CHENNAL DE GRSE : Dramatique sortie en mer pour un groupe de policiers

Une sortie à l’Ile-aux-Cerfs entre une douzaine de membres de la force policière, dont des policiers et des Women Police Constables, affectés à des postes de police de l’est du pays, ainsi que des membres de leurs familles a tourné au drame. La pirogue Love, appartenant à Leelawtee Maunick, a en effet chaviré en mer à quelque 200 mètres du débarcadère de Deux-Frères. Le bilan est des plus lourds. Un bébé de sept mois, Lovish Priyansing Mungur, qui était en compagnie de ses parents, le constable Chetlallsingh Mungur, âgé de 30 ans, de sa mère et de sa soeur, Nishika, Vagish Shamloll, âgé de quatre ans, qui avait accompagné sa mère, la constable Shamloll, du poste de police de Brisée-Verdière, et la Woman Police Constable Urmilla Mewa, 24 ans, habitant St-Julien Village, ont en effet péri, leurs corps ayant été récupérés en mer lors des opérations de sauvetage menées par des éléments de la National Coast Guard et des volontaires. Les Mungur perdent deux membres de leur famille lors de ce grave accident en mer, le corps du constable Mungur, père du bébé de sept mois mort noyé, ayant été retrouvé lors de la reprise des opérations de recherches ce matin. L’épouse du constable Mungur, Lovena, âgée de 25 ans, ainsi que sa fille, Nishika, 3 ans, sont admises à l’hôpital de Flacq pour des soins médicaux. De son côté, le skipper du bateau, Hayward Marie, un habitant de Grande-Rivière-Sud-Est âgé de 57 ans, devait comparaître devant le tribunal de Flacq à la mi-journée sous une charge provisoire d’homicide involontaire. Il a déjà été entendu hier soir par les enquêteurs de l’Eastern Division en présence de son homme de loi, Me Chetan Baboolall.
Avec les quatre victimes, six autres passagers, qui se trouvaient à bord de l’embarcation, ont été placés en observation ou sont sous traitement à l’hôpital de Flacq depuis hier en fin de journée. Parmi elles se trouvent trois policières, la WPC Veerasamy, qui devait être “On Night Duty” hier au poste de Brisée-Verdière, la WPC Gopaul, qui était officiellement en congé de maladie hier, et la WPC Dabeea, sur le troisième “shift” à Brisée-Verdière, mais aussi le constable Ramkhelawon, qui était en congé hebdomadaire, Lovena Mungur, l’épouse du constable Mungur, et sa fille Nikisha. Quatre autres membres de la force policière – soit la WPC Shaloll, qui a perdu son fils de quatre ans dans l’accident, et qui était officiellement en congé maladie, la WPC Sooba Saulick, en congé de détente, ainsi que les constables Algoo, sur le troisième “shift” au poste de police de Moka et le constable Parmessur – ont pu rentrer chez eux hier après avoir reçu des premiers soins à l’hôpital alors que le constable Beeharry, du poste de police de Lallmatie, en est pour sa part sorti indemne. Mais au sein de ces familles comptant des membres de la force policière, et également au poste de police de Brisée-Verdière, où travaillait la majorité des passagers du Love, le choc était encore difficile à accepter ce matin.
À Lallmatie, où habite la famille du constable Mungur, de la DSU de Flacq, les derniers développements de ce matin ont été vécus comme un véritable coup de massue après la nouvelle de la découverte du cadavre de ce policier, repêché dans le chenal de Grande-Rivière-Sud-Est, dans les parages de Derrière Line, où a chaviré l’embarcation. Depuis hier en début de soirée, cette famille a été lourdement endeuillée avec la perte du bébé de sept mois, Lovish Priyansing, et ce alors que la mère et une autre fillette, âgée de trois ans, étaient admises à l’hôpital de Flacq. Le mince espoir auquel s’agrippaient les proches en vue de retrouver sain et sauf le constable Chetlallsing Mungur, porté jusque-là disparu, devait en effet s’évanouir ce matin dès la reprise des recherches.
L’opération menée par des plongeurs de la NCG et des volontaires de la région hier en fin de journée avait été grandement mise à mal par l’eau boueuse. Mais peu avant 10 h, le corps de ce constable, père de deux enfants, était retiré de l’eau, inanimé. Une profonde tristesse régnait depuis hier chez les Mungur, qui devaient incinérer deux de leurs proches, partis pour une journée de détente à l’Ile-aux-Cerfs hier.
Vishal Mohun, conseiller du village de Lallmatie et voisin de Chetlallsingh Mungur, arrive difficilement à digérer ces événements dramatiques. « Nous sommes des amis d’enfance. Il était très dévoué pour sa famille et ceux qui avaient besoin de son aide. C’était un bon père de famille et quelqu’un de très religieux. Dimanche dernier, il a participé à une marche sur le feu, qui avait lieu dans le village. Pa fasil saki ine arrive », devait-il déclarer au Mauricien.
Triste nouvelle encore à communiquer
La victime, qui fréquentait le collège Ramsoondur Prayag, à Rivière-du-Rempart, avait travaillé chez Joy Aluminium, à Lallmatie, après ses études avant de joindre la force policière. Selon Vishal Mohun, Chetlallsingh Mungur aimait beaucoup la musique. Il accompagnait d’ailleurs souvent ses amis, qui animaient des mariages ou anniversaires, avant d’épouser Lovena. Cette dernière, qui est toujours hospitalisée, n’a pas encore été informée ce matin des décès de son époux et de son bébé de sept mois. Les parents se concertaient encore pour décider de la marche à suivre. L’autopsie devait être pratiquée ce matin par les Police Medical Officers en vue d’attribuer les causes du décès. Les examens post-mortem, pratiqués hier soir par les médecins légistes – les Drs Baichoo et Jankee-Parsad – sur les trois autres victimes ont conclu à une asphyxie due à la noyade.
À Laventure, chez les Shamloll, le père, Sachin, policier de son état et affecté au poste de Plaine-des-Papayes, est inconsolable après la perte de son unique fils, Vagish, âgé de quatre ans. Son épouse, la WPC Shamloll, a quitté l’hôpital de Flacq hier soir contre l’avis médical. Ce matin, il était encore sous le choc. Il était à son poste, à Plaine-des-Papayes, lorsqu’il a été informé d’un « problème » par l’OPS Room de la police. « Zotte ine mwa mo garson ine blesse ek ki mo bizin ine lopital Flacq. Mais quand je suis arrivé à l’hôpital, le monde s’est écroulé sous mes pieds quand j’ai appris que mon unique fils s’était noyé lors d’une sortie à l’Ile-aux-Cerfs », déclare le constable Shamoll, encore traumatisé par les événements. « Mo pa ti kone ki mo garson ine al Lil o Serf. Mo pa ti kone ki li ine al ekskursyon ek so mama. Se pir nuvel ki mone gagne dan mo lavi », ajoutera-t-il. Les premières indications quant aux circonstances de l’accident lui ont été communiquées par son épouse, la WPC Shamloll, qui se trouvait à bord. « Mo madam dir mwa ene gro lahul ine devir bato ek zot pa ti ena gile sovtaz », devait-il ajouter.
Sachin Ramloll aura de gros regrets. « Sak fwa mo garson, Vagish, dir mwa papa, fini nou lakaz ene fwa ek lerla nou kapav reste ansam », souligne-t-il, sachant pertinemment que ce souhait ne sera jamais exaucé. Une atmosphère lourde régnait à Laventure, les obsèques du jeune garçon étant prévues pour aujourd’hui.
“Zot ti desid
sa dernye ler”
Le père d’Urmila Mewa, âgée de 25 ans, du village de St-Julien, ne revient pas non plus de cette catastrophe, qui a emporté sa fille, affectée au poste de police de Brisée-Verdière. Elle avait célébré ses cinq ans de service au sein de la force policière le 1er juin dernier. Elle n’était pas mariée et n’avait pas d’enfants.
Vishwarlall Mewa, son père, est effondré et se souvient encore de la dernière fois qu’il a vu sa fille, soit hier, vers 10 h, au moment où celle-ci quittait la maison pour aller rejoindre ses amis de la force policière pour une sortie. « Zot pa ti ankor kone kot zot pou ale. Zot ti desid sa dernye ler », fait-il comprendre en retenant ses larmes. Il se rappelle encore de sa dernière conversation avec sa fille, vers 16 h 30, au téléphone. « Li ti telefon so ser pou dir li ki zot pe kit Lil i Serfs et zot pe pran bato. Sameme dernier fwa nou fine tane li », ajoutera Vishwarlall Mewa. Vers 19 h hier, son gendre l’a informé qu’un incident s’était produit en mer et que plusieurs personnes avaient été transportées à l’hôpital de Flacq. C’est lorsqu’il s’est rendu sur place qu’il a appris que sa fille figurait parmi les victimes. « Ou krwar li fasil pou ene papa enter so tifi ? Li ti ena zis 25 ans », se lamente-t-il. Urmila Mewa était une bosseuse, se souvient-il. « Li pas ti marie, ni fiance. Li pas ti gagn letan ek sa bane zaffair-la. Li ti pe viv ziss pou so travay. » Les obsèques de la jeune femme auront lieu à 14 h aujourd’hui.
L’enquête policière, confiée aux hommes de l’Eastern Division, a déjà reçu la version du skipper du bateau, Hayward Marie, qui compte 20 ans d’expérience en mer. Une charge provisoire d’homicide involontaire a été retenue contre lui lors de sa comparution en fin de matinée devant le tribunal de Flacq. Il a fait comprendre à la police que l’accident est survenu à quelque 200 mètres de la jetée. Il était parti chercher une quinzaine de passagers, principalement des membres de la force policière et leurs proches, qui avaient passé la journée à l’Ile-aux-Cerfs. Il devait être peu avant 17 h au moment du départ, heure considérée comme étant relativement tardive en ce début d’hiver à l’est.
Le skipper a déclaré aux policiers avoir rencontré des difficultés pour faire comprendre aux passagers qu’ils devaient porter des gilets de sauvetage. L’explication donnée était que le port du gilet n’est pas obligatoire dans le lagon. Il n’a eu d’autre choix que de les embarquer ainsi. Pendant le trajet entre l’Ile-aux-Cerfs et la terre ferme, les passagers s’amusaient. « Zot ti pe bouz boukou dan bato. Mone dir zot pa bouze ek pa kapav gagn problem », aurait déclaré le skipper.
“Pe bouz boukou dan bato”
 D’autres sources avançaient que les passagers ne se gênaient nullement pour déambuler dans le bateau. Mais l’enquête de la police devra confirmer ce détail majeur, les dépositions des rescapés étant prévues lors de la prochaine étape des auditions.
Le propriétaire, Leelawtee Maunick, indique, lui, que le skipper lui a fait comprendre qu’au moins à quatre reprises, « mone dire zot pa danse lor bato ». Défendant Haywar Marie, il dira : « Ti ena inpe lalkol lor zot. Sa bann rapel a lord pane servi nanyen. »
Finalement, quand l’embarcation s’est engagée dans le chenal de GRSE, à l’endroit communément appelé “Derrière Line”, ce qui devait arriver arriva.
« Banla ti pe bouze dan bato, kine panch ene kot ek apre ene vag ine vine par deryer », ajoute le skipper dans sa déposition. L’embarcation finira par chavirer, tous ses passagers se retrouvant à l’eau. Il devait être vers 17 h 15. Très vite, les secours ont été organisés avec d’autres propriétaires de bateaux de la région. Et des volontaires, qui ont presque vécu ce drame en direct, se sont jetés à l’eau en vue de parer au plus pressé. Des éléments de la National Coast Guard ont aussi été dépêchés sur les lieux du drame.
Dans premier temps, quatre des passagers – soit deux enfants en bas âge, comprenant le bébé de sept mois, ainsi que la WPC Mewa et le constable Mungur – étaient portés manquants. Par la suite, trois personnes ont ainsi été repêchées et conduites à l’hôpital, dont la constable Mewa et les deux enfants. Un de ces derniers devait rendre l’âme peu de temps après. Le décès de la WPC et de l’autre enfant est survenu aux alentours de 19 h.
Entre-temps, la nouvelle de ce drame en mer devait se propager comme une traînée de poudre dans cette ville de l’est, de nombreux villageois de GRSE et de Deux-Frères se rendant sur les lieux. Les proches des  victimes, choqués et en larmes, tentaient en vain d’apporter leur contribution pour essayer de retrouver le constable Mungur. Des éléments de la National Coast Guard et l’hélicoptère de la police ont été mis à contribution dans les recherches, qui ont dû être abandonnées vers 20 h en raison de l’obscurité. L’enquête se poursuit.

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