ASSASSINAT DE MICHAELA HARTE: Treebhoowoon à la barre des témoins pendant trois jours

La sixième semaine du procès sur l’affaire de l’assassinat de Michaela Harte a été marquée par l’appel d’Avinash Treebhoowoon à la barre des témoins. L’accusé N°1 a été interrogé et contre-interrogé pendant trois jours. Le réexamen aurait dû se faire vendredi, mais son avocat, Me Sanjeev Teeluckdharry, a protesté contre certaines questions du juge et demandé du temps pour obtenir les procès-verbaux afin de faire sa motion. Sa requête ayant été acceptée, le juge Fekna a soutenu qu’il donnerait des directives aux membres du jury lors de son summing-up.
Lundi
Me Sanjeev Teeluckdharry, avocat de l’accusé N°1 Avinash Treebhoowoon, ayant introduit une motion pour l’assignation de nouveaux témoins pour la défense de son client, la poursuite a formulé une objection. Dans son ruling, le juge Prithviraj Fekna a noté la pertinence des témoins que le State Counsel Me Nataraj Muneesamy avait contesté, et a accordé à Me Teeluckdharry le soin d’appeler quatre témoins sur les six proposés. Me Jean-Claude Bibi et le Commissaire des Droits humains ne seront donc pas appelés à témoigner. La liste des témoins d’Avinash Treebhoowoon comprend ainsi son père, son épouse, les représentants des hôpitaux SSRN et ENT, Me Yahia Nazroo (secrétaire du Bar Council) pour la confirmation de la réception d’une lettre de Me Ravi Rutnah et Seenarain Mungroo. Me Sanjeev Teeluckdharry a ensuite fait sa plaidoirie d’ouverture devant le jury. L’homme de loi a contesté l’impartialité de l’enquête et mis en doute la sincérité du « star witness » Raj Theekoy. Ce dernier a reçu l’immunité sous condition de témoigner contre ses deux anciens collègues. Il a soutenu que la scientifique britannique Susan Woodroffe n’a trouvé aucune preuve contre son client ainsi que l’accusé N°2, Sandip Moneea. Selon lui, plusieurs autres pièces à conviction auraient dû être envoyées au Cellmark Forensic Services à Oxfordshire, en Angleterre. « The prosecution case can be summarized to “I don’t remember, I can’t say” », a déclaré Me Teeluckdharry.
Mardi
Avinash Treebhoowoon a été appelé à la barre des témoins par son avocat. Il a donné sa version des faits du 10 janvier 2011, jour du meurtre de Michaela Harte, qui se trouvait alors avec son époux en lune de miel au Legends. Selon lui, il s’est rendu vers 14 h dans la chambre 1025 pour la nettoyer et affirme avoir vu James John McAreavey quelques minutes plus tôt. La carte DND (Do Not Disturb) étant accrochée à la poignée de la porte, l’accusé N°1 aurait demandé à l’époux de la jeune femme quand il pouvait nettoyer la pièce. Celui-ci lui aurait dit de revenir cinq minutes plus tard.
Durant l’après-midi, Avinash Treebhoowoon a ensuite donné des détails sur le jour de son arrestation sur son lieu de travail. Selon sa version, trois officiers lui ont posé des questions sur le jour du meurtre. Ils se sont ensuite rendus à la buanderie, où une certaine Mme Michelle leur a montré les uniformes que portaient les membres du staff le 10 janvier. Celui d’un certain Vashish, dit-il, portait des traces de sang. Les menaces de la Major Crimes Investigation Team auraient commencé sur le parking de l’hôtel, quand une policière lui aurait lancé : « Si to pa dir to pou al pass dan enn sok kot to mem to pa pou krwar. » Il aurait alors été emmené à la Criminal Investigation Division de Piton, où on lui aurait donné quatre gifles. Après quelque temps, ils seraient partis au bureau de la MCIT, à Port-Louis, mais se seraient arrêtés à Pamplemousses, où il aurait subi d’autres actes de maltraitance. Arrivés enfin à Port-Louis, il aurait été contraint de se dévêtir avant de recevoir des coups de tuyaux sur les talons. Un officier l’aurait obligé à « faire des sauts » pour empêcher la coagulation du sang.
Mercredi
Avinash Treebhoowoon est resté à la barre des témoins du matin jusqu’en début de soirée. L’accusé N°1 a soutenu avoir été injurié et torturé. Il a également raconté un incident qui se serait passé entre le chef inspecteur Luciano Gérard, le constable Manoovaloo et son ancien avocat, Me Ravi Rutnah. Selon lui, les policiers ont insulté son homme de loi, qui lui rappelait son droit à garder le silence. Le constable Manoovaloo aurait ensuite fait un doigt d’honneur à Me Rutnah tout en l’injuriant. Treebhoowoon aurait alors été contraint de signer une déposition dictée par le PC Manoovaloo et enregistrée par le CI Gérard.
Selon l’ancien valet de chambre du Legends, la MCIT lui aurait dit, durant l’exercice de la reconstitution des faits, de montrer du doigt certains endroits, ce qu’il aurait fait. Le Principal State Counsel Me Mehdi Manrakhan a objecté à la motion d’ajournement de Me Teeluckdharry à 3h15 et, trois heures durant, a contre-interrogé Avinash Treebhoowoon. Le juge Fekna a alors expliqué à l’avocat du SLO que le témoin était debout depuis la matinée, ce à quoi l’homme de loi a répondu : « Give him a chair » sur un ton que le juge n’a pas apprécié. « I’m not your friend ! I’m the judge… I will not take any form of insolence from the bar », a rétorqué le Magistrat.
L’accusé N°1 a été confronté aux « door readings », qui ne coïncidaient pas avec le « Room Report Sheet ». Mais le principal intéressé a soutenu ne pas avoir mentionné une heure erronée sur sa fiche. Le juge est également intervenu pour demander des précisions sur les statements de l’accusé. Treebhoowoon a expliqué que ses dépositions sont incomplètes, mais pas entièrement fausses. Avinash Treebhoowoon a essayé de fournir un alibi un an et demi après son arrestation, en affirmant avoir parlé à un certain Rodney vers 14 h 45 près du hangar à bateaux. Et lorsque Me Manrakhan lui a demandé pourquoi il ne l’avait pas mentionné plus tôt, l’homme a simplement répondu : « Pa ti demann mwa. »
Jeudi
Avant de poursuivre le contre-interrogatoire d’Avinash Treebhoowoon, Me Mehdi Manrakhan a présenté ses excuses au juge et au jury pour le ton utilisé lors de l’objection de la veille. Excuses que le juge a accueillies favorablement. Le Principal State Counsel a posé des questions à Avinash Treebhoowoon à propos de l’incident dont aurait été victime Me Ravi Rutnah entre les mains de la MCIT. Le valet de chambre a maintenu sa version de la veille en disant que les enquêteurs lui ont dit de s’asseoir, ce qu’il a fait. Selon Treebhoowoon, son avocat s’est tu après l’incident. Me Manrakhan a demandé au témoin si Me Rutnah était une personne « calme », ce à quoi il a répondu par l’affirmative. Le juge Fekna est intervenu en lançant : « Li ti trankil kan li ti dir ki li pou revini kouma Arnold Schwarzenegger ? » Une question qui restera sans réponse de la part d’Avinash Treebhoowoon, mais qui aura engendré une réaction immédiate de Me Sanjeev Teeluckdharry, qui s’est référé au ruling du juge, décidant que certains témoins – qui auraient pu évoquer la façon de faire de la MCIT – ne seraient pas entendus. L’avocat n’a pas insisté sur son objection. Durant la session, plusieurs questions sont restées sans réponse, notamment certaines émises par le juge Fekna. Me Manrakhan a été confronté à des rapports médicaux, dont celui du médecin légiste en chef de la police, le Dr Sudesh Kumar Gungadin, selon lequel le corps ne présentait pas de blessure externe.
Vendredi
Me Sanjeev Teeluckdharry a donné, en début de séance, avis d’une motion protestant contre l’intervention et certaines questions du juge-président Prithiviraj Fekna faites la veille. Avinash Treebhoowoon aurait dû être réexaminé par son avocat avant d’appeler les autres témoins, dont le père de l’accusé N°1. L’homme de loi a toutefois réclamé du temps pour obtenir le reste des « Court Records » avant de déposer sa motion. Selon Me Teeluckdharry, le juge a contre-interrogé son client et cela serait contraire à l’équité. La poursuite n’a toutefois pas soutenu la protestation de Me Teeluckdharry, prétextant que son confrère n’a pas réagi lorsque les témoins de la poursuite ont eu à faire face à des remarques du juge. Me Mehdi Manrakhan a expliqué que le juge demandera de toute façon aux membres du jury, lors du summing-up, de ne pas tenir compte des commentaires qu’ils ont pu entendre durant les travaux. Me Rama Valayden, le leading counsel de Sandip Moneea, a soutenu devoir prendre connaissance des contestations de son confrère avant de se prononcer.
À la reprise, le juge s’est adressé aux avocats en leur disant qu’il n’avait, à aucun moment, voulu contre-interroger Avinash Treebhoowoon. « Je suis parfaitement conscient des procédures… Le juge est un arbitre indépendant », a-t-il souligné. Mais le juge a ajouté avoir cependant le droit de chercher des éclaircissements et de poser des questions pour aider les jurés, qui sont des laymen. Me Teeluckdharry a ensuite accepté de ne pas insister avec la motion si la cour lui donnait la permission de réexaminer son client sur les points concernant sa motion. Il a également demandé au juge d’expliquer au jury comment procéder, compte tenu de la situation. Les parties se sont entendues pour que les indications du juge soient données lors du summing-up avant la délibération. L’avocat a ainsi retiré sa motion.

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