Theeshan Bahorun: « Mismatch of skills non-traitée pendant des années »

L’inadéquation qui existe entre l’offre et la demande sur le marché de l’emploi est palpable à Maurice. D’ailleurs, plusieurs se sont prononcés sur ce problème. Si les programmes des universités sont aussi critiqués d’être en déphasage avec la demande des industries, les cours élaborés de Polytechnics Mauritius Limited viennent répondre à ce manque. Theeshan Bahorun, président de PML souligne que la formation « taillée sur mesure » par PML assurera un emploi aux étudiants.

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Cela fait quelques mois que vous êtes président de Polytechnics Mauritius Limited (PML).
Expliquez-nous en la philosophie.
Lorsque j’ai pris les rênes de PML en tant que président en janvier 2017, l’institution n’était vraiment pas en existence. Nous avons eu la responsabilité de mettre en place les infrastructures mais surtout à démarrer les cours. Dans la foulée, nous avons établi des partenariats avec des institutions étrangères pour que nos cours soient rapidement accrédités. Ces cours sont adaptés aux différents secteurs de l’industrie. Si nous analysons bien la situation, PML est un système éducatif dans le domaine tertiaire, soit un alternatif des universités.

Nous offrons aux étudiants la possibilité d’entreprendre des cours qui sont adaptés à l’environnement industriel et appliqués tout de suite. Ce ne sont pas de longues études comme tel est le cas à l’université. Il nous manquait ce chaînon dans le système tertiaire à Maurice. PML apporte ainsi sa pierre à l’édifice pour que le système éducatif soit complet depuis le primaire au tertiaire. Nous apportons notre contribution pour que le système tertiaire à Maurice soit très pratique et qu’on peut utiliser rapidement pour le développement socio-économique du pays.

On associe souvent l’éducation polytechnique à ceux qui ne peuvent pas aller à l’université. En quoi PML sera différent ?
On ne peut comparer PML à quelconque institution. Il n’y a pas son équivalent à Maurice. Nous avons une tendance à la comparer au Mauritius Institute of Training and Development (MITD) mais les deux institutions ne sont pas les mêmes. Au fait, MITD sera complémentaire de PML.

Le MITD cible un niveau plus bas alors que PML vise ceux du Middle Management. Il existait une certaine appréhension au niveau de MITD. Certaines personnes disaient que PML allait éclipser le MITD mais ce n’est pas le cas. J’ai rassuré tout le monde sur ce sujet. PML complémentera les actions du MITD tout en étant indépendant sur d’autres cours que PML élaborera. Globalement, ce sera un plus pour le secteur professionnel.

Après les cours en nursing et maintenant en tourisme, et bientôt les TIC… Comment se fait le choix des formations ?
Lorsque nous avons commencé PML en janvier 2017, nous avions établi trois axes de développement : la santé, le tourisme et l’hôtellerie, et les TIC. Ce sont trois secteurs qu’il fallait développer car nous avons, en premier lieu, un manque aigu d’infirmiers au niveau local, régional et international. C’est la raison pourquoi PML se positionne pour offrir des cours de santé pour former des gens pour ce secteur. Concernant le tourisme, malgré le fait que plusieurs institutions offrent des cours en tourisme et l’hôtellerie, nous avons quand même la possibilité d’apporter notre pierre à l’édifice pour que cette formation soit aussi offerte au niveau polytechnique. Nous avons rencontré toutes les parties prenantes concernées, telles que les directeurs d’hôtels et les responsables de ressources humaines, pour connaître leurs attentes.

Nous avons trouvé que c’est un secteur qui est dynamique. De ce fait, on ne peut pas avoir une formation figée. PML est flexible pour répondre aux attentes pour que le secteur évolue. Nous mettons en place une formation de base mais nous avons aussi d’autres cours qui se grefferont à la formation principale. De ce fait, les étudiants auront une formation spécialisée pour des secteurs niches lorsqu’ils termineront leurs cours. Nous serons toujours à l’écoute du secteur du tourisme et l’hôtellerie. D’ailleurs, nous avons un partenaire de la Nouvelle-Zélande qui élabore de petits cours pour nous en ce moment. Pour l’instant, nous travaillons avec la Hotel and Tourism Management Institute de Suisse.

C’est la 14e école du tourisme au monde et c’est positif pour le paysage touristique de Maurice. Les étudiants de PML sortiront avec un diplôme de HTMi reconnu mondialement. C’est une chose formidable que nous faisons pour le secteur du tourisme à Maurice.  Nous achevons en ce moment le recrutement des Programme leaders, des chargés de cours à plein-temps et à temps partiel. Nous effectuons aussi une restructuration de notre campus à Montagne-Blanche pour qu’il reflète le paysage d’un hôtel pour que les élèves se sentent vraiment dans une école de formation hôtelière. C’est pour cette raison que cela prend un peu plus de temps mais les résultats seront formidables.

Si nous suivons le cours en soins de santé, nous sommes déjà à notre deuxième groupe d’étudiants. Nous avons eu un grand coup de main du Human Resource Development Council (HRDC) qui finance les étudiants comme c’est le cas pour les étudiants du Mauritius Institute of Health. Un groupe d’étudiants de PML est en stage dans les hôpitaux et un autre en classe. Le campus de Pamplemousses compte au moins 150 étudiants. Nous sommes en cours de recrutement pour les étudiants pour les cours en tourisme. Aussitôt le recrutement terminé, nous débuterons les cours.

S’agissant des TIC, nous sommes toujours en discussion avec les partenaires stratégiques. L’un d’eux est Microsoft. Les négociations ont rapidement avancé. Nous pensons finir avec les négociations pour identifier les cours qui seront donnés et après lancer notre campagne de recrutement. L’école se trouve à Réduit.

Cela permettra-t-il de combler le manque de compétences que nous avons pour ces secteurs ?
Bien sûr. Les étudiants seront à cheval avec l’industrie. Ils ne vont pas s’asseoir dans une classe tout au long de leur cours et chercher un emploi après. Ils seront en contact avec l’industrie chaque semestre. Je suis sûr qu’après leur formation, ils seront rapidement recrutés car ils ont fait des stages dans l’entreprise. C’est une win-win situation des deux côtés.

Nous avons également d’autres institutions qui offrent les mêmes cours. Quelle sera la différence avec PML ?
Nos cours sont dans le Middle Management et répondent aux besoins spécifiques de l’industrie. La raison d’être de PML est de réduire l’inadéquation entre l’offre et la demande de compétences. Si on analyse un point. Toutes nos universités sont en existence depuis de nombreuses années. Nous savons tous que les études sont longues à l’université. Peut-on être sûr d’obtenir le travail qu’on veut après trois ans d’études ? Dans la plupart des cas c’est non. On doit suivre une petite formation complémentaire. Nous sommes dans une situation de « mismatch of skills » qui n’a pas été traitée pendant des années. On est déphasé par rapport aux besoins du pays.

C’est pourquoi les industries disent que les cours offerts à l’université ne répondent pas à leur demande. Nous essayons de combler cela. Nous ne sommes pas en concurrence avec les universités. Nous ciblons ceux du Middle Management. Nous permettons à l’étudiant d’intégrer l’industrie avec les compétences requises pour qu’il puisse commencer sa carrière. La manière de penser des étudiants n’est plus la même. Ils veulent une formation théorique et pratique. C’est ce qu’offre PML aux étudiants. Et ainsi, ils peuvent développer leur carrière. Ces jeunes ont aussi la possibilité, après leur passage en polytechnique d’aller à l’université s’ils souhaitent des études longues.

Qui sont les étudiants de PML ?
Ce seront ceux qui ont terminé leur Higher School Certificate, des « mature students » et ceux qui ont suivi des cours au MITD. La polytechnique est la démocratisation du système d’éducation tertiaire pour qu’on puisse répondre aux attentes des industries.

Il semble qu’on accorde plus d’importance à l’éducation académique que polytechnique à Maurice. Qu’en pensez-vous ?
Si nous prenons l’exemple du Singapour, de l’Allemagne ou de la Nouvelle-Zélande, la majorité des étudiants préfèrent la polytechnique avant de poursuivre des études longues. Ils ont ainsi un acquis avant des études poussées. Nous avons de nombreuses personnes qui sont bardées de diplômes mais ne trouvent rien car elles ne sont pas demandées dans le système. Nous essayons de contribuer pour que les élèves qui ont terminé leur School Certificate ou leur HSC puissent obtenir un emploi après leurs études dans une école polytechnique.

PML a été critiqué au niveau de son retard pour le début des cours. Quelles sont les raisons ?
Pour effectuer un travail correctement, il est important de suivre toutes les procédures. Pour équiper nos écoles, il nous faut acheter des équipements. Tout cela passe par le Public Procurement Office même si PML est privé. On essaie quand même d’accélérer les choses. En un an, notre campus qui se trouve à Pamplemousses est déjà opérationnel. Un autre ouvrira ses portes très bientôt. Nous avons recruté presque tout le personnel. Nous devons suivre les procédures avant de faire la sélection des personnes. Cette sélection prend du temps.

Quels sont vos projets à venir ?
Nous aurons d’autres nouveaux cours dans les soins de santé, le tourisme et les TIC. Ces nouveaux cours sont ajoutés après des consultations avec l’industrie. Nous voulons aussi nous rendre en Afrique. Lors d’un board meeting tenu récemment nous avons parlé sur ce sujet. Nous voulons que nos campus soient au niveau international pour attirer ces étudiants. L’avantage avec HTMi c’est de pouvoir attirer les étudiants africains qui ne peuvent entreprendre des études en Suisse ou au Singapour.

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