Cinéma et jeux vidéo : un mariage de raison encore difficile

Découvrir une aventure sur grand écran avant de la poursuivre sur sa console: ce réflexe fait partie depuis longtemps des habitudes des « gamers », mais les adaptations de films en jeux vidéo donnent parfois des résultats inégaux.

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Dernier exemple d’un transfert d’univers: le jeu Blair Witch, sorti pour célébrer les 20 ans du film à succès de la fin des années 1990, et qui replonge le joueur dans son ambiance angoissante.

Il ne sera pas seul: Star Wars: Fallen Order, inspiré de l’univers créé par George Lucas, et Marvel’s Avengers sont, entre autres, prévus dans les prochains mois.

Dans ces deux cas, le joueur connaîtra de nouvelles aventures, tout en restant dans un univers familier.

« C’est le type de jeu qui marche le plus souvent », souligne Fanny Renard, animatrice de communauté pour le studio indépendant Goblinz: « un même univers, parfois les mêmes personnages mais une histoire différente, qui vient compléter celle existante ».

Un choix assumé par les créateurs de Blair Witch qui se savent « attendus au tournant avec un film aussi emblématique ».

« Nous voulions développer notre propre histoire mais en gardant l’esprit du film. Le sentiment d’isolement est important, pris au piège sans savoir quoi faire », explique Barbara Kciuk, auteure principale chez Bloober Team, le studio en charge de l’adaptation.

– « une simple commande » –

Une logique également appliquée avec succès par LucasArts, la filiale vidéoludique de Lucas Films, les créateurs de Star Wars, dont plusieurs jeux, tels que les Jedi Knights ou Galactic Battleground, sont devenus des références.

Ce parti pris n’est pourtant pas celui de la majorité des adaptations de succès cinématographiques. Souvent trop proches du scénario du film, parfois bâclées, les adaptations, qui apparaissent dès le début des années 1980, sont rarement une réussite.

« Atari avait réalisé une adaptation du film E.T., un produit qui les a littéralement tués », rappelle Andrew Kitson, de Fitch Solutions. « Atari avait mis les moyens mais n’avait donné que cinq semaines aux développeurs et un brouillon du script du film pour travailler. Sans surprise, le jeu était pauvre et l’histoire très éloignée de celle du film ».

Deux ans après la sortie du film, le pionnier des jeux vidéo cessera de faire des consoles, avant de se vendre au japonais Namco en 1985.

« Le problème vient de la commande. Lorsqu’un jeu est une simple commande, il ne sera pas fait avec le même soin, on aura souvent une œuvre vidéoludique plus étriquée », souligne Laurent Michaud, directeur d’études pour l’Idate.

« Le développement du jeu commence tard dans le processus de production du film et des produits mal terminés sont mis en vente mais pour les studios peu importe, un mauvais jeu ne viendra pas entacher la réputation d’un film », ajoute M. Kitson.

– Le jeu vidéo investit le cinéma –

Si le cinéma voit surtout le jeu vidéo comme une source de revenus additionnels, il y cherche également de plus en plus de l’inspiration.

Depuis le milieu des années 1990, environ 150 films ont ainsi vu le jour en s’inspirant de jeux vidéo, de Doom à Mario Bros. en passant par Street Fighter ou Prince of Persia. Mais bien peu ont connu un réel succès, à l’exception sans doute des adaptations de Lara Croft (Tomb Raider), ou des Resident Evil, avec Milla Jovovich.

Certains éditeurs, comme le français Ubisoft, ont même décidé de lancer leur propre société de production afin d’adapter leurs licences en films ou séries.

Ubisoft a commencé en 2016 avec une adaptation de son jeu à succès Assassin’s Creed, un film qui n’a pas su convaincre la critique mais qui n’enlève rien aux ambitions du groupe: près d’une dizaine de films tirés de ses jeux sont prévus dans les prochaines années.

Pour l’heure cependant, le jeu vidéo n’a pas encore trouvé son œuvre cinématographique majeure, qui le ferait basculer, au même titre que la littérature, comme une source d’inspiration légitime.

« Le Seigneur des Anneaux a été adapté plusieurs fois au cinéma avant le succès de Peter Jackson, les précédentes versions n’étaient pas brillantes. Il a fallu le temps nécessaire, les bonnes technologies et le bon réalisateur, qui connaissait bien l’œuvre de J.R.R. Tolkien. Il en sera de même pour les adaptations de jeux vidéo », insiste M. Michaud.

els-dac/tq/spi

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