 % des Mauriciens n’ont jamais fait de test de dépistage. Le nombre d’infections dues au VIH est toujours en constante augmentation à Maurice.
Après l’exposition des consommateurs de drogue au virus, c’est désormais la hausse du nombre de femmes nouvellement infectées qui inquiète. La tendance laisse craindre une féminisation de l’épidémie, entraînant sa généralisation. Parallèlement, la vulnérabilité des jeunes interpelle. Parmi les nouveaux cas officiellement enregistrés, plusieurs sont liés à des rapports sexuels non-protégés. Il y a même une hausse à ce niveau. En dépit des mesures préconisées dans les services de santé publics, quelques cas de transmission mère-enfant ont aussi été enregistrés.
« En principe je me protège durant mes rapports sexuels. Mais ça m’arrive de ne pas le faire car je fais confiance à mon petit copain étant donné que nous sommes ensemble depuis longtemps. Je n’ai jamais fait de test de dépistage. Pour ma part, j’ai attendu un certain âge avant d’avoir eu mon premier rapport sexuel. Mais pour beaucoup de filles, le sexe est devenu banal. Elles sont de plus en plus jeunes, souvent vers 13 ans à faire l’amour. » C’est ce qu’a affirmé une jeune fille de 17 ans.
« Le sida se répand bien plus vite qu’on ne l’imagine. Je vois beaucoup de cas de transmission de la mère à l’enfant », a déclaré M. Dhanoo. « Quand on est porteur du VIH, la maladie ne se développe pas mais on la transmet à une personne qui elle pourrait la développer. Mais quand on a le sida, c’est que la maladie s’est développée », a-t-il poursuivi. Et pour mieux le faire comprendre à l’assistance, deux films tournés en collaboration avec Ally Lazer ont été projetés. Dans l’un, un court métrage met en scène un micro trottoir qui interroge des personnes de différents milieux sur le sida. « Je sais que le sida est mortel. Beaucoup de mes amis disent se protéger durant l’acte sexuel, mais souvent ils avouent qu’ils ne l’ont pas fait… Pour ma part, je pense qu’on est conscient de l’ampleur de cette maladie mais qu’on a tort de penser que ça n’arrive qu’aux autres », a déclaré un étudiant.
La journée s’est terminée vers 15 h. Tous les participants recevront un certificat le 11 mars au Sir Razack Mohammed sub hall à Phoenix à 14 heures. « Notre but est de pousser les jeunes à se tourner vers des activités de loisir pour éviter de sombrer dans l’alcool et la drogue. Je pense que ces formations sont très utiles. Je suis très satisfait de la journée », a expliqué Feizal Nahaboo, le président du Phoenix Oyama Kyokushinkai Karate Club.

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