Heritaz le 29 Janvier au MCINÉ – Miselaine Duval : « Il faut un équilibre en termes d’assistance artistique »

Le 29 janvier, dans les salles du nouveau MCiné au Caudan, Miselaine Duval et la troupe Komiko présenteront leur troisième film, Heritaz. Un grand moment d’émotion pour celle qui pendant 26 ans de métier a su conquérir le cœur de beaucoup de Mauriciens. Miselaine Duval revient en force également en février dans un “one-woman show”, Kmiselaine, la petite Mauricienne. La femme solaire qui carbure à 100 à l’heure ne s’arrête décidément jamais, avec dans ses bagages tout plein de projets pour cette rentrée 2020.

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Tout de rouge vêtue, souriante comme à son habitude, Miselaine Duval est le visage incontournable du rire à la sauce mauricienne. Une petite bonne femme toute rondouillette mais avec cette générosité de cœur qui procure des émotions chaque fois qu’on part à sa rencontre. Femme battante, curieuse de quolibets dont elle s’inspire pour cartonner à travers ces sketchs qui s’inspirent grandement de la vie de M. et Mme Tout-le-monde. Avec elle, point d’artifice, et, pourtant comme tout Mauricien, Miselaine aussi à chaque nouvelle année se prête au jeu d’une remise en question. « Les choses changent, il faut revoir son armoire, mais il faut surtout gagner en qualité et innover sur le plan du travail. » Pas de temps pour les bavardages, Miselaine est déjà en plein cœur de son travail théâtral et sa troupe s’y colle. Entre deux briefings, elle s’avance, nous accueille et parle avec dans le regard une joie non dissimulée d’en être à son troisième film, Heritaz.

Après la sortie de Panik en 2017 qui a attiré plus de 15 000 spectateurs et Bénédiction, l’an dernier avec plus de 10 000 spectateurs, Heritaz connaîtra-t-il le même succès ? Le script tourne autour d’un planteur fortuné au seuil de la mort, personnage incarné par Raj Bumma et qui confie à son fils (Alexandre Martin) une mission de dernière heure : retrouver les trois petits-enfants qu’il a rejetés parce qu’il n’a jamais voulu que son fils épouse la mère de chacun de ses petits-enfants. « Zame linn kontan belfi. » Ce même fils qui a eu trois liaisons et trois enfants de trois femmes différentes n’a jamais osé se marier au risque de défier l’autorité paternelle. Le vieux veut à sa mort faire amende honorable en demandant pardon à ses petits-enfants pour ses erreurs commises. Miselaine endossera le rôle de la troisième mère, celle qui a décelé chez son homme le caractère d’un être faible ne pouvant contrer son père. Avec trois petits-enfants ayant hérité du caractère acariâtre du grand-père mourant, le scénario est pimenté et les scènes cocasses. Eux qui ont été traités comme des bâtards parviendront-ils à pardonner à ce grand-père ? Heritaz promet. Et connaissant le talent de Miselaine, le film ne saura que plaire aux cinéphiles dès sa sortie le 29 janvier.

S’inspirant de l’école de la vie, Miselaine Duval a su mener tambour battant sa carrière d’humoriste, de scénariste et de réalisatrice. Autant de casquettes qui lui vont à la perfection, mais elle a dû toujours ramer à la force de ses poignets pour permettre à Komiko d’avoir sa propre salle à Bagatelle. Des efforts jalonnés à la fois de succès et de contraintes. Succès, car les fans croient en son potentiel et celui de sa troupe, et, contraintes, car les finances deviennent de plus en plus difficiles à gérer. « Heritaz a été tourné avec le plus petit budget qu’on ait pu avoir et n’obtiendra pas les 30% de remboursement des frais de tournage, sous le Film Rebate Scheme. » Il faut Rs 1,8 M pour qu’un tournage bénéficie d’un “rebate scheme”. Miselaine Duval ne mâche pas ses mots s’insurge contre cette pratique. « On évolue dans un contexte local. Pour les étrangers qui veulent tourner chez nous soit, ça va, mais pour un petit Mauricien, c’est énorme car on ne bénéficie d’aucune aide. Tout sort de notre poche. Maurice est un vivier de talents, on a des compétences et on est parvenu à avoir une école de théâtre pour la formation des acteurs. Il faut encourager le potentiel local. Pour exister il faut l’aide de l’Etat, du ministère des Arts. Il y a une nette différence quand on parle de cinéma local où il y a une absence considérable en termes de budgets. Alors qu’on aurait pu avec une meilleure infrastructure briller à l’international. »

La création locale
Parlant du nouveau ministre de la Culture, Avinash Teeluck, Miselaine Duval trouve que son discours de l’an dernier est très encourageant pour les artistes. « Mais tout cela reste un rêve éphémère pour nous artistes. Il nous faut des moyens pour pouvoir briller à l’international et positionner notre petite île. On ne peut plus en 25 ans que comptent les Komiko en termes de carrière travailler toujours avec des moyens du bord limités. Il nous faut un équilibre en termes d’assistance artistique. Il faut revoir le support des artistes en ce qui concerne les films locaux, on ne peut plus payer toutes nos dettes de nos poches et s’attendre bien après à un remboursement. » Le premier long-métrage des Komiko, Panik, s’était bien positionné en France. Et Miselaine Duval d’indiquer qu’il faudrait que les autorités concernées soient plus réalistes. « On est à Maurice, on réalise des films mauriciens, et c’est en nous exportant que notre pays sera mis à l’honneur. Encouragez-nous à atteindre nos objectifs. Les acteurs ne peuvent pas souffrir d’être payés en retard. Une des questions qui reste en suspens est : Ki pe fer pou kapav ed la kreasion lokal fleri. On espère que ce jeune ministre des Arts nous écoute et on lui demande de considérer nos propositions car un gros travail reste à être accompli. »

Loin de s’attarder sur les problèmes, Miselaine Duval est aussi une femme qui trouve des alternatives. Dans son escarcelle, elle a d’autres tours dont son troisième “one-woman show”, Kmiselaine la petite Mauricienne, prévue pour le mois de février. Pourquoi la lettre K, serait-ce le sigle d’une rappeuse ? L’artiste part d’un grand éclat de rire : « K, comme pour rendre hommage aux Komikos. » De femme tropiquante à mille fams, ses deux précédents “one-woman show”, Miselaine se lance dans sa propre autobiographie dans Kmiselaine la petite Mauricienne qui sera comme une reproduction de sa vie sur scène. Miselaine qui parvient à déclencher le rire sur son passage se définit certes comme une artiste ayant l’humour dans la peau mais aussi une femme forte et battante. « Il faut que toutes les femmes deviennent des êtres forts avec cette capacité non seulement de donner la vie mais aussi de faire face à la vie. »

L’an dernier, pour les 25 ans des Komiko, elle avait pu remplir 3 500 places. « C’est une reconnaissance pour 25 ans de carrière et cette année on aura également notre festival du rire et on invite d’autres talents à nous contacter au Komiko Art Club au 471 1 332. Vinn tant zot sans. C’était difficile à mon époque de faire une percée dans ce milieu. D’où la raison pourquoi j’ouvre grand les portes de ma salle à Bagatelle, qui sonne comme une nouvelle aventure pour des talents neufs. Ce qu’il faut dans ce métier, c’est l’humilité. On ne naît pas star, on le devient par la force d’un travail assidu. » Sur ces notes, Miselaine, entourée de sa troupe, se prépare à entrer en scène. La nouvelle année présage d’autres sketchs, d’autres fous rires. De quoi apporter un certain rayonnement dans le domaine des loisirs à Maurice.

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