Chinatown – insécurité : De peur qu’une psychose ne s’installe…

— Habitants : « Cette dégénérescence du “law and order” résulte de la mauvaise situation économique nationale »

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— Commerçants : « Les affaires allaient déjà plutôt mal… Il faudrait des patrouilles régulières et permanentes de la police »

Habitants et commerçants de Chinatown, Port-Louis, sont sur la défensive. Les incidents récents traduisent une montée de l’insécurité : des agressions et des vols avec violence sont devenus monnaie courante dans cette région habituellement paisible et très fréquentée, de jour comme de nuit. Seulement voilà, soutiennent-ils, « de peur qu’une psychose ne s’installe, nous espérons que les autorités vont rapidement réagir. »

« Nous ne voulons pas que s’installe une certaine hystérie ou la panique chez l’ensemble de la population », disent des habitants et commerçants de Chinatown après les récentes agressions qui ont eu lieu dans la localité. Au banc des accusés, outre « le manque de patrouilles et de présence policière visible, pour dissuader ceux qui envisagent de commettre des délits et agressions », expliquent ceux qui préfèrent garder l’anonymat, il faudrait que le gouvernement et les autorités concernées arrêtent de traiter Chinatown comme la région la plus pauvre du pays !
Celui qui évoque cette situation, Albert, la quarantaine, se décrit comme un enfant du quartier. Seulement voilà, estime cet habitant qui a aussi repris le business familial bien ancré dans le quartier : « Chinatown est totalement délaissé quand il est question de développement ! » Il rejoint Marguerite, autre habitante de l’endroit, sur cet aspect. La septuagénaire, dont les «parents et grands-parents habitaient ici, et maintenant, mes enfants et mes petits-enfants, pour la plupart, sont également installés dans la région », est d’avis que « l’un des facteurs qui a provoqué cette montée de l’insécurité dans notre quartier, c’est la situation économique. »
Ils ajoutent à tort ou à raison: « Si le climat économique était au beau fixe, s’il n’y avait pas de chômage, pas tous ces problèmes de drogue, par exemple, on n’aurait pas eu des gens désespérés qui vont commettre des vols et des agressions. » Selon Albert et Marguerite, « une fois que la situation financière du pays sera redressée, qu’il y aura plus d’emplois, ces tentations de voler tout ça vont disparaître… On le souhaite ardemment ! »
Autre élément avancé : « Il y a la façon dont les agressions ont été commentées et amplifiés, via les réseaux sociaux », fait part Jenna, propriétaire d’un restaurant très prisé. Un autre habitant du quartier, Norman, évoluant dans le même registre, abonde dans le même sens : « Il y a effectivement une recrudescence de vols et d’agressions dans notre région. Cependant, la façon dont certains ont commenté les incidents sur les réseaux sociaux a suscité comme une panique chez nos compatriotes. » Autant qu’Albert et Marguerite, les deux gérants de restaurants, « il faut absolument éviter de créer la panique, voire, la psychose chez les Mauriciens. Avec tout ce qu’il s’est passé, les médias qui ont rapporté les événements et la présence des membres de la UCA (United Chinatown Associations), les clients ont développé une frousse…» Jenna explique : « Désormais, les gens appellent, demandent s’il y a des places de parking tout près des restaurants. Ils veulent également savoir si nous avons un gardien devant la porte, des caméras, entre autres… C’est clair qu’ils paniquent ! » Et cela « se répercute évidemment sur le business », soulignent ces interlocuteurs. Ils rappellent que « déjà, la situation n’était pas reluisante avant cette détérioration de la situation, ces six, sept derniers mois. Mais là, ça va encore moins bien…» Les deux responsables de restaurant font ressortir « qu’on devait attendre les fins de mois et une fête, un jour férié, des anniversaires, entre autres, pour qu’il y ait foule. Là, si ça continue, les restaurants vont être déserts ! »
Ces habitants et commerçants qui vivent et travaillent à Chinatown en appellent à la « diligence de la part des autorités ». Certes, il y a actuellement des patrouilles de policiers dans les rues. Et durant la journée, des officiers circulent dans les rues. « Mais ce serait mieux si le soir, par exemple, les policiers étaient plus visibles sur les trottoirs et non dans leurs véhicules. Cela serait davantage dissuasif ! » De même, souhaitent ces personnes, « il devrait y avoir des patrouilles régulières et permanentes. Pas uniquement quand il y a des problèmes, comme maintenant… D’ici quelques semaines, quand les choses se seront tassées, on ne verra plus de policiers ! »
Ils sont, certes, de moins en moins à « persister, ek res à Chinatown ! » Pour Jenna, « l’exode qui a caractérisé Chinatown il y a quelques années, poussant les habitants vers Baie-du-Tombeau et Coromandel, entre autres, peut recommencer…» Quant à Albert et Marguerite, ils ont déjà « renforcé la sécurité dans nos maisons. C’est terrible, ce sentiment de peur dès que la nuit tombe ! Combien de temps ça va durer ? C’est pas possible ! Chinatown est un endroit où il fait bon vivre. Il faut faire quelque chose pour que ça redevienne comme avant…»


« Nous ne sommes pas des millionnaires ! »

Quelques-uns des habitants rencontrés à Chinatown ne cachent pas leurs « frustrations et colère. » Ils expliquent : « Il y a une perception que la communauté des Sino-Mauriciens est composée de personnes très riches. Comme si nous sommes tous des millionnaires ! Ce n’est pas vrai. S’il y a certains qui sont bien “well off», la majorité vit raisonnablement, aisément, on va dire. Mais il ne faut pas généraliser. » De fait, estiment-ils, « bien des gens pensent que puisque les habitants de Chinatown sont riches, on peut aller les voler ! Il faut arrêter de penser comme ça ! » Par ailleurs, soutiennent-ils, « nous sommes de cette génération qui a été élevée avec d’autres valeurs. Nos parents et grands-parents nous ont inculqué des principes et des valeurs de bon voisinage, de politesse, de gentils et d’entraide. Nous n’avons pas en nous ces germes de violences qui nous poussent à disputer en public, par exemple… Peut-être qu’il faut changer ! »

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