Victimes de dépossession : Le combat des terres repart

Manifestation devant les bureaux de l’Attorney General à Port-Louis mardi

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L’Association Justice, Restitution et Réparation, organisation représentant les familles victimes alléguées de dépossession de terres, a pris la décision hier matin de manifester avec ses membres, mardi, devant les bureaux de l’Attorney General, sis Renganaden Seeneevassen Building à Port Louis. 

Selon Clency Harmon, président de l’association, le but de la manifestation est d’abord d’obtenir au plus vite du gouvernement une copie du projet de loi qu’il envisage de transmettre au judiciaire pour consultation avant d’instituer une division des terres au sein de la Cour suprême pour trancher les litiges de dépossession. Ensuite, toujours selon Clency Harmon, « les familles victimes ont trop été menées en bateau jusqu’ici et elles insistent maintenant pour que le gouvernement prenne l’engagement que le projet de loi — le Courts (Amendment) Bill — sera déposé sur la table de l’Assemblée nationale et approuvée dans une forme satisfaisante avant les élections générales. » « Si nous n’obtenons pas ces garanties, après la manifestation de mardi, nous déclencherons une autre grève de la faim dès vendredi prochain », a annoncé Clency Harmon.

Préférence pour  une Land Court

Pour rappel, le combat engagé par les familles qui allèguent avoir perdu les terres laissées en héritage par leurs ancêtres à travers l’accaparement frauduleux ou des prescriptions douteuses dure depuis plus d’un quart de siècle. Les recommandations de la défunte Commission Justice et Vérité sont venues confirmer, en 2011, qu’il y a réelle matière à des redressements dans au moins une centaine de cas. Un comité de recherches mis sur pied par le gouvernement a ramené le nombre de ces cas à 42. Dans leurs programmes électoraux aux dernières élections, les deux principaux blocs politiques qui se sont affrontés (l’alliance PTr-MMM et l’alliance Lepep) ont tous deux promis qu’ils allaient créer un tribunal terrier (Land Court). Toutefois, il a fallu que le respect de cette promesse soit arraché au forceps.

Las de se battre, Clency Harmon, dont la famille revendique de grandes étendues de terres dans la région de Curepipe, a dû pour cela observer quinze jours de jeûne au péril de sa vie. Sa démarche avait suscité un tel émoi, un tel élan de sympathie dans le pays que le gouvernement actuel a dû se résigner à commencer à prendre la chose au sérieux.

Ensuite, le dossier de la Land Court a buté sur des réserves exprimées publiquement par le chef juge, Eddy Balancy. Sans être opposé à l’institution d’une telle cour, ce dernier a réclamé que l’Assemblée nationale vote d’abord une législation en bonne et due forme car, selon sa lecture, il existait déjà trop de divisions au sein de la Cour suprême, alors que ces divisions ne découlent que d’une organisation de l’administration judiciaire.

Le Conseil de ministres, à sa séance de travail de vendredi dernier, a abondé dans le sens du chef juge et dans son communiqué officiel, il fait état que le projet de loi de la Land Division donnera aussi « l’opportunité de formaliser la division familiale et la division commerciale de la Cour suprême ». Le communiqué précise que « l’objet principal de l’amendement à la Courts Act est de mettre sur pied une Division des Terres au sein de la Cour suprême dont la juridiction originale sera d’entendre toute action ayant trait aux terres à l’exception des affaires foncières confiées aux cours de district et des affaires relevant de la juridiction de l’Environnement and Land Use Appeal Tribunal. »

Rendre une justice  équitable

Selon Clency Harmon, « l’Association Justice, Restitution et Réparation exprime encore des craintes que la Land Division envisagée ne soit pas efficiente et que, dans sa forme, elle ne puisse pas véritablement remplir sa mission qui devra rendre une justice équitable à ces familles qui ont lutté des années durant ». Le Conseil des ministres a beau affirmer que la division des terres va faciliter « the just, expeditious and accessible resolution of land disputes », les craintes subsistent d’autant que l’Attorney General, Maneesh Gobin, chargé du dossier, n’a pas à ce jour daigné répondre à une note légale que lui a adressée l’avoué Manoj Appadoo, depuis le 10 septembre dernier, au nom de l’association et d’un groupe d’encadreurs volontaires dont parmi se retrouvent l’avocat Erickson Mooneeapillay, Alain Laridon et Joceline Minerve

En fait, dans la note légale, l’Association Justice, Restitution et Réparation dit sa préférence pour l’institution d’une Cour des Terres (Land Court), nantie de vastes pouvoirs, plutôt que pour une Land Division en raison de la complexité et de la technicité des réclamations foncières. Selon l’association, une Land Court « devrait être une instance de médiation et là où la loi est muette, elle doit faire prévaloir l’équité pour trouver des solutions qui ne rendraient pas vaines toutes les luttes menées jusqu’à ce jour contre la dépossession. » 

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