Rapport conjoint MIE et Banque mondiale : Les lacunes et faiblesses de l’Extended Programme décortiquées

Moins de 30% des élèves réussiront à l’examen de Grade 9 dans deux ans

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75,5% d’élèves obtiennent moins de 30 points en maths en Grade 8

Programme d’études « inadapté » aux besoins des enfants

Une étude menée par le Mauritius Institute of Education (MIE), avec le support technique de la Banque mondiale, jette un constat inquiétant sur l’Extended Programme. Curriculum chargé et non adapté, enseignants démotivés, désintérêt des parents et, surtout, incapacité des élèves à lire, sont autant d’éléments qui démontrent que ce nouveau programme est loin de répondre aux besoins des enfants en difficultés scolaires. Les administrateurs des collèges et les enseignants sont d’avis que moins de 30% des élèves de l’Extended Programme réussiront aux examens du National Education Certificate (NCE) dans deux ans.

L’Extended Programme a été mis en place pour accueillir les élèves de Grade 6 n’ayant pu atteindre le minimum requis pour entrer dans le “mainstream” au collège. Cette démarche a été très critiquée dès le départ par les enseignants, qui estimaient qu’il était quasi-impossible pour des enfants n’ayant pu réussir après six années en primaire de s’adapter à un programme secondaire. Car l’Extended Programme comprend le même curriculum que le “mainstream”, avec une année supplémentaire pour se préparer au NCE. Le rapport du MIE et de la Banque mondiale vient confirmer cette crainte des enseignants. Après avoir interrogé des enseignants, facilitateurs, responsables des collèges et des étudiants, ils sont venus à la conclusion que ce programme n’est pas adapté aux besoins des enfants concernés.

« The EP curriculum was regarded as being diffuse, the time insufficient to teach all 12 subjects, and not adequately responsive to student’s needs », indique le rapport. Cette situation s’explique surtout du fait que les élèves de l’Extended Programme ne maîtrisent pas encore le “literacy and numeracy”. Les enseignants qui ont témoigné disent ainsi devoir apprendre d’abord à lire aux enfants, avant de leur enseigner le programme.

Pour cela, il faut ralentir le rythme de travail, et certains disent parfois se retrouver avec trois niveaux dans la classe. « Out of 45 weekly class periods, 40% of curricular time was spent on numeracy and literacy », indique le rapport. En Grade 8, ce chiffre passe à 38%, car il faut accomoder deux autres matières. Les enseignants ayant témoigné estiment que c’est trop pour les enfants avec des difficultés d’apprentissage. « The number of subjects being studied was a challenge for these students. »

Les éducateurs pessimistes

Le rapport relève que les enseignants et les administrateurs sont assez pessimistes par rapport à la performance des élèves au NCE. « 77% administrators expected fewer than 30% of the students to pass the NCE in grade 9+, and none of them expected more than half of the students to pass. » Le résultat des examens en Grade 8 l’année dernière, soit après deux années en Extended Programme, donnent une indication à ce sujet. « Students averaged between 36 and 40 scores for all four languages, barely above the minimum of 30 required (…) a large majority of students (70%) scored less than 50 marks in each of the four subjects analysed, indicating they were unable to successfully respond to half of the questions in the four subjects assessed. »
Il est aussi noté qu’en mathématiques, 75,5% des candidats ont obtenu moins de 30 points, soit le minimum requis, alors que le niveau du papier était de Grade 6. Le système d’évaluation n’est toutefois pas sans reproche, car l’étude note que « the various assessments used currently to underpin the EP all exhibit deficiencies regarding their fit for purpose ».
Le rapport souligne qu’une évaluation de la progression et la comparaison avec la performance du “mainstream” n’ont pu être faites, car le Mauritius Examination Syndicate n’a pas fourni les données nécessaires du PSAC, comme demandé. Par ailleurs, l’absence d’une pédagogie appropriée est également décriée. Les enseignants appliquent la méthode traditionnelle et ne peuvent faire un suivi individuel. Ceci s’explique surtout du fait qu’ils n’ont pas reçu de formation spécifique pour travailler avec ce groupe d’élèves, étant du “mainstream”, et aussi que beaucoup ne sont pas motivés, ayant été contraints d’enseigner dans ces classes. 45% d’entre eux se disent démotivés et 65% estiment que ce n’est pas valorisant de travailler dans l’Extended Programme.

Revoir le mode d’évaluation

En revanche, les facilitateurs, qui sont des anciens enseignants du Prévoc, sont, eux, très motivés et optimistes, souligne le rapport. Le rapport relève également un manque de suivi pédagogique, du fait que les Deputy Rectors, Senior Educators et Quality Assurance Officers ne sont pas conscients de leurs rôles. Le manque d’intérêts des parents est aussi déploré. Peu d’entre eux viennent aux réunions avec les facilitateurs. Il est aussi relevé que la majorité des étudiants de l’Extended Programme viennent de milieux avec des problèmes socio-économiques et des parents ayant peu d’éducation. Il est aussi souligné que 16% des élèves en Extended Programme ont des problèmes de santé. « Many of the students were also dealing with challenges at home, ranging from food shortage to absenteeism of parents. »
Cependant, même si peu de progrès ont été notés au niveau académique, le rapport souligne que beaucoup a été fait au niveau du bien-être et du “life skills”. Il est aussi souligné que le programme a permis de rehausser l’estime de soi des élèves de l’Extended Programme, même si l’approche n’est pas inclusive dans toutes les institutions, notamment pour ce qui est de l’accès aux infrastructures. « Students are not progressing academically as intended and a key question is whether the aim of helping students to academically catch up with their mainstream peers was too ambitious. »
Le rapport recommande ainsi de réduire le nombre d’enfants canalisés vers l’Extended Programme. Celui-ci est de 25% des candidats du PSAC, soit près de 5 000 enfants chaque année. Il est ainsi souhaité que l’apprentissage au niveau du primaire soit consolidé et adapté aux besoins des enfants. « The EP cannot fully compensate for the accumulated learning deficiencies with which children arrive at the end of primary school. » Il est suggéré de faire un tri, car 13% des élèves en Extended Programme n’ont échoué que dans une matière au PSAC. Ces cas, dit le rapport, peuvent rejoindre le “mainstream”, avec toutefois un encadrement approprié.
Il est aussi suggéré de mettre l’accent sur le “numeracy and literacy” au cours de la première année de l’Extended Programme, soit en Grade 7. Ensuite, le rapport souligne la nécessité d’une pédagogie appropriée pour captiver l’intérêt des élèves, avec l’utilisation de la technologie et des activités à l’extérieur. Le mode d’évaluation demande également à être revu.
La clarification des rôles et responsabilités au niveau de l’école ainsi qu’un partenariat avec les parents sont aussi recommandés. Un changement de “mindset” de la part des enseignants est également souhaité. En conclusion, le rapport relève que l’Extended Programme a du bon, notamment en ce qui concerne les besoins socioémotionnels des enfants, mais qu’il faut adapter le curriculum et la pédagogie pour aider les élèves à surpasser leurs difficultés académiques.
Ceux ayant participé à cette étude sont le Prof Vassen Naeck, le Dr Aruna Ankiah-Gangadeen, le Dr Ajay Ramful, Kaviraj Peedoly, le Dr Ravhee Bholah et Mohun Cyparsade au niveau du MIE; le Dr Lianqin Wang, le Dr Vania Salgado, le Dr Robert Prouty et le Dr Jee-Peng Tan pour la Banque mondiale.

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