La colère gronde toujours chez Star Knitwear Ltd. Près de 250 travailleurs étrangers affirment n’avoir pas touché leur salaire depuis janvier. Lundi, une centaine d’entre eux ont manifesté devant la Victoria House, réclamant le paiement immédiat de leurs rémunérations.
L’affaire a pris une tournure dramatique le 29 janvier 2025, lorsque 240 employés ont reçu leur lettre de licenciement avant de trouver l’usine fermée du jour au lendemain. En quelques semaines, environ 480 travailleurs, mauriciens et étrangers, se sont retrouvés sans emploi, forçant l’intervention du ministère du Travail à travers le Wage Guarantee Fund pour assurer un minimum de salaires.
Après plusieurs mois de tractations, un accord final a été signé le 2 août 2025 devant le Redundancy Board. Cet accord officialise le licenciement de 906 employés – dont 552 Mauriciens et 354 étrangers. Il prévoit le versement d’indemnités, le règlement des congés et bonus en attente, ainsi que la priorité de remboursement des travailleurs lors de la vente des actifs de l’usine. Par ailleurs, les Mauriciens pourront intégrer le Workfare Programme, leur assurant une allocation financière en attendant de retrouver un emploi.
Qu’en est-il des travailleurs étrangers ?
Alors que les licenciés mauriciens pourront bénéficier du Workfare Programme, leurs collègues étrangers, principalement originaires d’Asie, restent sans filet de sécurité. Privés de salaire depuis plusieurs mois, ils vivent un véritable calvaire, peinant à couvrir leurs besoins essentiels.
Pour le syndicaliste Faizal Ally Beegun, cette différence de traitement constitue une injustice flagrante. Il rappelle que ces ouvriers devraient eux aussi recevoir une compensation à la fin de leur contrat ou en cas de receivership. Or, la loi actuelle ne leur accorde ni indemnités ni accès au Workfare Programme. « Bann travayer etranzer osi merite zot konpansasion », insiste-t-il, appelant le ministre du Travail à revoir une législation jugée discriminatoire.
Il dénonce aussi une atteinte grave aux droits humains, pointant du doigt des conditions de vie indignes. « Inn koup delo et CEB, ban travayer-la p manz biskwi ek delo pou viv. Dan ki condition humain, en 2025, kapav toler sa ? », s’indigne-t-il. L’usine, endettée de plus de deux millions de roupies envers la CEB, a vu son électricité coupée, plongeant les dortoirs dans l’obscurité. Une situation d’autant plus choquante que le gouvernement a lui-même fait appel à la main-d’œuvre étrangère pour pallier le manque massif de travailleurs locaux. Ces ouvriers ont quitté leur pays dans l’espoir d’une vie meilleure, mais se retrouvent aujourd’hui abandonnés.
Le ministre du Travail et des Relations industrielles, Reza Uteem, serait déjà intervenu à plusieurs reprises, sans résultat tangible. « Ena ene sourd oreille au niveau receivership », déplore encore le syndicaliste. Devant l’impasse, certains travailleurs se sont adressés à la Special Migrant Unit pour réclamer leurs salaires impayés, leurs billets d’avion ou encore un transfert. Près de 150 d’entre eux demandent déjà à être réaffectés dans d’autres entreprises.
Les ONG locales apportent un soutien limité en distribuant des repas chauds, mais les syndicats dénoncent l’inaction des ambassades. « Zot ressortissant pe soufer lor sol mauricien, mais ambassadeur la juste vini coupe ruban, leve pavillon, al zwenn Premier minis. Kot zot standing pou defendre zot dimunn ? », lance-t-il.
Les revendications
Les travailleurs réclament en urgence le paiement de leurs salaires, des conditions d’hébergement décentes, la possibilité d’être transférés vers d’autres entreprises ou, pour ceux qui le souhaitent, un billet de retour dans leur pays. Faute de solution rapide, la mobilisation pourrait s’intensifier. « Mo pena okenn swa, fer ban travayer-la al asiz divan Victoria House ouswa divan Parlman », avertit le syndicaliste Feizal Ally Beegun.
Affaire à suivre.