La Federation of Parastatal Bodies and Other Unions (FPBOU) réclame la mise sur pied urgente d’un Omissions and Anomalies Committee, indépendant du Pay Research Bureau (PRB), afin de corriger les anomalies découlant du dernier rapport salarial pour le secteur public. La fédération syndicale souligne que ce comité devra s’attaquer en priorité aux problèmes fondamentaux liés aux salaires des grades situés aux échelons inférieurs et intermédiaires, tout en rééquilibrant le ratio salarial, jugé « loin d’être juste et équitable ».
La FPBOU estime que le salaire accordé aux General Workers est discriminatoire et ne fait qu’exacerber les frustrations dans un pays où chaque citoyen est censé bénéficier équitablement du gâteau national. « Le calcul du ratio salarial proposé ne reflète en rien la réalité. Les salaires des grades inférieurs ne sont ni décents ni même équivalents au salaire minimum », déplore Deepak Benydin, président de la FPBOU.
S’appuyant sur les chiffres de Statistics Mauritius — une estimation toutefois contestée par la FPBOU et la Consumers Union — le coût de la vie pour une famille de quatre personnes est estimé à Rs 45 000 par mois. « En divisant ce montant entre deux personnes actives, le salaire minimum aurait dû être d’au moins Rs 22 500. Aujourd’hui, les travailleurs du secteur public se retrouvent dans une situation encore pire que dans le privé, où il existe au moins des négociations collectives et une marge de manœuvre pour mieux rémunérer les employés », soutient-il.
Un autre point de discorde est le travail dominical. « Nous ne pouvons accepter de travailler le dimanche et d’être payés au taux normal. Primo, c’est illégal. Secundo, nous ne sommes pas des CEO, des Permanent Secretaries ou des directeurs d’organisations grassement rémunérés », s’insurge Deepak Benydin.
Les syndicalistes du public dénoncent également la suppression de l’allocation de transport pour les travailleurs âgés de plus de 60 ans. « Nous priver de notre maigre allocation sous ce prétexte revient à ajouter l’insulte à l’injustice, alors que les hauts dirigeants continuent de bénéficier de voitures Duty-Free et d’allocations forfaitaires, qu’ils se déplacent ou non », fustigent-ils.
Dans un contexte où plus de 60 000 travailleurs étrangers sont recrutés, la FPBOU s’interroge : « ne sommes-nous pas en train de pousser nos filles et fils du sol à quitter le pays ? »
La fédération syndicale s’oppose catégoriquement au paiement en tranches des augmentations salariales. « Depuis des années, nous vivons dans une misère noire, comme l’avait lui-même dénoncé l’actuel Premier ministre avant les dernières élections. Avec la perte du pouvoir d’achat, nous faisons nos courses et nous revenons avec un sac à moitié vide. Dès le 10 du mois, l’argent manque déjà. Reporter une partie de l’augmentation d’un General Worker, est-ce acceptable ? C’est comme recevoir un coup de poignard en plein cœur », insistent les syndicalistes.
Pour la FPBOU, l’esprit de sacrifice doit venir d’en haut. « Aux ministres, parlementaires, CEO, Permanent Secretaries et hauts cadres de montrer l’exemple: supprimez vos allocations de divertissement, divisez vos salaires par deux, utilisez de petites voitures, le métro ou l’autobus. Alors seulement, nous comprendrons que les temps sont difficiles », lance-t-elle.
Citant l’Organisation internationale du Travail (OIT), la FPBOU indique qu’un salaire décent doit permettre d’assurer un niveau de vie convenable aux travailleurs et à leurs familles, couvrant les besoins essentiels — alimentation, logement, santé, éducation, transport — tout en garantissant une qualité de vie digne, au-delà de la simple survie.
« Aujourd’hui, même les fonctionnaires, notamment les General Workers et autres grades auxiliaires, perçoivent des salaires dérisoires. Comment pouvons-nous alors espérer que le secteur public offre de meilleures conditions ? L’exemple doit venir d’en haut », fait ressortir la fédération.
À titre d’exemple, la FPBOU explique que si le paiement se fait en deux tranches, un General Worker dont le salaire devait passer de Rs 10 250 (PRB 2021) à Rs 17 975 ne percevra qu’une hausse immédiate de Rs 3 862.50, portant son salaire à Rs 14 112.50, soit bien en deçà du salaire minimum de Rs 17 110. « Voilà comment nous dominons et nous écrasons les petites gens, le petit peuple », concluent des syndicalistes.
SOEF : « Pas question de confier la correction des anomalies au PRB »
Le négociateur de la State and Other Employees Federation (SOEF), Radhakrishna Sadien, estime que la correction des erreurs et des omissions relevées dans le dernier rapport du Pay Research Bureau (PRB) ne doit en aucun cas être confiée à cette même institution.
« Je trouverais cela inacceptable que ce travail soit confié au PRB, qui a commis de graves erreurs dans son dernier rapport. Nous réclamons la mise en place d’un organisme indépendant pour effectuer cet exercice, car une fois le rapport sur la correction des anomalies publié, le fonctionnaire n’a plus aucun recours pour le contester », a-t-il déclaré.
Radhakrishna Sadien juge également aberrant que le PRB ne procède pas à une révision continue des salaires et des conditions de service dans le secteur public. Pour preuve, souligne-t-il, le PRB n’a entamé les travaux du dernier rapport qu’en février 2023, alors que le précédent datait de 2021. « Fallait-il attendre des instructions du gouvernement pour démarrer cet exercice ? » s’est-il interrogé.
Depuis 2021, le salaire minimum a été réajusté pour s’établir à Rs 17 110. Afin de garantir un salaire de Rs 20 000 aux travailleurs du secteur privé, le gouvernement a dû recourir à un Top-Up. Or, selon le syndicaliste, les employés du secteur public, notamment les General Workers, percevront un salaire avoisinant Rs 17 900 seulement.
À cela s’ajoute, selon lui, le manque de clarté entourant l’enveloppe de Rs 10,9 milliards prévue pour la révision salariale. « Le PRB indique que cette somme comprend à la fois les réajustements salariaux, le paiement de la compensation salariale et la révision générale des salaires. C’est injuste. Il n’y a aucun breakdown de ce montant », déplore-t-il.
Tout en reconnaissant dans son rapport l’existence d’un problème de rétention du personnel, le PRB, d’après Radhakrishna Sadien, ne propose pas de mesures adéquates. « Si rien n’est fait, la fonction publique cessera d’attirer les Mauriciens », avertit-il.
Il s’étonne également que le PRB n’ait fait aucune mention du ratio salarial entre un General Worker et un Senior Chief Executive. Il a fait ressortir que l’Annual Increment d’un General Worker est de Rs 175 par an jusqu’au plafond salarial, alors que pour ceux percevant plus de Rs 110 000, l’augmentation annuelle peut atteindre Rs 4 000. « C’est profondément injuste », tranche-t-il.
Le négociateur de la SOEF dénonce en outre le faible nombre de visites de terrain effectuées par le PRB. « Vous serez choqués d’apprendre que seulement 17 visites de site ont été effectuées en deux ans dans les ministères, départements et organismes parapublics dans le cadre du dossier Duty Remission », a-t-il soutenu.
Il juge par ailleurs ridicule le fait que de nombreux Field Workers n’aient pas droit à une Duty Remission de 70 % pour l’achat d’un véhicule, alors que d’autres bénéficient d’augmentations salariales allant jusqu’à Rs 42 000, assorties de conditions de service qualifiées d’invisibles.
Au chapitre des Passage Benefits, Radhakrishna Sadien regrette que les fonctionnaires ne puissent désormais utiliser que 50 % de cette allocation pour la rénovation de leur maison, contre la totalité auparavant. « On fait souffrir les petits salariés pendant que d’autres renouvellent leurs grosses cylindrées tous les cinq ans », a-t-il déploré, appelant le PRB à plus d’équité.
La SOEF réitère par ailleurs sa demande pour la nomination d’un Training Manager dans chaque ministère. « Une enquête du PRB révèle que seules 25 % des organisations publiques ont utilisé 90 % de leur budget de formation. Voilà pourquoi nous insistons sur la nécessité d’un Training Manager », explique-t-il.
S’agissant du paiement en deux tranches des ajustements salariaux à partir de 2026, Radhakrishna Sadien souligne que la Master Salary Scale ne fait aucune mention de 2027. « Qu’entend-on exactement par paiement en tranches ? Un General Worker percevra-t-il Rs 150 en 2026 au lieu de Rs 300? Que se passera-t-il en 2027 ? La compensation salariale sera-t-elle ajoutée ? Tout cela doit être clarifié », se demande-t-il.
Enfin, le syndicaliste dit regretter que le PRB ait également remis en question le paiement de la Sunday Allowance, une mesure qui, selon lui, risque d’avoir un effet boule de neige dans le secteur de la santé publique ainsi que dans la force policière. Le PRB maintient dans son rapport que le dimanche est un jour de travail normal pour les Shift Workers and Roaster.

