TOURISME | Le Challenge de la réouverture des frontières – L’hôtellerie en quête du code du luxe exclusif

– C. L., client d’un Resort Bubble : « Maurice n’est pas prête à accueillir les touristes »

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– Dans l’hôtel où il loge, il estime que le service habituel n’y est pas encore

Conditions d’entrée et d’hébergement trop strictes pour les vaccinés, hôtels pas entretenus au top niveau, personnel démotivé pour certains, paranoïa face à certains gestes simples de la clientèle, manque de formation face au Covid-19… L’hôtellerie mauricienne aurait-elle oublié les codes du luxe pendant ces 16 mois d’inactivité ? C’est en substance le témoignage d’un des clients des 14 hôtels appelés “resort bubble” qui accueillent les passagers depuis le 15 juillet.

C. L. est un expatrié résidant à Maurice depuis plusieurs années où il opère une entreprise évoluant à l’échelle régionale dans le domaine de la technologie. Il est actuellement en quarantaine au sein d’un Resort Bubble après un long séjour en France auprès de sa famille. Habitué aux séjours hôteliers à Maurice bien avant le Covid, C. L. sait donc de quoi il parle et est en mesure de voir si le niveau de prestations évolue positivement ou pas. Mais là, il se dit inquiet et ne cesse de répéter au cours de l’entretien qu’« il faut se préparer au futur du tourisme », et estime qu’à ce stade, le pays n’est pas encore prêt à accueillir les voyageurs étrangers, qui pourraient se montrer davatange plus exigeants qu’avant Covid-19 avec un goût pour ce qui est le luxe exclusif.

Cet expatrié veut apporter son témoignage sur l’expérience vécue en quarantaine le week-end dernier. Il partage son inquiétude sur certains détails clés et déterminants dans la stratégie mise en place par le pays pour récupérer – ou non – ses parts de marché d’avant la crise.

Touristes refoulés à Paris

C. L. et sa famille logent actuellement dans un Resort Bubble, un établissement de luxe spécialement ouvert depuis le 15 juillet pour accueillir la clientèle internationale et les Mauriciens et résidents qui rentrent au pays, mais à en croire son témoignage, il semble que le niveau de service hôtelier d’avant-Covid n’y est pas. Dès l’annonce du déconfinement en juin et malgré la quarantaine, C. L. et sa famille ont voulu aller rendre visite à leur famille en France. À l’aéroport, lors des procédures d’embarquement à Paris, « le protocole sanitaire a été bien respecté avec le contrôle des tests PCR, etc. pour ceux qui venaient à Maurice », dit-il.

Toutefois certaines choses l’interpellent, à commencer par cette famille de touristes qui a été refoulée au comptoir d’Air Mauritius, à Paris, sous prétexte que leur test PCR « était trop récent ». Surpris, C. L. soutient que la plupart des pays demandent un test PCR de 72h et Maurice un test de cinq à sept jours. « Cette famille a respecté les protocoles mondiaux mais a été contrainte de reporter son voyage, sous prétexte d’un test négatif trop récent. C’est un peu de l’abus… Ces touristes étaient outrés, ils ont fait queue au comptoir de check in d’Air Mauritius pour s’entendre dire au Check-In de leurs bagages : Désolé, votre test PCR est trop récent. Cela crée une  confusion, voire une grande déception. Il semble que les protocoles soient trop stricts. »

Remotiver le personnel

C. L. parle de conditions assez drastiques pour rentrer à Maurice, avec pour résultat que le vol qu’il a pris le week-end dernier reliant Paris à Maurice était à moitié vide.  Il se désole car il veut lui aussi que les touristes soient de retour au pays. C. L. constate que les conditions pour les vaccinés sont trop strictes. Et se demande : « Pourquoi imposer aux étrangers vaccinés trois tests PCR, sachant que nous, on nous a imposé d’attendre deux semaines en France après notre première injection. Il n’y a presque aucun touriste qui arrive à Maurice pour l’instant. Non seulement, notre vol était quasi-vide, mais dans l’hôtel où nous logeons, 80% des passagers ayant débarqué sont mauriciens ou expatriés alors que nous sommes dans un “resort bubble” qui aurait dû accueillir touristes. »

L’expatrié raconte qu’à l’hôtel où il loge, tout est bien organisé et qu’il a été bien accueilli. Mais il se pose la question de savoir si l’établissement est « prêt à accueillir les touristes demain en Full Capacity». Pourquoi cette question ? « J’ai l’habitude de séjourner dans les hôtels mauriciens et cela bien avant le Covid. Donc, je suis familier avec le service et les commodités des hôtels de luxe. Mais là, on se croirait un lundi, au lendemain d’un week-end et on sent bien que tout est un peu lent à reprendre… Il faut absolument que le secteur hôtelier profite de cette période transitoire jusqu’au 1er octobre pour former son personnel, et surtout redynamiser les troupes. Désormais et plus que jamais, les touristes internationaux vont rechercher l’excellence dans leurs déplacements. Ils vont rechercher des vacances exceptionnelles, et la concurrence mondiale sera encore plus féroce. La gentillesse et le savoir-faire ne suffisent plus. Il faut de nouvelles idées pour retrouver le tourisme que Maurice a connu avant la crise. Il faudra être meilleur que la Thaïlande, la Malaisie et Dubaï, qui eux réfléchissent aux moyens de faire revenir les touristes. Pourquoi les gens viendront-ils à Maurice et pas ailleurs ? » s’inquiète C. L.

Et de poursuivre que le Resort Bubble où il se trouve actuellement est beau mais qu’au niveau du service, il note des approximations. Et il semble déçu que cet établissement « n’a pas les codes de l’hôtellerie de luxe ». Il soutient que les employés « ne transmettent pas la même écoute ou la même convivialité ». Il ajoute : « pourtant nous avons payé cher pour la quarantaine dans ce type d’établissement. Mais si demain nous voulons que chaque touriste agisse comme un ambassadeur de notre destination, nous devons lui transmettre des ondes positives. Le staff devra réapprendre à sourire, anticiper les besoins des clients et toujours être en avance sur ces besoins. Vous me direz que je suis exigeant, mais nous avons payé un gros package avec les tests PCR et tout pour séjourner dans cet établissement soit Rs 12 000 à Rs 13 000 par jour. »

« Une certaine paranoïa »

Pourtant C. L. et son épouse ne cessent de répéter que c’est un hôtel haut de gamme, qui a été refait et que « le spot est super ». Mais il semble manquer quelque chose à l’équation… « Maurice a des atouts pour réussir mais il ne faut pas penser que le tourisme va revenir naturellement. Il faudra apporter plus et après un an d’inactivité, c’est clair que le personnel doit être davantage formé. » Pour les buffets par exemple, il dit relever des couacs au moment du service, notamment pour éviter que les clients ne touchent pas les mêmes couverts. « Par exemple, pour prendre une pomme, nous pouvons le faire nous-même, mais le personnel nous demande de ne pas les toucher. C’est un peu exagéré. Il y a une certaine paranoïa chez le staff et ils doivent être mieux formés pour la grande réouverture. Il faut leur expliquer certaines choses et certaines logiques. Il faut les éduquer », lâche cet expatrié qui ne souhaite pas jeter la pierre au secteur hôtelier local, déjà mal en point avec la crise.

Mais pour lui, l’essentiel est de faire passer ce message que le pays « n’est pas prêt à accueillir les touristes ». Il fait état d’un autre inconvénient au niveau du service : « Je voulais déposer ma fille au Kids Club mais on m’a dit qu’il n’y avait pas de place et ce, alors que l’hôtel est seulement à moitié plein ! Mais comment feront-ils demain lorsqu’ils seront en “full capacity” ? Il faut absolument rechercher l’excellence dans cette nouvelle ère Covid et il faut le faire tout de suite. Il y a plusieurs détails à améliorer. »

Un témoignage qui contraste avec celui d’Arvind Bundhun, directeur de la MTPA, qui déclare  que « we have been welcoming international visitors to our island since the middle of July and the resort bubbles’ have proven a great success. »

Pour cet expatrié, il y a « beaucoup à faire » car certains membres du personnel savent offrir un excellent service, et d’autres non. « Il nous reste quelques semaines pour nous réveiller. Et nous constatons aussi que beaucoup d’hôtels sont restés à l’abandon pendant un an et il faut à tout prix les remettre en ordre. On voit que ces hôtels n’ont pas été entretenus car leur pelouse est jaune. Nous l’avons constaté en nous promenant sur la plage et c’est impensable dans des établissements de luxe où les gens payent cher pour séjourner. Je pense que Maurice n’est pas prête à accueillir les touristes. On n’est pas prêts à accueillir un million de touristes comme avant et si nous voulons voir le secteur reprendre en 2023 préparons-nous dès maintenant. »

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