La population mauricienne est dans une phase de recul inquiétant, les experts parlent de tournant historique Cette baisse s’explique principalement par un solde naturel en chute libre. En 2024, 12 853 naissances ont été enregistrées, contre 12 507 décès. La différence de 346 personnes est l’une des plus faibles jamais observées. Ce phénomène est aggravé par un solde migratoire négatif, avec 3 186 Mauriciens qui ont quitté le pays. Le pays perd donc plus d’habitants qu’il n’en gagne.Jusqu’ici, Maurice connaissait encore une croissance, même minime, mais aujourd’hui, les dynamiques se sont inversées. Si cette tendance se poursuit, l’île pourrait voir sa population diminuer bien plus rapidement que prévu.
Naissances et décès : un fragile équilibre en passe d’être rompu
Le recul des naissances est un des éléments les plus marquants du rapport. En 2024, seulement 12 853 bébés sont nés, un chiffre légèrement inférieur à celui de 2023 (12 872), mais qui confirme une tendance de long terme : les Mauriciens ont de moins en moins d’enfants.
Dans le même temps, la mortalité augmente. 12 507 décès ont été enregistrés en 2024, soit 5,6% de plus qu’en 2023. Ce chiffre reflète le vieillissement rapide de la population, mais aussi une hausse préoccupante de la mortalité infantile. Le nombre de bébés décédés avant leur premier anniversaire est passé de 168 en 2023 à 185 en 2024, faisant grimper le taux de mortalité infantile à 14,4 pour 1 000 naissances vivantes. Cette hausse soulève des questions sur l’état des soins néonatals et la prise en charge des nouveau-nés.
Maurice est désormais proche d’un point critique où le nombre de décès pourrait dépasser celui des naissances. Si ce basculement se produit, il accélérera le déclin démographique, aggravant encore plus les difficultés économiques et sociales du pays.
Un vieillissement accéléré et un déséquilibre générationnel
Le vieillissement démographique est une transformation majeure qui bouleverse l’équilibre de la société mauricienne. En 2024, 14,2% des habitants avaient plus de 65 ans, contre 13,6% en 2023. Dans le même temps, la part des jeunes de moins de 15 ans diminue pour atteindre 16,0%, contre 16,2% l’année précédente. La population en âge de travailler, qui constituait 70,2% de la population en 2023, est désormais réduite à 69,8%.
Ce vieillissement rapide a un impact direct sur le taux de dépendance, qui est passé de 424,8 à 431,7 en un an. Autrement dit, pour 1 000 actifs, il y a désormais 432 personnes dépendantes, jeunes ou retraitées. Ce déséquilibre met une pression croissante sur le marché du travail et sur le financement des retraites. Avec moins d’actifs pour contribuer à la protection sociale, l’État devra faire face à une augmentation des dépenses de santé et de pension, tout en ayant une base d’imposition qui se réduit.
Cette situation annonce des tensions économiques à venir. Une population vieillissante signifie des coûts accrus pour le système de santé et les pensions de retraite, tandis qu’un rétrécissement de la population active limite la capacité de production et de croissance du pays.
Une émigration persistante qui aggrave la situation
L’émigration persistante aggrave cette situation. En 2024, 3 186 Mauriciens ont quitté le pays pour s’installer à l’étranger, poursuivant une tendance qui affaiblit encore davantage le marché du travail. Les départs concernent principalement de jeunes diplômés et des travailleurs qualifiés, attirés par de meilleures opportunités en Australie, au Canada et en Europe. Les perspectives professionnelles limitées, la stagnation des salaires et une qualité de vie jugée plus favorable ailleurs poussent de nombreux Mauriciens à s’expatrier, accentuant la fuite des cerveaux.
Les conséquences de cette émigration sont préoccupantes. La perte de jeunes talents fragilise l’économie, en particulier dans des secteurs stratégiques comme l’informatique, la finance et l’ingénierie. Avec une base de travailleurs qualifiés qui diminue, les entreprises locales peinent à recruter et à innover. Ce phénomène affecte également les finances publiques, car moins de travailleurs signifie moins de contributions fiscales, ce qui pourrait entraîner à long terme une augmentation des impôts pour ceux qui restent.
Une course contre la montre
Maurice se trouve à un tournant historique. Si rien n’est fait, le pays risque de suivre le chemin de nombreuses nations vieillissantes où la croissance économique s’essouffle, où la pression fiscale augmente, et où le tissu social se fragilise. Les gouvernants ont encore une marge de manœuvre pour redresser la situation. Mais chaque année qui passe sans action rendra la tâche plus ardue. Faudra-t-il attendre que le solde naturel devienne négatif pour prendre conscience de l’urgence ?
Quelles solutions pour inverser la tendance ?
Face à ces défis, des solutions doivent être mises en place pour éviter que Maurice ne sombre dans une crise démographique. La relance de la natalité est une priorité. L’État pourrait introduire des incitations financières pour encourager les naissances, faciliter l’accès aux services de garde et promouvoir une meilleure conciliation entre vie professionnelle et vie familiale.
L’émigration doit aussi être mieux contrôlée en améliorant les perspectives salariales et professionnelles des jeunes diplômés. Il est crucial de valoriser les carrières locales et de développer des industries à forte valeur ajoutée qui créent des emplois attractifs. En parallèle, le pays pourrait assouplir sa politique migratoire pour attirer des talents étrangers et combler les pénuries de main-d’œuvre.
L’adaptation du modèle économique au vieillissement est un autre chantier incontournable. Prolonger progressivement l’âge de la retraite permettrait de réduire la pression sur le système de pension. Par ailleurs, le développement de nouvelles infrastructures et de services pour les seniors sera indispensable pour répondre aux besoins croissants d’une population âgée.
Une émigration persistante qui aggrave la situation
L’un des aspects les plus préoccupants du rapport est la poursuite de l’émigration des Mauriciens vers l’étranger. En 2024, 3 186 habitants ont quitté le pays pour s’installer ailleurs, notamment en Australie, au Canada et en Europe.
Qui sont les Mauriciens
qui partent ?
Jeunes diplômés à la recherche d’opportunités meilleures à l’étranger.
Travailleurs qualifiés fuyant une stagnation des salaires et un marché du travail rigide.
Familles cherchant une meilleure qualité de vie et des perspectives éducatives plus larges pour leurs enfants.
Conséquences pour Maurice
Départ des talents : Le pays perd ses cerveaux, ce qui fragilise son potentiel d’innovation et de développement.
Moins de contributeurs fiscaux : L’exode réduit la base d’imposition et complique le financement des infrastructures publiques.
Un marché du travail sous tension : Certaines industries, comme l’informatique et l’ingénierie, peinent à recruter des profils qualifiés.
Quelles solutions pour inverser la tendance ?
Face à ce constat alarmant, des réformes doivent être envisagées d’urgence pour stabiliser la population et préserver l’équilibre socio-économique.
1. Relancer la natalité
Mise en place d’incitations financières pour les familles (allocations, congés parentaux bonifiés).
Développement de structures de garde à prix accessibles.
Sensibilisation sur l’importance du renouvellement des générations.
2. Réformer la politique migratoire
Encourager le retour des Mauriciens expatriés avec des incitations fiscales et professionnelles.
Faciliter l’immigration qualifiée pour combler les pénuries de main-d’œuvre.
3. Adapter le modèle économique au vieillissement
Prolongation de l’âge de la retraite pour limiter l’impact du vieillissement.
Développement d’une filière de services aux personnes âgées (santé, loisirs, accompagnement).
4. Stopper l’exode des jeunes talents
Valorisation des métiers à forte valeur ajoutée pour offrir des perspectives locales.
Augmentation des salaires dans les secteurs stratégiques.
Amélioration de la qualité de vie pour inciter les jeunes à rester.