Allégations de blanchiment de fonds : L’ICAC resserre l’étau autour de Me Stephen

  • Le mystère de l’appel téléphonique du 24 avril 2017 pour les Legal Fees de Rs 1,5 M de Peroumal Veeren à Nawaz d’Astor Law Chambers en voie d’élucidation
  • Le dénommé Laval Pitchee, alias Duke, cerveau de la cellule de communications du réseau Veeren/Kistnah, accusé d’avoir acheté 2 000 Sim Cards avec des passeports des travailleurs du Bangladesh entre 2015 et 2018
  • L’ICAC en possession de l’équivalent du Karné Labutik du trafiquant Veeren avec des Handwritten Notes pour des transferts de Rs 3 M, de 22 téléphones cellulaires et de 50 SIM Cards, saisis lors de l’arrestation de Laval Pitchee vendredi

Un Breakthrough de l’Independent Commission Against Corruption (ICAC) dans la lutte contre le trafic de drogue et le blanchiment de fonds. Jusqu’ici, que ce soit au niveau de la commission d’enquête sur la drogue, présidée par l’ancien juge Paul Lam Shang Leen ou des enquêtes de l’ICAC, le Stumbling Block se présentait sous la forme de SIM Cards pour des téléphones portables, enregistrés au nom d’innocents et de naïfs travailleurs du Bangladesh. A partir de ce paravent de SIM Cards, les enquêtes, menées par ces deux instances dans d’importants cas de démantèlement de drogue et de Money Laundering stagnaient. D’ailleurs, le cas d’école à ce jour reste le scandale des Legal Fees de Rs 1,5 million pour des “Cases” à venir de Peroumal Veeren à Me Rex Stephen d’Astor Law Chambers, somme remise au Legal Clerk Nawaz vers la fin d’avril 2017. Bientôt un an que ce Senior Member at the Bar a été entendu Under Warning par l’ICAC pour les délits présumés de blanchiment de fonds et d’infraction aux dispositions de la Financial Intelligence and Anti-Money Laundering Act, notamment les Limitations of Cash comme dans le cas de la Navin’s Coffers Saga de Rs 220 millions, l’Office of the Director of Public Prosecutions attend des compléments d’information sur le Missing Link pour se prononcer au sujet de ces inculpations. En effet, la semaine dernière, les enquêteurs sont parvenus à percer une partie du mystère de ce réseau de protection avec des SIM Cards achetées au nom de travailleurs étrangers relançant des dossiers à l’ICAC ou à la commission Lam Shang Leen et jetant même un nouvel éclairage sur le rôle présumé de Members at the Bar pour protéger des trafiquants de drogue et leurs complices.
A la lumière de l’examen de relevés de quelque 5 000 appels téléphoniques, suite à de multiples Disclosure Orders de la Cour suprême, des limiers de l’ICAC sous la supervision du directeur général, Navin Beekarry, ont identifié un élément crucial dans le fonctionnement de ce réseau d’utilisation de SIM Cards pour des échanges téléphoniques entre protagonistes “Heavily Involved” dans le trafic de drogue. Pour la vente de quelque 200 cartes téléphoniques émises par les deux plus importants opérateurs à Maurice, un seul détaillant dans la région de Pointe-aux-Sables était impliqué.
Avec l’identité de ce Common Supplier de SIM Cards, vérifiée par voie de Judge’s Order, la tâche des hommes de Navin Beekarry devait être amplement facilitée. L’examen des formulaires de demande de ces cartes téléphoniques logés chez ce détaillant devait révéler un autre secret. Dans chacun des cas, la même signature, soit celle de Michael Laval Pitchee, alias Duke, âgé de 41 ans, était apposée au bas avec dans un dossier des copies de passeports d’ouvriers du Bangladesh. Les travailleurs étrangers, interrogés par l’ICAC, devaient nier toute connaissance de ces SIM Cards en affirmant avoir disposé de leurs téléphones respectifs.
A ce stade de l’enquête, le mystère restait entier, d’autant plus que l’ICAC était confrontée à un autre problème: comment le suspect est-il entré en possession de ces passeports ? En principe, tout travailleur étranger remet son passeport à son employeur dès qu’il signe son contrat de travail à Maurice. Pour l’instant, l’ICAC a préféré laissé ouvert ce volet de l’enquête pour aller à l’essentiel, à savoir remonter les traces de Laval Pitchee et plus particulièrement faire la lumière sur un appel téléphonique au Legal Clerk de Me Rex Stephen en date du 24 avril 2017 pour confirmer un rendez-vous en vue de lui remettre une enveloppe contenant Rs 1,5 million, dont Rs 785 000 ont été saisies dans une armoire dans le bureau de Me Stephen lors d’une perquisition avec mandat le 5 mai 2017. La clé de l’armoire se trouvait dans la poche de la veste de ce Senior Member at the Bar. Les entrées dans l’Occurrence Book de l’ICAC en font foi.
Toujours habillé de blouson en cuir…
Cet appel téléphonique au dénommé Nawaz avait été effectué à partir d’un téléphone fonctionnant avec une SIM Card enregistrée au nom d’un travailleur étranger. Jusqu’ici, le témoignage de ce même Nawaz n’a pas permis à l’ICAC de constituer le portrait-robot de cet Errand Boy avec une enveloppe de Rs 1,5 million pour le compte du trafiquant Peroumal Veeren condamné à une trentaine d’années de prison. D’ailleurs, le premier Disclosure Order débouchant sur l’examen subséquent d’un relevé de 5 000 appels téléphoniques avait pour point de départ cet appel téléphonique du 24 avril 2017 à partir du numéro XXX.
La fin de la semaine écoulée allait constituer un tournant dans cette enquête de longue haleine de l’ICAC. Une importante opération, nécessitant la participation d’éléments de la Special Services Unit (SSSU), fut montée tard vendredi par l’ICAC en vue de procéder à l’arrestation de Michael Laval Pitchee, propriétaire de deux maisons dans la région de Latour-Koenig, Pointe-aux-Sables, toujours habillé de blouson en cuir et qui circule sur de grosses bolides.
Lors de cette perquisition, l’ICAC a procédé à la saisie de 22 téléphones cellulaires, de 40 SIM Cards, d’équipements informatiques, de documents au nom d’un autre trafiquant de drogue notoire, un Karné Labutik avec des informations similaires à celles relevées dans un précédent document attribué à Peroumal Veeren, dont des Handwritten Notes portant sur des transferts de fonds variant de Rs 2 millions à Rs 3 millions, de même que deux grosses cylindrées pour les besoins des “missions commandées”. Laval Pitchee, qui a retenu les services de Me Segaren Veeramundar, a comparu devant la Bail and Remand Court, hier matin, pour le délit de Money Laundering.
Depuis le début de son interrogatoire, le suspect Pichee ne s’est pas montré bavard en réponses aux questions de l’ICAC. Mais une autre pièce à conviction saisie par l’ICAC devrait aggraver ses difficultés avec la justice. Il devra donner des explications au sujet d’une photo sur laquelle il est vu en possession d’une arme à feu, d’autant que celui qui était fiché à l’ICAC dans une autre précédente enquête de transfert illégal de fonds pour un compte d’un trafiquant de drogue en prison, n’est pas connu pour être détenteur d’un port d’arme de la police.
Dans la conjoncture, l’ICAC fonde de gros espoirs sur l’arrestation de Laval Pitchee et le démantèlement du réseau de SIM Cards au nom de Bangladeshis pour verser dans le dossier à charge contre Me Rex Stephen des “pieces of evidence beyond reasonable doubt” pour soutenir les Mens Rea réclamées par le DPP dans cette affaire. Ainsi, le suspect sera confronté incessamment aux détails au sujet de la SIM Card utilisée le 24 avril de l’année dernière, surtout l’identité du véritable utilisateur de ce document en vue d’établir par le biais de Circumstancial Evidence le lien entre Peroumal Veeren et Me Stephen à ce sujet précis.
Une Sim Card : un maximum de cinq appels
Sur la base d’indications disponibles, le dénommé Laval Pitchee se présente comme la plaque tournante de la centrale de communications téléphoniques du réseau Veeren avec pour annexes des trafiquants du calibre de Riacca, Kistnah, avec ses 135 kilos d’héroïne d’un peu plus de Rs 2 milliards du mois de mars de l’année dernière ou encore les Manish Seewoochurn et Bibi. Une des astuces adoptées par la mafia est que toute SIM Card n’est utilisée que pour faire un maximum de cinq appels dans le cadre des contacts avec les différents protagonistes avant d’être détruite. C’est ce que révèle un premier examen sommaire des relevés des appels avec les 200 cartes téléphoniques achetées par Pitchee de 2015 à 2018 chez cet unique détaillant de Pointe-aux-Sables.
Mais la donne la plus importante demeure les numéros de téléphone des interlocuteurs contactés de manière sûre à ne pas être répertoriés formellement. Déjà les premières indications tendent à confirmer que le Background Network des trafiquants de drogue pourrait compromettre des membres du barreau, jusqu’ici épargnés par l’opération de Name and Shame devant la commission Lam Shang Leen en attendant le rapport formel, dont la publication a été repoussée pour des raisons hors de contrôle de cette instance.
Avec le développement au sujet des SIM Cards, le juge Lam Shang Leen et ses deux assesseurs, l’ancien ministre Sam Lauthan et le Dr Domun, pourraient être tentés par un exercice de Sharing of Intelligence and Information à ce chapitre avec l’ICAC. Les membres de la commission d’enquête ont dû faire face à un véritable casse-tête avec des relevés téléphoniques échappant, à première vue, à tout contrôle. La clé d’une meilleure compréhension de cette couverture pourrait être en possession de l’ICAC avec ces dernières révélations. Pour rappel, lors d’une des auditions en août de l’année dernière, un comptable, Kailash Harkoo, avait été entendu par la Commission Lam Shang Leen. La raison de sa convocation est qu’il avait quelque 28 000 SIM Cards enregistrées en son nom avec au moins quatre utilisées pour des contacts avec des détenus à la prison, dont le dénommé Peroumal Veeren.
Un autre détail crucial, qui a surgi lors de l’examen Forensic des échanges téléphoniques à partir de ces SIM Cards achetées par Laval Pitchee, porte sur les régions d’où les appels sont émis ou reçus. Les relais du réseau cellulaire identifiés sont principalement ceux dans les régions de Beau-Bassin, notamment aux environs de la Prison centrale, du centre de l’île avec la proximité de l’Eastern High Security Prison de Melrose, de Pointe-aux-Sables, de Vacoas/La-Caverne et de Flic-en-Flac. Le Pattern géographique de ces appels téléphoniques devra être confirmé pour l’ICAC par le biais d’un rapport d’experts en télécommunications.
Même si le dénommé Laval Pitchee continuera à faire prévaloir son droit au silence lors de son interrogatoire en présence de son homme de loi, une autre escouade de l’ICAC poursuit le décryptage des autres documents compromettants trouvés à ses domiciles avec d’autres développements, sous forme d’interpellations pour interrogatoires Under Warning, voire des arrestations si le feu vert du Commissaire de police, Karl Mario Nobin, est obtenu et au cas où il n’adopte pas la même position que celle dans le cas de Me Rex Stephen avec Rs 748 500 en coupures de Rs 1 000 et de Rs 500 des Rs 1,5 million bien placées dans son armoire au bureau, soit préférant attendre la décision du DPP avant d’ordonner l’arrestation de tout High Profile Individual…

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