AU MENU DU BUDGET : Dette, fiscalité et gaspillage

Préoccupations majeures aux Finances devant la tendance nettement à la hausse du niveau de l’endettement public, s’approchant de la barre des Rs 25 000 par tête d’habitant
Mesures fiscales : les dernières propositions faisant partie du Budget 2016-17 contre-vérifiées dans la matinée avant la réunion du Budget Special Cabinet cet après-midi
À prévoir : la mise sur pied d’un comité de surveillance de haut niveau des dépenses publiques appliquant la guillotine sur le superflu financier dans le secteur public
Avec la traditionnelle réunion du Special Cabinet enclenchée à partir de 16 h, le processus menant à la présentation du budget 2016/17 est complété. Dans un dernier exercice public avec des membres de la presse, hier après-midi au ministère des Finances, le Grand argentier, Pravind Jugnauth, qui présentera le quatrième budget de sa carrière politique, s’est permis de faire état des enjeux de ce budget tout en se gardant de donner la moindre indication au sujet des mesures fiscales, susceptibles de constituer l’ossature de son entreprise visant à « mett lord » dans les finances publiques. D’ailleurs, ce n’est que dans la matinée que le Budgetary Fiscal Mix à faire partie du discours sera officiellement arrêté. Depuis son installation aux Finances, il ne cesse de répéter comme un mantra que la priorité dans la conjoncture tourne autour de « la prudence fiscale et la prudence financière ». Toutefois, trois principales pistes se dégagent, notamment l’urgence d’endiguer la tendance à la hausse de l’endettement public, de mener la lutte contre le gaspillage des fonds tout en apportant une dose de Feel-Good Factor au sein de la population, maintenant que le gouvernement de L’Alliance Lepep entamera bientôt sa troisième année à la tête du pays.
Des recoupements d’informations auprès des sources concordantes au ministère des Finances indiquent qu’il faudra s’attendre à voir la fin du discours vers les 19 h, soit d’une durée de deux heures. Le Budget Speech, qui s’articulera autour d’axes bien définis, devra comporter trois volets majeurs, le social, l’économique et le macroéconomique. Au vu des dernières indications sur le plan international, avec des risques de récession de plus en plus imminents en Grande-Bretagne, le ministre des Finances pourra difficilement occulter l’incontournable Brexit, le divorce entre Londres et Bruxelles, et ses séquelles sur des secteurs économiques à Maurice.
Néanmoins, au ministère des Finances, l’on avoue qu’il n’y a pas que le Brexit qui représente une source de préoccupation pour Maurice. « Il y a le problème de la république populaire de Chine, qui est en phase de décélération économique depuis ces dernières années. Dans une tentative de redresser la barre, les exportations chinoises dans certains créneaux sont en compétition directe avec Maurice. C’est un facteur à tenir en ligne de compte dans les prévisions », affirment des sources autorisées à l’hôtel du gouvernement.
Sur le plan local, la progression phénoménale de l’endettement public au cours de ces dernières années retient l’attention. D’ailleurs, la dernière édition du Monetary Policy and Financial Stability Report, publiée par la Banque de Maurice à la veille de la présentation du budget 2016/17, donne le ton. « Public sector debt remained expansionary, thereby raising concerns over fiscal sustainability. Public sector debt increased by 9.5 per cent, from Rs 238 billion as at end-December 2014 to Rs 261 billion as at end-December 2015 and further to Rs 267 billion as at end-March 2016. As a share of GDP, it rose from 61.6 per cent to 65.2 per cent between December 2014 and March 2016 », note la Banque Centrale, qui ajoute que le Discounted Public Sector Debt par rapport au PIB a progressé de 54,2 % à la fin de 2014 à 56,6 % à la fin de décembre de l’année dernière.
Au ministère des Finances, l’on se dit conscient et préoccupé par la progression de l’endettement public, notamment une hausse de 14,5 % de décembre 2014 à fin mars dernier alors que les derniers chiffres au 30 juin 2016 devront être rendus publics ce week-end. « Nous n’avons pas encore atteint la situation de la Grèce mais la tendance de ces dernières années devrait constituer un “Wake-Up Call” avant qu’il ne soit trop tard. Le budget 2016/17 n’offre d’autre choix que de considérer et d’évaluer des options en vue de réduire la dette publique », fait-on comprendre en prélude au discours du budget. (Voir plus loin les commentaires du ministre des Finances d’hier après-midi)
« Il est un fait qu’au cours de ces dernières années, nous dépensons beaucoup plus que nous générons. L’une des options immédiates est de mettre l’accent sur les dépenses, surtout en termes de gaspillage dans le secteur public. Il ne faut pas méprendre l’opération “mett lord” avec l’expression démagogique de “ser sintir”. Le ministre des Finances, qui a déjà donné un premier signal avec des mesures sur les voyages et missions officielles à l’étranger, compte maintenir le tempo dans d’autres secteurs dans le cadre du budget », poursuit-on.
Dans cette perspective, l’une des mesures qui pourrait être annoncée officiellement en fin de journée porte sur la mise sur pied d’un High Powered Committee pour le monitoring et la surveillance des dépenses publiques. Il semblerait que la gamme de dépenses publiques pour la mise à exécution des projets devra obtenir au préalable le feu vert de cette nouvelle instance, qui détiendra « les pleins pouvoirs pour geler toute dépense jugée inutile ». Pour justifier cette démarche, le ministère des Finances s’appuie sur « les Costs Escalations sans commune mesure » lors de l’exécution de projets sous le précédent gouvernement. Le dernier exemple en date est l’Eastern High Security Prison à Melrose, dont le contrat de construction a été alloué au partenariat Beijing Zhuzong/Hyvec Partners pour un montant initial de Rs 1,491,686,781 (VAT inclusive). En fin de compte, cette prison cinq étoiles devrait mériter cette qualification par le coût final, qui a atteint Rs 2,134,890,869.?Le plat de résistance du budget se résume à la politique fiscale que compte adopter le ministre pour tenter d’équilibrer les finances de l’État. À ce matin, la gamme des mesures relatives à la taxe directe et indirecte attendait d’être précisée formellement. « Différents scénarios fiscaux ont été étudiés au fil des séances de travail de ces dernières semaines. Mais ce n’est que ce matin que tout sera réglé et il faudra attendre l’énonciation des mesures dans le budget pour savoir qui de la taxe directe ou de la taxe indirecte a été privilégiée pour 2016/17 avec un ministre des Finances décidé à brasser large dans cette remise en ordre », affirme-t-on en dressant le même constat par rapport au volet social, notamment les pensions, le bus gratuit nécessitant un budget de Rs 1,2 milliard par an et décrié récemment par le ministre des Infrastructures publiques, Nando Bodha, ou encore la Santé publique.

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour

- Publicité -