ATELIER DE TRAVAIL : La prostitution infantile est très bien organisée à Maurice, selon Rita Venkatasawmy

Pour la dixième année consécutive, Rita Venkatasawmy, éducatrice spécialisée et directrice du Centre d’Éducation pour les enfants mauriciens, dispensera une formation en trois phases sur l’exploitation sexuelle des enfants à l’intention d’une quarantaine de personnes venant de divers milieux et s’occupant des enfants victimes d’abus. Dans une déclaration au Mauricien en amont à cet atelier, qui débute aujourd’hui, l’intervenante constate que « la prostitution infantile à Maurice est très bien organisée ».
« De plus en plus de gens sont impliqués dans la prostitution infantile, et ce malgré le travail qu’effectuent la brigade des mineurs et d’autres départements spécialisés », explique Rita Venkatasawmy, éducatrice spécialisée et directrice du Centre d’éducation pour les enfants mauriciens (CEDEM). Autre constat, selon elle : « Les fautifs sont de plus en plus rusés. Au fil du temps, ils ont appris comment éviter de tomber entre les mains de la police et de la brigade des mineurs pour poursuivre leurs activités en cachette. » Notre interlocutrice observe que, très souvent, dans le triangle “proxénète-victime-client”, le proxénète se fait passer pour le fiancé, à moins, dit-elle, que le fiancé lui-même soit le proxénète. « Pour leur défense, ils expliquent que les filles sont consentantes. Or, elles ne peuvent pas être consentantes. Dans notre jargon, on appelle cela “uninformed consent” », poursuit notre interlocutrice. « Malheureusement, faute de preuves, dans certaines situations, les autorités ne peuvent rien faire. » Ce fléau, dit-elle, touche des enfants de plus en plus jeunes, précisant qu’à Maurice, ce sont surtout les filles qui sont concernées.
Rita Venkatasawmy indique que cette formation, en trois phases, a lieu tous les ans depuis 2004 et touchent ceux qui interviennent auprès d’enfants victimes d’abus sexuels. La première phase permet de travailler sur la problématique de l’abus sexuel et sur ses conséquences. « Il faut bien comprendre l’acte sexuel avant d’intervenir auprès des enfants. On étudie aussi la convention relative aux droits des enfants et la charte africaine des droits de l’enfant. Ce qu’il faut savoir, c’est que la formation met accent sur la capacité de ces personnes à analyser la situation à Maurice. On travaille en groupe, le but étant de mettre en réseau ces différentes personnes. A titre d’exemple, il y a des gens qui ne connaissent pas la brigade des mineurs. La formation leur permet de prendre connaissance de son existence et de faire appel à lui en cas de besoin. »
La deuxième phase concerne les techniques de réhabilitation des enfants victimes d’abus. « Ceux qui s’engagent doivent être en mesure de proposer des activités thérapeutiques à l’intention de ces enfants, comme des sorties, de la musique, de la danse, voire leur explique comment organiser un anniversaire. L’anniversaire est d’ailleurs très important car il touche à l’identité même de la personne. »
Enfin, explique-t-elle, la troisième phase est axée sur le triangle de la prostitution infantile. « On évoque la base théorique. Il y a aussi une dimension pratique, basée sur l’analyse des cas et sur l’expérience. » Selon notre interlocuteur, les profils des participants sont renouvelés tous les ans. « Ce sont toujours de nouvelles personnes qui sont formées, de tous les âges, toutes compétences confondues. » La formation est dispensée en kreol pour s’assurer qu’il n’y ait pas de barrière linguistique. Les participants ont quelques semaines entre les différentes phases de formation pour bien assimiler ce qu’ils ont appris avant de passer à l’autre étape.
Par ailleurs, cette formation sera enrichie par la récente expérience de Rita Vankatasawmy aux États-Unis où elle a participé à un atelier de dix jours sur le sujet. Un des points importants dans la réhabilitation de ces jeunes victimes est de mettre en place des programmes spécialisés, fait-elle ressortir. Or, les États-Unis sont à ce titre très en avance, dit-elle, ajoutant : « Je crois qu’on va dans la bonne direction avec cette formation. » Cette première phase s’échelonne cette semaine sur quatre jours.

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