Ils ont tout perdu : maison, provisions pour le mois, les uniformes des enfants… Vendredi, le pays a connu de terribles inondations. Hier matin, les autorités comptaient 1 227 sinistrés dans 21 centres d’évacuation, avec le plus grand nombre de sinistrés enregistré à Roche Bois (364), suivi de Vallée des Prêtres (158) et Bambous (132). Week-End a recueilli le témoignage de deux mères de famille, Caroline Victorien, habitante de Bambous, et Anusha Bairoo, habitante de Pointe-aux-Sables. Les deux femmes vivant pourtant à des heures de route, ont vécu le même calvaire, se retrouvant à la merci de l’eau. Témoignages.
Anusha Bairoo (Pointe-aux-Sables) :
« Ma maison est complètement saccagée … »
Anusha Bairoo ne se remet toujours pas de ce qui s’est passé. Mère de trois enfants âgés de 18 ans, 14 ans et 12 ans, elle a dormi chez sa mère vendredi soir dans un deux-pièces à Pointe-aux-Sables, car sa maison est complètement saccagée. Elle nous raconte que depuis jeudi, avec les grosses pluies, l’eau avait déjà commencé à s’accumuler dans la cour. Il faut noter que sa maison située dernière dans la cour familiale. Avec la récente construction de barrages en béton de ses voisins, Anusha Bairoo s’est retrouvée dans une sorte de cul-de-sac, en pente descendante qui plus est! « Je n’ai jamais connu ça, malgré tous les épisodes de pluie qu’il y a eu ces dernières années, c’est la première fois que ma maison est ainsi inondée », confie-t-elle.
Jeudi soir, Anusha Bairoo décide donc de faire ses enfants dormir chez sa mère qui habite dans la même cour, mais qui n’a elle, pas eu d’accumulation d’eau chez elle. « Avec les prises électriques, ce n’était pas safe pour les enfants de rester dans notre maison.Ils sont donc allés dormir chez ma mère, pendant que moi je suis restée dans ma maison. » Le lendemain, alors qu’Anusha Bairoo commençait à nettoyer la maison, qui à cette heure n’avait pas encore été complètement inondée, elle voit le niveau de l’eau monter d’un coup.
« Je ne peux pas vous dire à quel moment c’est arrivé. J’ai juste vu une grande quantité d’eau débouler dans ma maison. Et d’un coup, tout était inondé », dit-elle. Anusha Bairoo a quasiment tout perdu. L’eau boueuse a tout emporté. « Je ne retrouve plus les chaussures des enfants qui doivent aller à l’école. J’ai perdu toute ma nourriture, toutes mes provisions », soupire-t-elle. Si vendredi soir elle a pu trouver refuge chez sa mère qui abrite déjà sa soeur et sa fille, la jeune femme vit la peur au ventre. « J’espère qu’il n’y aura pas d’autres pluies de ce genre… »
L’appel à l’aide d’une sinistrée
La région de Bambous a été très affectée par les grosses pluies. Marie Lane Louis, une des sinistrées des inondations de vendredi, appelle à la solidarité des Mauriciens. Sa famille et elle sont rentrées chez eux hier soir, après avoir passé la nuit dans le centre de refuge. « Je n’ai plus rien. Je n’ai même pas un matelas ou de la nourriture. J’appelle à la solidarité des Mauriciens. S’ils ont un matelas qu’ils n’utilisent pas ou des vivres à nous donner le temps de nous remettre, je leur serai éternellement reconnaissante », confie-t-elle. À savoir que Marie Lane Louis habite avec trois autres adultes et trois enfants âgés de 12 ans, 5 ans et 9 mois.
Caroline Victorien (Bambous) :
« Nou’nn retourn a zero ! »
Caroline Victorien était au centre social de Bambous à l’heure où nous mettions sous presse hier. Avec ses quatre enfants, ils y ont passé la nuit. « J’habite à Cité La Ferme à Bambous et ce n’est pas la première fois que je dois venir me réfugier dans un centre avec mes enfants… » dit-elle fatiguée. En effet, cette mère célibataire habite dans un endroit où il n’y a pas de drains pour évacuer l’eau pluviale.
Sa petite maison, elle a dû la quitter, jeudi soir, avec les grosses pluies. « Il y avait déjà beaucoup d’eau dans la maison. J’ai appelé la police qui a appelé les pompiers, qui sont venus retirer l’eau. J’avais, depuis jeudi soir, demandé à ce que l’on puisse aller se réfugier dans un centre, mais ils m’ont dit qu’il fallait attendre les directives des autorités », dit-elle. Face à la dangerosité de la situation, avec notamment des prises électriques ayant pris l’eau, Caroline Victorien décide alors de prendre ses enfants et d’aller passer la nuit chez un proche.
Le lendemain, soit vendredi, elle retourne chez elle pour faire un état des lieux. « Et j’ai eu le choc de voir l’eau qui était montée jusqu’aux genoux. J’avais tout perdu. D’habitude, je prends quelques provisions pour mes enfants qui vont à l’école, me tou inn gate. Narye pa’nn reste. Nou’nn retourn a zero ! » Aujourd’hui, Caroline Viktorien ne sait plus à quel saint se vouer.
« Depuis 2015, je fais des démarches pour avoir une maison ailleurs. Je ne peux plus vivre dans des conditions pareilles et dans cette peur à chaque fois qu’il pleut. C’est inhumain. Mes enfants sont restés dans leurs vêtements trempés depuis vendredi soir… », confie-t-elle.
Vu sur Facebook : Un bébé sur un matelas entouré d’eau
La vidéo d’un bébé sur un matelas voguant dans un très fort courant d’eau boueuse traversant la chambre a ému plus d’un sur le net. Sur la vidéo, l’on voit un petit bout de chou debout sur son lit. Il regarde ébahi l’eau envahir avec force sa maison. Il s’agit de la maison d’un couple de La Gaulette, qui a été évacué avec ses deux enfants vendredi soir par les officiers du Fisheries Protection Service.
Sains et saufs, ils ont pu se réfugier dans un centre non loin de chez eux. C’est la mère du petit qui avait lancé un appel à l’aide sur Facebook en publiant la vidéo. Les bons samaritains n’ont pas tardé à réagir. Au moins, une histoire qui finit bien…