Angola connection : Coup de massue pour bastos

  • Un Worldwide Freezing Order sur un maximum de Rs 100 milliards de la Haute Cour de Londres, vendredi, en faveur de l’Angola Sovereign Wealth Fund en complément aux 91 Judge’s Orders sur les Rs 17,2 milliards de la FIU à Maurice
  • Le CEO du Quantum Global Group et le fils de l’ancien président de l’Angola sous le coup de cette injonction ne pourront bénéficier que de £ 5 000 (Rs 250 000) par semaine pour assurer leurs besoins personnels
  • Délai de 48 heures aux filiales de Quantum Global, dont JurisTax Ltd à Maurice, pour des Written Lists of the Worldwide Assets Exceeding £ 50 000 (Rs 2,5 M) et des comptes bancaires indépendamment des balances
  • Dans un affidavit, la FIU relève des “unlawful transfers” de l’ordre de $ 180 millions (Rs 5 milliards) à partir des comptes opérés à Maurice
  • La mission de la FSDEA, dirigée par Carlos Lopes, donne des garanties à Maurice au sujet des placements de Rs 17,8 milliards, qui ne seront pas transférés vers d’autres centres financiers

L’Angola Connection, qui mine le Global Business Sector à Maurice, a amorcé un virage déterminant. En fin de semaine, Jean-Claude Bastos de Morais, Chief Executive Officer et fondateur du Quantum Global Group, gestionnaire des fonds et des avoirs de plus Rs 165 milliards (cinq milliards de dollars américains) au nom de l’Angola Sovereign Wealth Fund (FSDEA), a essuyé un gros coup de massue. D’abord, la confirmation de la consommation du divorce avec le nouveau pouvoir en Angola et le successeur de Dos Santos, Joao Lourenco, imposant son empreinte, dont l’annonce de la résiliation du contrat de Quantum Global pour la gestion des fonds de la FSDEA. Mais il y a eu aussi un move qui s’avère être pire pour l’avenir de l’empire financier de Jean-Claude Bastos de Morais, détenteur de passeports suisse et angolais, qui a élu domicile à Dubaï. Suite à deux affidavits jurés par Paul Xavier Morris en date des 24 et 27 avril, l’Honourable Justice Phillips, siégeant à la Haute Cour de Londres, a émis vendredi un Worldwide Freezing Order pour un montant de Rs 100 milliards (trois milliards de dollars américains) contre Jean-Claude Bastos de Morais, Jose Filomena Dos Santos, de même que contre les filiales incorporées dans le Global Business Sector à Maurice, d’autres en Suisse et dans les British Virgin Islands. Les conditions imposées par le juge britannique sont considérées comme étant des plus astreignantes avec les deux têtes de série, Bastos et Dos Santos, ne pouvant bénéficier de retraits de Rs 250 000 par semaine chacun pour assurer leurs besoins personnels.

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Ce développement, qui intervient deux semaines après les trois Judge’s Orders gelant 91 comptes, dont la majorité à l’AfrAsia Bank Ltd, pour un montant de Rs 17,8 milliards, constitue un soulagement pour les autorités mauriciennes. En teanant en considération les objections formelles avancées par la Financial Intelligence Unit devant la juge Gaytree Manna-Jugessur, siégeant en référé, mercredi, pour contester tout dégel des comptes opérés par Jean-Claude Bastos de Morais, ce dernier avait brandi la menace d’un arbitrage international sous les dispositions du traité pour la protection des investissements entre Maurice et la Suisse. Dans ce cas, le CEO de Quantum Global était en mesure de se prévaloir d’un recours à ces filets de protection. Depuis vendredi soir après avoir pris connaissance du ruling du Honourable Justice Phillips de 20 pages, les autorités repoussent d’un revers de la main les velléités d’ultimatum ou d’arbitrage sous le traité bilatéral sur les investissements du dénommé Bastos. Dorénavant, tous les comptes bancaires et aussi les avoirs du Global Quantum Group, y compris ceux de Maurice, sont sous le contrôle de la High Court of Justice Business and Property Courts of England and Wales.

D’autre part, la mission dirigée par le nouveau patron de l’Angola Sovereign Wealth Fund, Carlos Lopes, ancien ministre des Finances de l’Angola, qui avait à ses côtés des conseils légaux de Norton Rose, est venue enlever une épée de Damoclès sur le Global Business Sector et les banques. Des placements de Rs 17,8 milliards auraient pu être transférés hors de la juridiction de Maurice à n’importe quel moment. Avec la série de consultations engagées au cours de la semaine écoulée, des garanties ont été obtenues par Maurice qu’aucun transfert de fonds ne sera effectué et qu’un nouveau gestionnaire de fonds devrait être nommé en remplacement de Quantum Global. La mission Lopes a discuté avec la Financial Services Commission des procédures pour l’obtention de nouvelles licences en remplacement de celles des Closed-End Funds sous JurisTax Ltd, faisant l’objet de suspension.

Une série de conditions

Le Freezing Order, émis par la Haute Cour de Londres sur la base des deux affidavits des 24 et 27 courant, élabore une série de conditions contraignantes à être respectées non seulement par Jean-Caude Bastos de Morais, mais aussi par plusieurs entités, domicilées à Maurice, dont le Quantum Global Investments Africa Management AG aux Médine Mews, les General Partners et Limited Partnerships (Agriculture GP, Healthcare GP, Mezzanine GP, Mining GP, Infrastructure LP, Hotel LP) avec pour adresse Médine Mews, mais aussi JurisTax Ltd, Tower II, Ebène et Ebène House, Cybercity. Le premier effet déclaré de la Freezing Injunction est d’interdire la disposition des avoirs et des fonds à hauteur de Rs 100 milliards, soit trois milliards de dollars américains.

“Upon the Return Date (fixée au 11 mai pour la prochaine séance devant la Haute Cour de Londres), or further order of the Court, none of the respondent must remove fron England and Wales any of its assets or his assets which are in England and Wales up to the value of $ 3 billion; or in any way dispose of, deal with or diminish the value of any of its or his assets whether they are in or oustide England and Wales up to the same value”, lit-on au paragraphe 6 de l’ordre du juge britannique.

Ces entités citées nommément, opérant soit dans le Global Business Sector à Maurice ou dans d’autres centres financiers à l’étranger, se voient imposer une autre série de conditions dès réception des documents de la Haute Cour de Londres. Ainsi, dans un délai de 48 heures de la réception de l’injonction, elles sont tenues à soumettre aux conseils légaux de Fundo Soberano de Angola (Angola Soverign Wealth Fund) une liste écrite des worldwide assets, dont la valeur dépasse les £ 50 000, de même que tous les comptes bancaires opérés dans le monde entier indépendamment des balances aussi bien qu’une copie de “all bank accounts and management or other internal accounts relating to any assets of the Limited Partnership”.

Après cette étape initiale, ces sociétés sont tenues dans un délai de cinq jours ouvrables à jurer des affidavits avec des détails susmentionnés et en annexe tous les documents. Plus importante encore est l’obligation de “provide a full written explanation of what became of any monies or assets”, dont des détails précis au sujet des comptes bancaires et l’identité des bénéficiaires de ces transferts. D’autre part, des explications devront être fournies au sujet de “all fees, costs and expenses taken by or on behalf of that respondent from any of the funds held pursuant to the Invesment Management Agreement of the 23rd November 2013, from any of the funds of the Limited Partnerships, from any FSDEA NT Account, from or FSDEA Euroclear Account from any Limited Partenship Account”.

Cette nouvelle initiative de l’Angola Sovereign Wealth Fund en saisissant la Haute Cour de Londres déplace le débat sur des Freezing Orders devant la Cour suprême à Maurice. “Avec ce développement, tout est entre les mains de la Haute Cour de Londres et les motions logées par Quantum Global Group devant la juge siégeant à Maurice doivent tenir en ligne de compte la teneur de l’Extended Injunction Order de Justice Phillips. Les différentes institutions locales engagées dans cette affaire n’auront plus de soucis à se faire pour se défendre ou justifier la décision initiale du 7 avril”, confient des sources autorisées.

Les transferts de fonds

Pour soutenir les premières requêtes des trois Judge’s Orders sur les Rs 17,8 milliards de dépôts à l’AfrAsia Bank Ltd, la State Bank of Mauritius, la Mauritius Commercial Bank et la Standard Bank Ltd, la Financial Intelligence Unit a soumis des détails sur les liens entre Jean-Claude Bastos de Morais et les sept Closed-End Funds sous le contrôle du Quantum Global Group. Ainsi dans un affidavit juré le 9 octobre pour la deuxième série de 33 comptes bancaires, dont 22 chez AfrAsia Bank Ltd, la Financial Intelligence Unit affirme que “intelligence enquiries have revealed inter-alia that Jean-Claude Bastos de Morais was convicted by the Tribunal Pénal de Zour in Switzerland for repeated qualified mismanagement of companies”.

Avant d’établir une liste de transferts bancaires, la FIU allègue que “investments from FSDEA have been made for the personal benefit of Jean-Claude Bastos via investments in a port project known as Caio Porto in Angola”avec le CEO de Quantum Global détenant 99,9% des actions de Caioporto SA. Le même scénario est répliqué pour d’autres projets dans d’autres pays en Afrique. “Jean-Claude Bastos is the ultimate owner of Carinthia Corp, holder of three accounts in Mauritius at AfrAsia Bank Ltd”, note la FIU.

Les transferts de fonds relevés dans le deuxième affidavit sont les suivants :

l 7 novembre 2014, cinq millions de dollars US de Standard Bank (Mauritius) Ltd à un compte opéré à la Banco Kwanza Invest par Caiporto SA en Angola ;

l 4 mars 2015, 15 millions de dollars de la Standard Bank (Mauritius) Ltd à un compte à l’AfrAsia Bank Ltd au nom de Capoinvest Ltd, société enregistrée dans les British Virgin Islands; 20 décembre 2016, 100 millions de dollars (Rs 3,5 milliards) de la Mauritius Commercial Bank du compte au nom de QG African Structure Fund LP à l’AfrAsia Bank Ltd au bénéfice de Capoinvest Ltd et 12 juillet 2017, deux transferts de 46,7 millions de dollars US et 13,3 millions de dollars US sont effectués à partir du compte de QG Infrastructure LP à la Deltec Bank des Bahamas pour financer l’achat d’actions dans Caiorina Ltd et Capoinvest Ltd.

Commentant ces mouvements de fonds, la FIU souligne que “the funds in the amount of USD 180 millions (Rs 6 milliards) are intended to be used as investment in the Caio Porto Project which is being managed by Cazioporto SA where Jean-Claude Bastons is purported to hold 99,9% of shares”. Pour justifier la demande de Freezing Orders devant les instances judiciaires à Maurice, la FIU ajoute que “there is a serious risk of dissipation, or unlawful transfer of moneys of FSDEA belonging to the people of Angola ; there is a high likelihood that the said Jean-Claude Bastos, who is presently outside the jurisdiction of Mauritius will transfer and remove funds from the juriusdiction of Mauritus and the acts and doings of Jean-Claude Bastos, including the unlawful transfers and investments tantamount to offences of corruption, embezzlement and money laundering”.

En conclusion, la FIU fait comprendre que “it has been informed by the highest authority in Angola that pursuant to FSDEA investment arrangements, seven equity funds were set up in the republic of Mauritius which the FSDEA is the sole investor and the government of Angola has expressed its concerns to the government of Mauritius about the manner in which the funds were established”.

Du côté des autorités mauriciennes, le Freezing Order de la Haute Cour de Londres constitue la “preuve irréfutable a posteriori selon laquelle agissant sous la section 4 (2) de l’Asset Recovery Act depuis le samedi 7 avril avec une injonction du juge David Chan, siégeant en référé, que la démarche s’imposait pour éviter toute dilapidation de la richesse du peuple angolais”. Avec la crainte d’un exode de ces fonds de Maurice éliminés par l’Angola, le Global Business Sector et le secteur bancaire pouvaient respirer vu les effets atténués de l’Angola Connection. Mais il reste tout de même tout le volet de la due diligence avec la Banque de Maurice en tant que régulateur.

Toutefois, l’ordre de la Cour de Londres est revenu remettre en question des négociations à peine entamées quant au redéploiement de ces placements de l’Angola Sovereign Wealth Fund. Jean-Claude Bastos de Morais, qui avait plaidé, par voie de communiqué, vendredi, notamment que “Quantum Global looks forward to resolving this situation with the FSDEA in an amicable manner”, devra impérativement revoir sa stratégie. A Maurice, le CEO de Quantum Global avait retenu les services de conseils légaux et de la firme Grant Thornton de Sattar Hajee Abdoula, pour mener les échanges avec les autorités et la firme légale Norton Rose, représentant les intérêts de la FSDEA. Probablement, l’une des tâches de ces professionnels restera d’assurer le suivi de l’exercice de redressement fiscal, portant sur des centaines de millions, engagé par la Mauritius Revenue Autority contre le CEO de Quantum Global Group.

Mais depuis vendredi, tout semble geler avec le dossier CL – 2018-000269 de la High Court of Justice de Londres, d’autant plus qu’en Angola, la situation politique tourne au désavantage des amis et des protecteurs de Jean-Claude Bastos de Morais. La mainmise de José Eduardo Dos Santos sur les affaires devrait s’estomper rapidement. Joas Lourenco, l’actuel président, qui a mis de l’ordre au sein de l’Angola Sovereign Wealth Fund en renvoyant le fils de Dos Santos, accusé de transferts illégaux de $ 500 millions, se positionne pour accéder à prendre le contrôle du parti au pouvoir en remplacement de José Eduardo Dos Santos, fermant du même coup la porte à tout retour en force de Jean-Claude Bastos en Angola…

 

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