Chronique d’un voyage en Inde : s’élever vers le Mont Kailāsa…

Varsen Lutchmanen

L’Himālaya, « logis de la neige », long de quelque 2 500 kilomètres, sépare l’Inde, le Népal, le Bhoutan et le Tibet. La chaîne de montagnes, en sus d’héberger le plus haut sommet du monde, l’Everest, abrite aussi l’un des sommets les plus sacrés de l’Hindouisme, le Mont Kailāsa, qui se trouve plus précisément à l’ouest du Tibet sur la chaîne du Transhimālaya. Haut de 6 638 mètres, le Mont Kailāsa est considéré comme la demeure du Dieu Śiva et sa compagne Pārvathi, « fille de la montagne ». C’est aussi perçu par beaucoup comme étant le centre mystique de l’univers.

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En 2017, j’ai eu la chance inouïe de faire un yātra, pèlerinage, au Tibet en compagnie de cinq Mauriciens à l’assaut du Mont Kailāsa. Nous devons passer par Kathmandu mais les routes étaient malheureusement bloquées comme en 1975, lorsque Swami Atheethānanda et moi, nous nous rendions à Kathmandu. À cause des couches de terre et des rochers sur la route, nous avons dû rebrousser chemin. Plus de quarante ans plus tard, c’était à refaire. De Delhi, nous sommes allés au Népal. Cette fois-ci, nous avons pris l’hélicoptère pour nous rendre à Simikot (3 000 m) en survolant l’Hilsa (3 700 m) et Purang (3 800 m). Lors de cette traversée, nous avons été des témoins privilégiés des collines et montagnes enneigées de l’Himālaya et le son des ruisseaux glacials, un véritable orchestre de Mère Nature.

Arrivant à la frontière du Népal, après avoir passé par les douanes, nous nous sommes dirigés pour prendre l’hélicoptère pour un vol de deux heures afin de nous rendre à l’hôtel. Là-bas, nous étions logés au 3e étage. En vérité, nous nous trouvions à près de 4 500 mètres d’altitude. Ce qui m’a donné des difficultés à respirer. Mais en prenant appui sur les murs, j’ai pu finalement regagner ma chambre.

Quittant l’hôtel à huit heures le matin suivant, traversant le désert, nous avons contemplé plusieurs lacs où des dieux et déesses, entre autres, sont venus prendre leur bain selon la mythologie indienne. Après trois heures de voyage par l’autobus, nous sommes arrivés à Mansarovar, le lac d’eau naturel le plus haut du monde (environ 4 600 m). Sans tarder, nous avons plongé dans l’eau glaciale. Heureusement que le soleil a fait son apparition quelque temps, son reflet se posant sur le lac comme une lumière pâle, ce qui nous a permis de nous réchauffer. Après ce bain sacré, nous avons fait un “yaj” en compagnie d’Indiens venus d’Amérique et d’autres pèlerins. Après le “yaj”, je m’asseyais pour méditer. Aujourd’hui encore quand j’y pense, je suis habité par le silence de ces lieux, et des larmes de joie ruissellent le long de mon visage.

Après deux heures et trente minutes, nous avons continué la route vers Darchen toujours en bus où nous avons passé la nuit. Ensuite le lendemain, le premier jour de notre Kailāsa parikrama (circumambulation du Mont Kailāsa d’une circonférence de 52 kilomètres), nous avons poursuivi notre route quittant Darchen pour Dirapuk. Nous avons marché sept heures durant pour y arriver après avoir commencé notre parcours de Yumdwari.

Nous sentions que nous étions en train de nous rapprocher de notre but ultime, celui de faire le tour de Mont Kailāsa. Je récitais le nom de Śiva et chantais sa gloire. À cause de mon âge et de mes problèmes de santé, on m’avait empêché de faire ce parcours à pied mais, comme d’habitude j’ai foncé en m’abandonnant dans les bras de Śiva. De Dirapuk à Zultulpuk nous avons traversé Dolma La ‘Pass’ (Dolma La, nom tibétain pour la déesse Pārvathi) qui est à 5 630 mètres en hauteur. C’est la plus haute “pass”  sur le circuit du Mont Kailāsa. On ne pouvait aller jusqu’au bout à cause de la neige épaisse rendant les routes impraticables. Cependant, juste au moment où le soleil allait se coucher, j’ai pu enfin poser les yeux sur la demeure de Śiva et Pārvathi recouvert d’une épaisse couche de neige. Un point culminant de ma méditation. Nous y avons passé la nuit avant d’entamer le chemin du retour. Nous sommes retournés dans la salle d’attente de la petite héligare, qui se situe à proximité de Dolma La ‘Pass’, où nous avons passé deux nuits dans des dortoirs à la disposition des pèlerins. Durant une éclaircie, l’hélicoptère a pris son envol pour nous ramener au Népal, nous faisant vivre de nouveau des moments magiques. On a serpenté montagnes, forêts et collines offrant à notre vue l’œuvre de Śiva. Un moment de pur bonheur!

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