ACCIDENT DE SORÈZE: Aucun acte malveillant mais plusieurs manquements relevés

La magistrate Ida Dookhy-Rambarun, qui a présidé l’enquête judiciaire pour faire la lumière sur l’accident fatal survenu à Sorèze le 3 mai 2013 et faisant dix victimes, a donné ses conclusions hier après-midi. Il n’y a pas eu de « foul play » et l’accident aurait pu être évité, dit-elle. Cependant, à la lumière des divers témoignages, la magistrate a noté certains manquements au niveau de l’autobus Blue Line impliqué dans l’accident.
L’enquête judiciaire instituée par le Directeur des Poursuites publiques a permis d’apporter plus de lumière sur les événements qui ont causé le tragique accident de Sorèze. Hier, la magistrate Ida Dookhy-Rambarun a rendu ses conclusions en cour correctionnelle de Port-Louis. Il n’y a pas eu de « foul play », ce qui veut dire que personne n’aurait saboté les freins de l’autobus avant qu’il ne fasse son trajet, dit-elle. « The cause of the accident has been found to be due to the failure of the service brakes of the bus together with the fact that the bus driver failed to activate the hand parking brake, an emergency brake, which would have stopped the bus instantly », a-t-elle soutenu. Elle a conclu, en se basant sur les témoignages d’experts ayant examiné le véhicule, que les freins ont lâché à la suite d’une brèche de 10 millimètres dans un tuyau reliant le système de freinage à la porte principale de l’autobus, provoquant une chute importante de la pression d’air. La magistrate devait révéler toutefois que le chauffeur Deepchand Gunness aurait pu appliquer ses freins de secours pour arrêter l’autobus, ce qui n’avait pas été fait.
Par ailleurs, la magistrate devait faire part de ses observations par rapport à certaines lacunes relevées au niveau de l’autobus Blue Line accidenté. Ainsi, la chambre de frein arrière était équipée de deux disques de freins de taille différente, un de type 20 et l’autre de type 24. Selon elle, une telle différence aurait pu causer un déséquilibre sur la force du freinage agissant sur les roues. Autre manquement, le fait que la carrosserie de l’autobus soit en plastique renforcé de fibres et non en acier galvanisé. Cette structure est ainsi plus fragile, extrêmement inflammable et a une plus faible résistance à l’impact. Une structure plus fiable aurait peut-être pu minimiser les dommages. Autre point noir, l’autobus n’était pas équipé d’un système de frein activé automatiquement en cas de défaillance des freins de service. De plus, le dispositif d’avertissement de limitation de pression d’air dans le circuit de freinage à air était hors d’usage et déconnecté. Ce dispositif se doit d’être audible et visible afin d’indiquer au chauffeur que le système de freinage à air ne fonctionne pas. La Cour a aussi observé que lorsqu’un problème est rapporté par un chauffeur d’autobus au dépôt, il se peut que les mécaniciens, prenant connaissance de la plainte, effectuent la maintenance sans la supervision du responsable de l’atelier.
Formation des employés
Autre point qui a été soulevé, la formation des mécaniciens et chauffeurs concernant les autobus Blue Line de la CNT. Se référant au rapport de l’équipe d’experts d’Ashok Leyland, la magistrate a recommandé que les chauffeurs soient formés de manière à éviter une situation du même acabit. Le personnel d’entretien de la CNT devra quant à lui être formé régulièrement sur la maintenance préventive afin d’assurer la fiabilité des autobus. Il a aussi été recommandé que les formateurs de tous les opérateurs soient formés par des experts d’Ashok Leyland.
La cour devait aussi prendre en considération la possibilité que les travaux de maintenance sur l’autobus le 29 avril 2013 n’aient pas été effectués correctement. Un chef ingénieur qui avait examiné l’autobus accidenté avait mentionné que le système de protection de valves à quatre circuits était défectueux et aurait causé la défaillance du système de freins. Des preuves apportées en Cour ont démontré que le chauffeur avait rapporté un problème de fuite d’air dans le système de freins malgré le servicing de l’autobus. La magistrate recommande ainsi qu’une enquête approfondie soit menée afin de déceler les raisons du mauvais fonctionnement du système de protection de valves à quatre circuits.
Rappel des événements
En ce jour fatidique du vendredi 3 mai 2013, à la hauteur du virage de Sorèze, le chauffeur Deepchand Gunness a lancé un dramatique : « Dir bann passaze kosté derrière. Frein inn persé ! Péna frein ! » Conscient des ravages que peut causer un autobus sans frein sur l’autoroute à cette heure de pointe, il avait pris la décision de bifurquer sur la déviation de la Port-Louis Ring Road. Mais les effets conjugués du virage trop sec et de la vitesse ont eu raison de son expérience et le véhicule s’est déporté sur le terre-plein pour heurter violemment un drain d’évacuation d’eau. Deepchand Gunness a perdu le contrôle de son autobus, qui s’est renversé sur le flanc gauche avant de faire une série d’embardées, se transformant en un amas de ferraille.
Deepchand Gunness, 50 ans, qui a été coincé dans sa cabine, n’a pas survécu à ses graves blessures. Les neuf autres victimes sont le couple Sanjay et Priya Ujoodha, la ressortissante chinoise Hu Jiang Chan, Shakuntala Ramdaursingh, Ruth Marie Moutou, Amreen Bibi Lallmamode, Delphine Pokhun, Devesh Cheeneebash et Kamla Devi Soobroydoo.

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour

- Publicité -