Universités : Quelle liberté d’expression pour les chargés de cours ?

Depuis que le responsable de la faculté de droit à l’Université de Maurice (UoM) a pris position contre certaines décisions gouvernementales, il a été accusé de faire de la politique active et a été convoqué devant le comité disciplinaire de cette institution. Et depuis, la liberté d’expression des universitaires ne cesse de faire débat. Jusqu’où les chargés de cours peuvent-ils avoir droit à la parole ?

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Neelkanth Dulloo, avocat, défenseur des droits humains et chargé de cours en droit et politique, adopte un ton tranché à ce sujet : « Les universités constituent des pépinières de la démocratie. Il faut leur permettre de parler tant qu’ils ne font pas dans la diffamation. » Il remarque que « cette culture qui empêche les gens de s’exprimer est devenue une tendance à Maurice ».

Selon lui, « il faut y mettre un terme, car c’est une entorse légale ». L’avocat interroge non sans ironie : « Pourquoi avoir peur de la voix des citoyens ? » Il est chagrinant, dit-il, que « dans ce « killing of democracy », l’université participe, alors qu’elle fait croire qu’elle n’est pas dans la danse ». Kushal Lobine, autre homme de loi, trouve la situation « inquiétante pour la démocratie ».

Surtout, dit-il, « quand vous êtes un académicien, responsable de la faculté de droit de l’UoM », car « c’est quelque chose qu’il ne faut pas prendre à la légère ! » Pour lui, l’UoM devrait fonctionner comme toute autre université dans le monde. Il ne faut pas que « Maurice devienne une société intolérante où on n’accepte pas la critique ». Il ajoute que « les gens qui nous gouvernent doivent réfléchir doublement car ce n’est pas un bon signal ».

Pour sa part, l’ancien ministre de l’Éducation et chargé de cours à temps partiel Dharam Gokhool précise que depuis le PRB de 1987, un terme a été mis au droit du chargé de cours de faire de la politique active. Mais que lui a pu faire de la politique tout en conservant son poste de chargé de cours, car « en 1995, l’UoM a décidé que ceux qui avaient activement participé à la politique depuis longtemps pouvaient garder cela comme un droit acquis ». Il se dit contre le principe de faire la politique active et d’enseigner parallèlement. Il estime « qu’il faut encourager les chargés de cours à s’exprimer même sur des sujets sensibles mais ils ne doivent pas faire partie d’un parti politique ». Il reconnaît toutefois que dans la pratique, cela pose problème parce qu’entre-temps, tout est politisé à outrance. « À l’UoM, actuellement, il y a beaucoup de nominés politiques qui sont au niveau du « policy making ». Le défi aujourd’hui est de gérer cette situation de conflit entre un universitaire qui soutient le gouvernement et un autre dans l’opposition. » Il faut, selon lui, « délimiter ce qu’est la politique active et ce qui ne l’est pas » et « trouver un juste milieu entre les intérêts des étudiants et la liberté des académiques ».

Neelkanth Dulloo : « Chagrinant que l’UoM participe à ce « killing of democracy » »

Neelkanth Dulloo

Votre point de vue au regard du responsable de la faculté de droit à l’UoM appelé à se présenter devant le comité disciplinaire de cette université pour avoir exprimé ses opinions sur des questions d’actualité ?
C’est très chagrinant pour la liberté d’expression car dans plusieurs démocraties, comme en Angleterre, en France et aux États-Unis, on peut constater qu’on encourage les académiciens, les citoyens et les jeunes à s’exprimer, à participer à des débats constructifs et faire de la critique. Si nous prenons l’exemple de l’Inde, on verra que les académiciens y prennent la parole. Même dans les pays d’Asie comme au Japon, on n’empêche pas les citoyens de s’exprimer. Cette pratique qui empêche les gens de s’exprimer est devenue une tendance à Maurice. Il faut y mettre un terme car c’est une entorse légale. Si demain on m’empêche de m’exprimer, je dirai que je suis dans un pays démocratique. Mon droit constitutionnel me permet de parler tant que je ne commets pas de diffamation. Même sur des sujets ayant trait à la politique, pourquoi pas ? Si j’étais politicien, je n’aurais pas souhaité qu’il y ait des « yes men » autour de moi. Le Premier ministre, le président de la République et le leader de l’opposition devraient adopter ce principe. Si le pays prend une direction contre le progrès social et le progrès économique, cela ne veut nullement dire que le citoyen doit souffrir en silence et ne pas exprimer son opinion de peur qu’il perde son emploi. Qu’avons-nous là ? Une politique de « méchancetés ». Un gouvernement devrait se réjouir qu’il y ait des gens qui puissent s’exprimer ouvertement. Pourquoi chercher le silence des gens ? Il n’y a pas de raison. Surtout quand on parle de mauvaise gestion et de corruption. Peut-on empêcher les gens de parler de corruption ? Quelle direction prenez-vous ? Celle de Mugabe, de Kim Jong-Un ?

Vous êtes aussi chargé de cours en droit et politique. Quel devrait être le rôle des chargés de cours en dehors de leur rôle académique ? N’ont-ils pas le droit, voire le devoir, de prendre position sur des questions ayant trait aux droits des citoyens ?
Si j’étais Premier ministre et président de la République, j’aurais invité les chargés de cours à attirer l’attention du public s’il y a matière à débat. Pourquoi avoir peur de la voix des citoyens ? Parce qu’elle risque d’influencer la population ? Si une personne est à côté de la plaque, le citoyen le saura. Mais si une personne se base sur des faits pour parler de politique, et surtout de corruption et de népotisme, vous instituez un comité disciplinaire pour le menacer ? Que ce soit un comité disciplinaire, le recours à la police, à la MRA, à l’ICAC pour des enquêtes inutiles, ce sont autant de moyens de menace.

Selon le chargé de cours en question, la direction de l’UoM lui aurait fait comprendre qu’elle a reçu des instructions venant d’en haut pour qu’on le convoque devant un comité disciplinaire. La démocratie et la liberté d’expression sont-elles ici bafouées ?
Je suis très bien renseigné concernant ce qui se déroule. J’ai honte à la place de cette personne qui a demandé l’institution d’un comité disciplinaire. J’ai aussi honte à la place de la personne qui dirige l’université. Celle-ci doit savoir qu’il est maintenant perçu comme un « yes man ». Si j’étais à sa place et que je recevais un ordre politique me demandant de sanctionner un de mes chargés de cours, je n’aurais pas obtempéré. Je serais passé devant le sénat de l’université pour décider ce qu’il faut faire. Je constate le silence de la ministre de l’Éducation sur cette affaire. Elle ne fait pas honneur à son titre en restant silencieuse face à ce qui se déroule à l’UoM. Je le dis : n’importe quel citoyen, que ce soit un membre du gouvernement, un fonctionnaire ou un employé du secteur privé a le droit d’exprimer son opinion politique. Dans les grandes démocraties, on ne persécute pas les citoyens.

Un chargé de cours en droit constitutionnel a le droit de s’exprimer sur des questions ayant trait aux décisions gouvernementales…
N’importe quel chargé de cours ! Tout comme il y a des codes de conduite pour dire qu’il ne faut faire aucun commentaire politique, surtout à l’intention des fonctionnaires, je pense qu’il est grand temps de changer cet état de choses. Un fonctionnaire a le droit de dire son désaccord.

En réalité, tel n’est pas le cas. Les fonctionnaires ont peur de s’exprimer…
Il y a des maris fonctionnaires qui frappent leurs femmes à la maison et qui ont peur de s’exprimer…

À l’étranger, prendre position sur des thèmes précis est une pratique courante chez les universitaires…
C’est sûr, tous les jours, nous voyons cela sur BBC, CNN, Sky News. Au contraire, les universités constituent des pépinières de la démocratie. Il faut permettre aux universitaires de parler tant qu’ils ne font pas dans la diffamation. Si j’étais Premier ministre, je conseillerais à la MBC de lancer une chaîne dédiée aux débats politiques. Tout comme le « Question Time » sur la BBC.

Diriez-vous que l’Academic Freedom existe à Maurice ?
Elle existe mais on veut la supprimer. Il est chagrinant que dans ce « killing of democracy », l’université participe alors qu’elle fait croire qu’elle n’est pas dans la danse.

Un dernier mot…
Je lance un appel à la sensibilité de nos dirigeants. N’essayez pas de bloquer la voix de ceux qui ont une opinion autre que la vôtre. Il faut, au contraire, encourager les débats à tous les niveaux. Si on continue avec cette tendance de « moutonniser » des professionnels ou inspirer de la frayeur, ce sera très laid en matière de liberté d’expression. Je suis sûr qu’en ce qui concerne l’index de la liberté d’expression, Maurice sera déclassée car les organisations internationales tiennent compte de ce qui se passe et jugent les dirigeants de la même trempe que ceux qui étaient sous Mugabe et Kim Jong-Un.

Kushal Lobine (avocat) : « Inquiétant pour la démocratie »

Votre point de vue au regard du responsable de la faculté de droit à l’UoM appelé à se présenter devant le comité disciplinaire de cette université pour avoir exprimé ses opinions sur des questions d’actualité ?
Je trouve cette situation un peu dommage et aussi inquiétante pour la démocratie parce que dans un Etat de droit, surtout quand vous êtes un académicien, responsable de la faculté de droit à l’UoM, c’est quelque chose qu’il ne faut pas prendre à la légère ! Si des autorités questionnent les gens et les convoquent devant un comité disciplinaire parce qu’ils ont exprimé leurs points de vue, surtout dans le cas de M. Narsinghen, c’est inquiétant car il y a des protocoles au sein de l’UoM qui, depuis de nombreuses années, permettent aux « lecturers » de s’exprimer, même de faire de la politique active. Autant que je sache, ce dernier n’est pas membre d’un parti politique, ce qui ne l’empêche pas de le faire car il y a eu des précédents comme le Pr Kasenally, Vidula Nababsing, Dharam Gokhool…

La loi, semble-t-il, a changé depuis…
Ce n’est pas une question de loi car au sein de l’UoM, ils ont des paramètres spécifiques. Pour moi, l’UoM doit fonctionner comme toute autre université dans le monde. Quand vous allez en Angleterre, en France, aux États-Unis, même en Inde, les professeurs, les académiciens ont le droit de s’exprimer parce que cela déclenche des débats dans la société civile aussi bien que des amendements à la loi. M. Narsinghen était aussi un membre de la Law Reform Commission et les points de vue qu’il exprime sont des points de droit, des arguments légalistiques assez techniques qu’il exprime sur les réseaux sociaux, dans la presse… Il a pris position sur la loi Covid-19, sur les Mauriciens bloqués à l’extérieur. Il a donc donné des arguments légaux concernant des lois qui, à son humble avis, ont été bafouées. Je trouve cela extrêmement malsain qu’il soit confronté à un comité disciplinaire. Je ne connais malheureusement pas les charges qui lui sont reprochées. On laisse cela au comité disciplinaire et à ses hommes de loi. Mais ce qui est inquiétant, c’est que dans une démocratie où l’on prêche la bonne gouvernance, la liberté d’expression, on n’arrive même pas à passer une loi pour le « freedom of information ». Si on veut bouger vers une société plus juste, il faut que les gens aient accès à l’information. Quand on passe des lois au Parlement, nous, les députés, on en débat mais la société civile doit prendre connaissance du contenu de ces lois. C’est là le rôle des médias et des académiciens de les expliquer.

Un chargé de cours a le droit de donner son opinion sur des sujets, même ayant trait à la politique, n’est-ce pas ?
Bien sûr, quand vous êtes à la faculté de droit, la politique est un amalgame de lois et de tout ce qui se dit dans la société civile concernant l’interprétation d’un projet de loi qui passera au Parlement. Donc, si vous avez des experts en la matière qui donnent leur opinion… On a la perspective du gouvernement, de l’opposition mais aussi celle de la société civile. Il faut des points de vue différents pour décortiquer les projets. Je souhaite qu’il y ait plus de M. Narsinghen à Maurice et j’encourage les universitaires à venir donner des perspectives nouvelles aux citoyens. Prenons l’exemple des amendements qui seront apportés à la Anti-Money Laundering Act. Ce sont des lois complexes avec des clauses légalistiques assez particulières qu’il faut pouvoir passer aux gens. Le commun des mortels doit pouvoir comprendre ce qui se passe. On n’a pas vraiment une culture de débats à Maurice. On n’a pas de chaîne de télé privée. On n’a que des débats sur les radios et dans la presse. Il ne faut pas que Maurice devienne une société intolérante où on n’accepte pas la critique. Les gens qui nous gouvernent doivent réfléchir doublement car ce n’est pas un bon signal. Outre l’UE, on a vu la révocation de l’ex-Premier ministre adjoint suite à des rapports accablants. Notre réputation prend un sale coup. La bonne gouvernance doit être un mot-clé et cela passe à travers une Freedom of Information Act. Il ne faut pas museler la presse ou les radios privées. Il faut que des gens comme M. Narsinghen émergent. Il faut des personnes calées dans leur domaine pour nous éclairer.

Peut-on dire que l’Academic Freedom existe à Maurice ?
Je le pensais, jusqu’à l’affaire Narsinghen. Je pense qu’on est dans une situation où l’« academic freedom » doit prévaloir.

Les universités devraient-elles, selon vous, encourager ces prises de position et ces débats sur les sujets d’actualité ?
Bien sûr ! Je n’encourage pas que l’UoM mais aussi les universités privées. On veut faire de Maurice un « education hub ». Dans une seule université, vous pouvez avoir des écoles de pensée différentes. En France et en Angleterre, les débats au sein des universités sont primordiaux. L’« academic freedom » de Maurice est basée sur celle de l’Angleterre et de la France et cela s’est propagé dans le monde. Il faut impérativement qu’on ait cette Freedom of Information Act. Avec cela, la perception que les gens sont corrompus, qu’il y a des protégés politiques, peut accentuer ou diminuer mais cela sera fait de manière factuelle car on aura des informations à travers des échanges.

Le mot de la fin…
J’espère que le bon sens prévaudra dans ce dossier et que la liberté d’expression à Maurice ne prendra pas une fois de plus un sale coup. Que les débats puissent continuer sur des thématiques diverses pour que la société civile puisse prendre connaissance des dossiers, des enjeux, pour que le pays soit encore plus fort dans les années à venir. On a besoin d’une île Maurice forte au niveau de la bonne gouvernance, au niveau de la compétence des gens et une Île Maurice unie dans le sens où il ne faut pas que cette perception de laisser-aller, de corruption et de népotisme, gangrène la société. Donc, la liberté d’expression est la base même d’une perception nouvelle pour une île Maurice nouvelle.

(Part-Time Lecturer) : « Un juste milieu entre les intérêts des étudiants et la liberté des académiciens »

Votre point de vue au regard du responsable de la faculté de droit à l’UoM convoqué devant le comité disciplinaire de cette université pour avoir exprimé ses opinions sur des questions d’actualité ?
Il y a un principe dans la plupart des universités à travers le monde. Ce qu’on appelle l’« academic freedom », c’est la liberté de faire des recherches, de partager ses connaissances, surtout en vue de la recherche de la vérité. C’est donc un aspect fondamental. Mais au niveau de l’administration, il y a eu des tentatives de mettre des restrictions basées sur des considérations politiques. Par exemple, si on émet une opinion qui dérange, le gouvernement en place se sent visé et essaie d’apporter des restrictions. De 1968, lorsque l’UoM fut créée jusqu’en 1976, en théorie, il y avait l’« academic freedom ». On ne sentait pas de restrictions. Les académiciens étaient libres de s’exprimer. Mais, en 1976, il y a eu un groupe d’amis, notamment le Pr Kasenally, Vidula Nababsing, Raj Virahsawmy, qui étaient impliqués activement dans la politique. Le gouvernement d’alors a voulu apporter des restrictions. Les opinions de ces « lecturers » gênaient peut-être le gouvernement en place. En 1976, donc, il y a eu cette tentative d’apporter des restrictions. Les académiciens ont bien évidemment réagi. Le gouvernement a nommé une personne indépendante pour se pencher sur ce problème et pour faire des recommandations. Le visiteur n’a pas dit qu’il fallait restreindre mais qu’administrativement, on ferait de sorte que les « lecturers » puissent exercer leur liberté de participer à la politique, mais qu’ils soient en même temps redevables envers les étudiants ; qu’il n’y ait pas de « disruption ». En 1977, les recommandations faites par le visiteur étaient telles que les personnes intéressées à faire de la politique devaient prendre des « paid leaves » et si elles sont élues, elles doivent prendre un congé le temps que dure leur mandat. Mais avec le PRB de 1987, un terme est mis au droit de faire de la politique active. Je me suis joint à l’UoM en 1975. En 1987 donc, je participais à la politique. D’après le PRB, il fallait décider de signer l’Option Form. La majorité des académiciens ont signé pour dire qu’ils ne feront pas de la politique. Moi, je voulais garder mes droits. J’ai opté pour les anciennes conditions avec l’ancien salaire. On était trois au MMM, avec le Pr Kasenally et le Pr Ruhee. Mais, eux ont opté pour le nouveau salaire parce qu’ils pensaient qu’étant à la fin de leur carrière, une fois élus, ils partiraient. En 1991, avec les nouvelles élections, j’étais donc candidat sous les anciennes conditions. Kasenally et Ruhee étaient devenus ministres. Moi, j’étais PPS pour une année. En 1995, l’UoM a décidé que ceux qui avaient activement participé à la politique depuis longtemps pouvaient garder cela comme un droit acquis. De ce fait, Kasenally, Ruhee et moi, on était dans cette catégorie alors que les autres ne pouvaient faire de la politique active.

Vous épousez ce mode de fonctionnement de ne pouvoir faire de la politique active et enseigner ?
Nous devons l’aborder dans le contexte mauricien. Je suis toujours en faveur de ce principe selon lequel on ne peut faire de la politique active. Toutes les personnes avant 1976 et même après n’ont pas pratiqué de la politique sur le campus. Il y a eu une ligne de démarcation. Je suis pour ce principe oui, mais dans la pratique cela pose problème parce qu’entre-temps, nous avons eu une politisation à outrance. À l’UoM, actuellement, il y a beaucoup de nominés politiques qui sont au niveau du « policy making ». Nous sommes dans une situation où l’interférence est partout. Comment gérer cette situation ? Si vous êtes membre d’un parti qui est au gouvernement et un autre universitaire dans un parti de l’opposition, ce conflit sera répercuté sur le campus. Auparavant, cette situation n’existait pas. Le défi aujourd’hui est de gérer cette situation de conflit.

Mais un chargé de cours n’a-t-il pas le droit de s’exprimer sur des sujets qui concernent son domaine de spécialisation ?
Certes, vous avez Jocelyn Chan Low qui est doyen de la faculté des sciences sociales, Roukaya Kasenally, etc. qui se prononcent sur des sujets sensibles. Mais, ils ne sont pas membres d’un parti politique. Ils s’expriment en tant qu’académiciens. Ça, il faut encourager. Il y a très peu d’académiciens qui participent à des débats publics comme dans les années 70-80. Il ne faut pas aller dans l’autre extrême, en interdisant de manière générale toute démarche d’expression. Mais s’agissant de M. Narsinghen, il avait participé à un meeting, ce qui est touche à la politique active. Ce sont des éléments qu’il faut éclaircir. Pour nous, faire de la politique active, c’est être candidat, être élu au Parlement. Il faut voir comment créer un « framework » pour qu’on n’aille pas dans l’autre extrême, c’est-à-dire, étouffer l’« academic freedom».

Vous êtes vous-même chargé de cours à temps partiel à l’UoM…
J’agis comme un professionnel à l’UoM. Je ne discute jamais de politique avec les étudiants. Si je dois faire de la politique, je le fais ailleurs. Mais peut-on garder ce principe avec les nouveaux académiciens et les nouvelles conditions qui prévalent ? Là est mon souci. Il faut aussi voir l’intérêt des étudiants. Un membre influent du gouvernement peut mal utiliser sa position. Idem pour quelqu’un dans l’opposition. Comment assurer que les intérêts des étudiants ne sont pas atteints et comment ne pas réprimer la liberté des académiciens ? Il faut trouver un juste milieu.

Peut-on dire que l’Academic Freedom existe encore à Maurice ?
Elle existe mais malheureusement avec l’ingérence politique qui est un phénomène qui envahit presque toutes les institutions. Quand le nom de celui qui parle paraît dans les médias, il y a des tracasseries… Il faut, au contraire, encourager les académiciens à s’exprimer. Sinon, ils perdront leur esprit critique. Il ne faut pas que l’université perde son âme. Un gouvernement doit adhérer à ce principe car dans les années 70, l’academic freedom a enrichi les débats politiques.

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