CENTRE DE SAGES-FEMMES: Mise en confiance et détente pour un meilleur accouchement

La grossesse, surtout la première, est souvent source d’angoisses et d’interrogations. Passer du statut de femme à celui de mère est une transition rarement dépourvue de doutes. D’où l’importance d’une bonne préparation à l’accouchement. C’est là l’une des principales missions que se donne le Centre de Sages-Femmes, à Floréal et à Grand-Baie : mettre en confiance la future mère et l’aider à être davantage actrice de son accouchement.
Il n’est pas rare que les femmes soient tourmentées par des scénarios catastrophiques durant leur grossesse, les empêchant ainsi de profiter de cette riche période et d’apprécier leur bonheur. Et, au neuvième mois de grossesse, avec l’imminence de l’accouchement, la peur de l’inconnu : comment reconnaître les signes ? Quelle sera l’intensité des douleurs ? Saurai-je les supporter ? Et, si les contractions ont lieu alors que je suis bloquée dans un embouteillage…
« La grossesse est une période de grand bouleversement. Souvent, les femmes enceintes se retrouvent dans une grande solitude. Elles ressentent des choses nouvelles et différentes et ne sont pas toujours comprises par leur entourage. Elles ont besoin d’être écoutées, de comprendre ce qui se passe dans leur corps. On est donc là pour les aider ». Claire Israel, sage-femme diplômée de la faculté de médecine Cochin-Port Royal, de l’Université Paris V et Isabelle Delamour, diplômée de la faculté Louis Pasteur, École de sages-femmes, à Strasbourg, se proposent, depuis quatre ans, dans leur centre à Floréal et Grand-Baie, d’être les “gardiennes” de la grossesse et de l’accouchement des futures mères. Cela, à travers un accompagnement professionnel. « L’arrivée d’un bébé est un événement très précieux. C’est vraiment important d’être accompagnée et préparée », explique Claire Israel.
Pouvoir confier ses appréhensions, se sentir comprise et obtenir des réponses précises aux questions qui taraudent l’esprit. Ce sont autant d’ingrédients qui permettent de bien s’armer pour éviter une mauvaise grossesse vécue dans l’angoisse et dans la déprime. La peur, on le sait, entretient et attise la douleur. La panique fait perdre son bon sens ; on n’a plus de contrôle sur soi et on dramatise tout. Il est par ailleurs connu que quand on a mal, le cerveau produit des endorphines qui atténuent la douleur. Toutefois, lorsqu’on stresse, c’est de l’adrénaline qui est produite, ce qui n’augure rien de bon lors de l’accouchement : le rythme cardiaque s’accélère et les contractions sont accentuées. « Pendant le premier accouchement surtout, c’est l’inconnu auquel font face les femmes. Et, le stress tend à bloquer les contractions. On les aide donc à déstresser », dit Claire Israel.
Le Centre de Sages-Femmes, un nouveau concept à Maurice, propose plusieurs formations en complémentarité du suivi médical avec le gynécologue-obstétricien : des cours de préparation à la naissance, en individuel ou en groupe ; un accompagnement à l’accouchement ; des visites à domicile en prénatal ou postnatal ; des consultations de rééducation du périnée et des cours de gymnastique postnatale pour la maman et le bébé.
Gestion des contractions
Avant que la patiente entame ces cours, un rendez-vous personnel est fixé à partir du quatrième mois, lors duquel « on fait connaissance pour savoir quels sont ses antécédents tant sur le plan médical que psychique et pour savoir comment se déroule sa grossesse. En fonction de cela, on propose des cours en individuel ou en groupe. Les cours individuels ont lieu au centre et les cours en groupe à la Clinique Darné », indique la directrice du Centre de Sages-Femmes. Un projet de naissance est ensuite établi avec la femme ou le couple en fonction de leurs souhaits. « Chaque femme a son histoire. On s’adapte à la singularité physique et psychique de chacune. Notre disponibilité et notre relation de confiance réciproque aident au déroulement normal de la grossesse et de l’accouchement ». Le but aussi, ajoute Claire Israel, « est d’expliquer aux futures mamans comment être plus actrices de leur accouchement. Elles ne vont pas le subir. C’est vraiment leur corps et c’est vraiment important de s’y préparer ». Les cours, comprenant six sessions, débutent dès le sixième mois, à fréquence d’une fois par semaine. Il est également possible de suivre les cours en anglais.
La préparation est à la fois théorique et physique. Dans l’antenne de Floréal, des matelas, des coussins, des ballons sont disposés pour un entraînement corporel qui apprend aux patientes différents types de respiration durant la grossesse comme durant l’accouchement. Les femmes enceintes sont aussi initiées à un travail musculaire, notamment au niveau du dos, du bassin, du périnée. Elles apprennent en outre des postures appropriées et la gestion des contractions et de la poussée.
Au moment de l’accouchement, « ma collègue, Isabelle Delamour, accompagne la future maman, la soutient et l’encourage. Cette dernière se sent en confiance », dit Claire Israel. Comment les gynécologues réagissent-ils à la présence de la sage-femme ? « Les gynécologues sont contents car plus la femme est préparée, mieux se passe l’accouchement ».
Les visites postnatales ont quant à elles pour intérêt de « répondre aux autres questions de la maman. Par exemple, il y a des mamans qui ont des épisotomies (NdlR : incision pratiquée pour empêcher une déchirure spontanée lors de certains accouchements) très douloureuses. On leur explique alors ce qu’il faut faire. D’autres ont un baby blues et on les oriente vers des psychologues ». Les visites postnatales ont par ailleurs pour but d’apporter aux mères un soutien à l’allaitement. De plus, « beaucoup de mamans reviennent six semaines après l’accouchement pour trois séances d’une heure pour des exercices abdominaux et des massages avec leur bébé ».
Rôle du futur père
Les cours que propose le Centre de Sages-femmes accordent par ailleurs une grande importance à l’accueil du bébé. « Souvent, on met le bébé dans une couveuse à sa naissance. Or, plus le bébé est proche de la maman, en peau à peau, plus le contact est possible ». Et, quid du rôle du papa ? « Le futur père aussi peut participer. Il y a vraiment un cours qui s’adresse à eux pour leur apprendre quel peut être leur rôle. Ils aident, ils soutiennent leur femme. Eux aussi, ils ont des craintes. Je les fais parler et on les initie à des massages du bas du dos qu’ils peuvent faire à leur femme ».
Selon Claire Israel, les centres de sages-femmes en privé sont très courants en France. « À Maurice, comme cela n’existait pas, j’ai voulu proposer ce service ». La sage-femme est arrivée à Maurice il y a douze ans pour accompagner son conjoint, venu travailler dans le pays. « J’ai commencé toute seule et par la suite, j’ai rencontré Isabelle Delamour à la Clinique Darné. On s’est très bien entendues et elle s’est associée à moi pour couvrir toute l’île ». En France, Claire Israel a eu l’occasion de se former à la rééducation périnéale et à la sophrologie (relaxation physique et mentale pour une meilleure préparation à l’accouchement).
La rééducation périnéale, selon notre interlocutrice, « est indispensable pour prévenir ou traiter l’incontinence urinaire, fréquente après une ou plusieurs grossesses. Le périnée est un ensemble de muscles qui soutient les organes comme l’utérus, la vessie et le rectum dans le petit bassin. Il a un rôle important dans le contrôle de la continence. Au cours de la grossesse et de l’accouchement, le périnée est mis à l’épreuve. Ces muscles sont très sollicités par le poids croissant de l’utérus (6 kg en moyenne en fin de grossesse) et le jour de l’accouchement, ils sont très étirés lors du passage du bébé. Dix ou vingt ans après l’accouchement, la femme peut avoir des soucis de descente d’organes (vessie, utérus, vagin) ou des fuites. Cette rééducation permet de récupérer le tonus musculaire et d’apprendre à contracter le périnée ».
Le métier de sage-femme qu’exerce Claire Israel est l’aboutissement d’une première admission en première année de médecine en France plus quatre années d’études dans le domaine accompagnées de stages. « C’est une formation qui est médicale en France », précise-t-elle. Sont-elles habilitées à former des sages-femmes à Maurice ? Claire Israel indique que sa collègue et elle-même ont en projet de le réaliser. « Déjà, ma collègue a formé des infirmières et moi j’ai donné des cours de physiothérapie à l’Université de Maurice ».
Le recours à des sages-femmes pour mieux préparer son accouchement est une pratique nouvelle à Maurice. Comment celle-ci a-t-elle été accueillie ? « Au départ, c’était plutôt des patientes françaises qui venaient mais de fil en aiguille, nous avons reçu beaucoup plus de Mauriciennes. Ce n’est pas l’usine et on ne veut pas que ce soit l’usine non plus. On veut que cela soit un suivi personnalisé ».
Massage de son bébé
Des rencontres autour de l’allaitement sont par ailleurs organisées chaque premier jeudi de chaque mois. « Chaque mois, on a un thème différent. Une participation de Rs 100 est demandée et cet argent est utilisé pour améliorer le centre. C’est l’occasion pour les mères qui allaitent d’échanger leurs expériences ».
Le Centre de Sages-femmes initie d’autre part les nouvelles mamans au massage de leur bébé. Pour Claire Israel, ce massage a toute son importance, notamment dans l’approfondissement de la relation entre la maman et son bébé. « Le massage permet au bébé de prendre conscience de son corps car le plus souvent, on s’occupe de ses fesses, de son visage. Le massage stimule ses défenses immunitaires. C’est une des premières choses in utero que le bébé a comme sens : le toucher. Il est massé par les contractions, les membranes amniotiques et les parois de l’utérus ». La sage-femme précise que le massage doit se faire lorsque le bébé est calme. La mère s’installe confortablement sur un matelas, le bébé, complètement déshabillé, sur ses genoux. « Ce ne sont pas juste de petites caresses qui vont plutôt l’exciter mais on appuie pas mal. En général, le bébé se détend. La maman communique avec lui et elle le remercie pour le massage. Il ne faut pas faire ce massage juste après les biberons ou les tétées ni après le bain car cela fatigue le bébé. Cela ne doit pas non plus être trop long mais d’une durée d’environ dix minutes. Le massage peut aussi aider les bébés qui n’arrivent pas à dormir ».
Tout un attirail de techniques professionnelles mises à la disposition de la future maman pour qu’elle puisse profiter pleinement de sa grossesse et de l’arrivée de sa petite créature…

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