CCTV: pris entre « Pa kone » et « Je ne sais pas »

Spirale (nom féminin) : Courbe qui s’éloigne de plus en plus du point d’origine autour duquel elle décrit des révolutions.
 Depuis quelques mois, le débat fait rage dans la presse, mais surtout sur les pages numériques des réseaux sociaux, au sujet des caméras CCTV à « reconnaissance faciale ». Le point litigieux qu’avancent certains: que l’Etat songe en ce moment à se procurer des caméras CCTV à reconnaissance faciale, pouvant identifier ainsi des personnes grâce à un logiciel spécialisé.
 En temps normal, cette idée, tirée des romans dystopiques, aurait dû sembler farfelue et balayée comme une blague au premier abord. Mais liée à l’autre débat rageant sur les données biométriques de la nouvelle carte d’identité, voilà que les fils se tissent pour dépeindre un tapis orwellien. Dans ce maelstrom de propos, je propose qu’on y réfléchisse sous les axes ci-dessous, en gardant les pieds sur terre.
 Comment, raisonnablement, peut-on contempler l’idée que l’Etat investirait dans un tel arsenal lorsque la force policière mauricienne a du mal à (i) loger ses membres dans des locaux décents (ii) munir ces derniers de chaussures convenables et durables (iii) procurer à ces derniers le matériel nécessaire afin de garantir leur propre sécurité lors des opérations d’intervention (iv) contempler l’idée proposée depuis quelque temps par l’ICAC d’équiper les policiers d’enregistreur audio pour les conversations lors des contrôles routiers (v) mieux équiper les membres du Scene of Crime Office afin que ces derniers ne contaminent pas le lieu du crime eux-mêmes etc. Cette liste est quasi-infinie.
 En vérité, cette spirale aurait pu être évitée si les autorités avaient répondu dès le départ. Mais je comprends leur embarras…
En fait, malgré tout le fanfare qui a accompagné le lancement du projet de surveillance géographique par CCTV, on se serait vite rendu compte que les images des caméras installées ne permettent pas d’identifier les personnes, simplement parce que ces images ne sont pas… de qualité optimale. Confronté à ce problème, dans un dossier quelque part, un haut gradé a dû peut-être demander des recommandations à un technicien, qui a dû répondre peut-être qu’on devrait « invest in cameras that would enable facial recognition ».
 Et paf! Le propos ici était simplement d’avoir des caméras HD ou de qualité suffisante pour pouvoir au moins voir le visage de la personne! Nous tenons le point d’origine de la spirale. A partir de là, une bonne dose d’imagination et une pincée de trop de films hollywoodiens sont suffisantes pour tourbillonner le débat hors contrôle. Telle une personne souffrante qui refuse le diagnostic d’un médecin en préférant les traitements occultes des longanis, la société mauricienne est, malheureusement, ainsi faite: des fois nous préférons l’explication fantastique à l’explication la plus rationnelle… Et dans tout ça, l’opinion publique se fait bercer par les « Pa kone » et les « Je ne sais pas ».

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