Réforme des pensions: La Commission d’experts lance la consultation nationale

La réforme du système de pensions à Maurice entre dans une phase décisive. Elle a été officiellement lancée lors d’une récente conférence de presse animée par Nureshkumar (Ashok) Prayag, président de la Commission d’experts sur la réforme de la pension.
Objectif : repenser un modèle vieillissant afin d’en assurer la viabilité à long terme, dans un contexte démographique de plus en plus préoccupant.

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Créée par le gouvernement, la Commission réunit un groupe pluridisciplinaire comprenant les actuaires Nureshkumar Prayag, Bernard Yen, Yvan Legris et Sattar Jackaria ; les économistes Azad Jeetun et Verena Tandrayen-Ragoobur ; ainsi que la statisticienne Li Fa (Aimé) Cheung Kai Suet.
Leur mission : proposer un nouveau cadre de retraite durable et équitable, à même de préserver la solidarité intergénérationnelle tout en garantissant la soutenabilité financière du système.

Maurice fait face à un triple défi démographique : une natalité en baisse, un exode croissant des jeunes diplômés et une espérance de vie en hausse. « Le modèle actuel n’est plus soutenable », a averti M. Prayag.
La population vieillit rapidement tandis que le nombre d’actifs diminue, ce qui pèse lourdement sur les finances publiques. Si rien n’est fait, l’équilibre du système sera menacé d’ici quelques années. Le constat n’est pas nouveau. Déjà en 2001, un rapport de la Banque mondiale, commandité par le gouvernement de l’époque, avait identifié les mêmes défis démographiques et financiers. Certaines pistes avaient alors été esquissées, mais sans réforme d’envergure.

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Aujourd’hui, les chiffres parlent d’eux-mêmes : en 2020, la pension de vieillesse représentait 5,9 % du PIB, contre 7,8 % en 2024. D’autres études, dont celles du FMI, confirment la tendance.
Face à ce constat, le gouvernement a choisi en 2025 de mandater une commission d’experts chargée d’évaluer toutes les composantes du système et de formuler des recommandations concrètes.

Les attributions de la Commission sont larges : elles couvrent l’ensemble des régimes existants, publics comme privés.
La Contribution Sociale Généralisée (CSG), introduite en 2020, a profondément modifié l’architecture du système de pension. Sa cohérence avec le National Pensions Fund (NPF) devra être réévaluée, dans la perspective d’un modèle plus équilibré et plus transparent.

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La Commission doit également soumettre ses propositions à un Steering Committee présidé par le Premier ministre, signe que la réforme est considérée comme un dossier prioritaire au plus haut niveau de l’État.

Les travaux de la Commission s’articulent autour de quatre axes majeurs : assurer la viabilité du système dans un contexte de vieillissement démographique accéléré ; adapter l’âge de la retraite à l’évolution de l’espérance de vie ; refondre les trois piliers du système — pensions publiques, régimes contributifs et retraites privées — pour en renforcer la cohérence, garantir un système plus équitable, fondé sur la clarté, la transparence, la proportionnalité et la soutenabilité.

« Il nous faut un système juste pour les générations à venir », a insisté M. Prayag.

Cette réforme ne fait toutefois pas l’unanimité. Plusieurs syndicats, dont le Mauritius Labour Congress (MLC), dénoncent l’absence de représentants des travailleurs au sein de la Commission.
Ils craignent que les décisions soient prises sans tenir compte de la réalité sociale des plus modestes. Le MLC demande que le rapport des experts soit rendu public dès son achèvement et que le gouvernement assume la responsabilité politique des recommandations finales.
Certains acteurs sociaux redoutent également qu’une réforme trop abrupte n’aggrave la précarité des retraités à faible revenu

Pour apaiser les inquiétudes et instaurer un dialogue inclusif, la Commission a annoncé une série de consultations nationales à partir de la semaine prochaine.
Les syndicats, partis politiques, organisations patronales et autres parties prenantes seront invités à y participer.

Le public, lui, peut soumettre ses propositions par courriel à prc@gov.org jusqu’au 30 novembre.
Selon le président Prayag, « la réforme des pensions concerne tous les Mauriciens. Nous voulons un système juste, transparent et adapté à notre avenir collectif.

Au-delà des aspects techniques, la réforme soulève une question fondamentale : comment concilier solidarité nationale et responsabilité budgétaire ?
La pension universelle demeure un pilier de la cohésion sociale mauricienne, mais sa pérennité impose des ajustements.
La réussite du processus dépendra donc de la transparence des décisions, du dialogue social et de la confiance du public dans les solutions retenues.

Cinq valeurs fondamentales

La Commission d’experts a défini cinq valeurs fondamentales pour guider ses travaux. Ces principes doivent assurer que toute évolution du système s’inscrive dans un esprit de justice sociale et de responsabilité collective :

  • Clarté
    Les propositions devront être compréhensibles par tous. Chaque Mauricien doit pouvoir savoir comment la réforme affecte ses droits et contributions.
  • Transparence
    Les critères de calcul, mécanismes de financement et projections démographiques seront rendus publics afin de renforcer la confiance et d’éviter toute opacité.
  • Équité
    La réforme doit réduire les inégalités entre catégories de travailleurs et protéger les plus vulnérables, tout en répartissant équitablement les efforts entre générations.
  • Proportionnalité
    Les ajustements — notamment sur l’âge de la retraite et les contributions — devront être raisonnables et progressifs pour éviter les chocs sociaux.
  • Soutenabilité
    Enfin, la viabilité financière à long terme constitue la pierre angulaire de la réforme. Il s’agit d’assurer la continuité du système sans compromettre la solidarité nationale.
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