Réforme de la pension: Roshi Bhadain confirme l’option d’une plainte constitutionnelle contre la PRB à 65 ans

La plateforme syndicale commune a organisé un forum-débat sur le relèvement de l’âge d’éligibilité de la pension à 65 ans. Présent sur le panel, Roshi Bhadain, leader du Reform Party, a annoncé qu’il compte saisir la Cour suprême avec un Challenge constitutionnel de la Basic Retirement Pension à 65 ans. Les dirigeants syndicaux ont pris l’initiative d’ouvrir le débat à la société civile, afin d’avoir différents points de vue sur la question. Outre Reeaz Chuttoo, Deepak Benydin et Prakash Baluckram, de la plate-forme syndicale, l’économiste Manisha Dookhony, l’actuaire Bernard Yen, les activistes Nalini Burn et Lindsey Collen, ainsi que les politiciens Roshi Bhadain et Rama Valayden, étaient également invités. Ce dernier n’a toutefois pu être présent, en raison d’un déplacement à l’étranger.
Roshi Bhadain maintient que la décision de relever l’âge de la pension constitue une injustice aux personnes de la tranche 60-65 ans. Le seul recours dans le cas présent, a-t-il avancé, demeure le judiciaire, comme cela a été le cas pour les licenciés de la Local Government Service Commission. « Depuis quelques semaines, je suis en train d’étudier des jugements au sein du Commonwealth, pour voir comment nous pouvons intenter une action judiciaire. À mon avis, il y a plusieurs points dans la Constitution qui peuvent servir pour un Challenge constitutionnel », fait-il comprendre.
Il a cité en exemple, les articles 3 et 7 qui portent sur les droits fondamentaux et la protection contre des traitements inhumains, respectivement. Il a déploré le fait que la partie sur la discrimination ne reconnaisse pas l’âge comme un critère. Car selon lui, il est discriminatoire de décider qui mérite une pension ou pas. « La pension est universelle, elle s’applique à tous », enchaîne-t-il.
Roshi Bhadain a également rejeté l’argument de Lakes Vid, car il y a des rentrées d’argent tous les jours, reprenant la thèse défendue par Renganaden Padayachy. « Ce qu’on ne dit pas, c’est que le gouvernement va continuer à collecter l’argent de la CSG pendant trois ans. Ce qui fera un montant de Rs 18 milliards par an. Or, que Rs 12 milliards seront utilisées pour les différentes allocations. Ce qui veut dire que Rs 6 milliards resteront dans les caisses du gouvernement. Au cours de la 2e année, ce sera Rs 8 milliards, puisque les allocations vont baisser et pour la 3e année, ce sera Rs 20 milliards, puisqu’il n’y aura plus d’allocation. Cela fait un total de Rs 34 milliards de la CSG qui sera récolté sur trois ans », avance-t-il, en ajoutant qu’il continue d’étudier la question d’une plainte constitutionnelle et cherchera l’avis des King Counsels à ce sujet.
De son côté, Deepak Benydin souligne que la pension universelle est le fruit d’un long combat syndical. Il s’est demandé comment le gouvernement peut avancer qu’il n’y a pas d’argent, mais en même temps, envisage d’introduire le transport gratuit. Il a insisté pour le maintien de l’État-Providence, faisant le parallèle avec les États-Unis, où d’une part, il y a de grands développements et d’autre part, des gens qui dorment dans la rue. « Je lance un appel au gouvernement : pa zet dimounn ki inn travay pour so pei kouma vie zouti. »
Reeaz Chuttoo a avancé que la pension est une forme de compensation pour les travailleurs, qui ont travaillé pour des salaires de misère pendant toute leur vie. « Comme en 2005, les travailleurs ont été sacrifiés. Il n’y a pas que la pension, mais aussi un gel des salaires d’ici à 2028 », trouve-t-il. Il a dénoncé le fait que le registre social soit devenu la référence pour tout. Que ce soit pour bénéficier de l’Income Support ou pour bénéficier des Fees d’examen pour une deuxième tentative. « C’est un système archaïque, comme un retour à l’époque des colons », dit-il encore.
D’après lui, le gouvernement aurait dû aller chercher de l’argent là où il y en a et non pas sanctionner financièrement ceux qui n’en ont pas. « Par exemple, la Corporate Tax au sein de l’OCDE est de 23% en moyenne, mais à Maurice elle est de 15%. Nous avons adressé une communication au Premier ministre et ministre des Finances à ce sujet, mais il ne nous a pas répondu. J’en déduis que les capitalistes sont en train de s’enrichir sur notre tête », s’insurge-t-il.
De même, il s’est demandé s’il y a la garantie que les employés pourront conserver leur emploi jusqu’à 65 ans. Car il y a une disposition de la loi qui stipule que si le travailleur n’est plus productif, il peut être remercié.
Pour sa part, Manisha Dookhony a mis l’accent sur le débalancement démographique entre ceux qui travaillent ou pas. Elle estime qu’il y aurait pu avoir une Positive List et une Negative List, pour identifier d’une part, ceux qui sont dans des secteurs difficiles et qui ne pourront travailler après 60 ans, et d’autre part, ceux qui ont des dividendes par million et qui n’ont pas besoin de la pension.
L’économiste est aussi d’avis qu’une réforme de la pension prend du temps et est difficile à mettre en place. Elle a évoqué le cas de la France. De même, elle a cité l’exemple de certains pays africains qui ont fait le choix d’investir leurs fonds de pension pour le faire grandir. Elle estime qu’une réforme sur le long terme permet une meilleure adaptation.
L’actuaire Bernard Yen affirme que la pension est un sujet très délicat à Maurice. Il a indiqué que le ciblage était déjà appliqué en 2004, mais a été abandonné en 2006. Il a expliqué que dans le contexte actuel, il est difficile de maintenir le même système de pension quand le gouvernement dépense plus que ce qu’il gagne. « Même si nous arrêtions de verser la pension à tout le monde, cela ne permettrait pas de combler le déficit », poursuit-il.
Il est d’avis qu’il aurait fallu enclencher la réforme de la pension sur une plus longue période. « Si nous nous y étions mis il y a 15 ans, par exemple, cela aurait été moins compliqué », avance-t-il en relevant une contradiction entre l’âge de la pension à 60 ans et celui de la retraite à 65 ans. Il est parvenu à la conclusion que le changement qu’apportera le gouvernement permettra d’économiser Rs 15 milliards, soit un quart du budget de Rs 55 milliards pour la pension, alors que 40% sera redistribué sous forme d’Income Support.
Alternative au BRP à 65 ans
L’actuaire a proposé une alternative à la pension à 65 ans pour tous. Il est d’avis que si une personne ne peut travailler après 60 ans, le gouvernement aurait pu lui donner sa pension sur un plus long terme, mais à un taux réduit. Par exemple, Rs 10 000 à vie, au lieu de Rs 15 000 à partir de 65 ans.
Nalini Burn a argué que les 60-0 aux élections ont été une opportunité pour le gouvernement de mettre en place son projet. Elle a dénoncé un amalgame entre le fonds de pension et les fonds du gouvernement. « On a voulu faire croire que dans le problème de la dette, le plus grand coupable c’était la pension », fait-elle ressortir. Elle a aussi déploré que ce sont les conglomérats financiers qui gèrent les finances publiques. « À qui devons-nous de l’argent ? Beaucoup de nos dettes sont auprès de nos banques commerciales et en roupies », révèle-t-elle.
De même, elle se demande pourquoi cibler justement la pension, alors que ce n’est qu’un quart de la dette. « Qu’en est-il des autres dépenses ? » Elle estime que cette situation a poussé de nombreuses personnes vers les pensions privées, alors que d’autres secteurs, comme la santé et l’éducation, connaissent déjà une privatisation accélérée.
Nalini Burn a également fait ressortir que la plupart des revenus de l’État proviennent de la TVA et de l’Excise Duty, alors que la Corporate Tax est bien minime. Elle a également mis l’accent sur la notion de justice fiscale. « Quand un pays n’est plus souverain sur sa fiscalité, c’est qu’il a été capturé par le secteur financier », fait-elle ressortir. Elle précise également que selon les statistiques de l’Organisation mondiale de la Santé, datant de 2021, l’espérance de vie pour une personne en bonne santé est de 63,6 ans.
Lindsey Collen s’appesantit sur l’importance de la mobilisation. Elle prend en exemple les combats contre le démantèlement du Welfare State et la privatisation, par le passé, qui ont porté des fruits, notamment à travers la mise sur pied de l’All Workers Conference. Elle a salué la maturité des dirigeants syndicaux qui ont pu mettre sur pied la plate-forme.
Prakash Baluckram avance, lui, que la question de pension dépasse le cadre économique. Il a fait ressortir que lorsqu’on vieillit, il y a plus de dépenses, notamment au titre de la santé. Il a cité également l’exemple des grands-parents qui, à la retraite, s’occupent de leurs petits-enfants pour que leurs enfants puissent aller travailler. Il s’est interrogé sur les cas des policiers pouvant prendre leur retraite après 35 ans de service.
De même, il s’est demandé si le relèvement de l’âge de la pension était le seul moyen pour le gouvernement d’économiser de l’argent. Il est d’opinion qu’il faut rendre leur dignité aux travailleurs qui se sont sacrifiés pour le pays.

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