Collendavelloo : « La concrétisation du musée de l’esclavage est en bonne voie »

La concrétisation du musée de l’esclavage dans le bâtiment qui abritait anciennement l’hôpital militaire est en bonne voie. C’est la garantie donnée hier par le Premier ministre adjoint, Ivan Collendavelloo, qui se fait à ce propos porte-parole du Premier ministre, Pravind Jugnauth, absent de la cérémonie hier en raison d’une indisposition depuis son retour au pays. La cérémonie protocolaire pour célébrer l’anniversaire de l’abolition de l’esclavage hier a eu lieu dans le village du Morne, considéré par l’Unesco comme un village symbolique de la lutte menée par les esclaves marron. Ivan Collendavelloo a fait indirectement référence à l’affaire Gaiqui en affirmant que l’État sera « sans pitié contre tout employé des services de l’État qui piétine les droits fondamentaux des citoyens ». L’invité d’honneur initialement prévu pour la cérémonie, à savoir le Premier ministre de Jamaïque, n’a pu faire le déplacement, pas plus que sa ministre de la Culture, qui avait été pressentie pour le remplacer. Toutefois, deux représentants de Robben Island, qui est comme Le Morne un patrimoine mondial de l’humanité, étaient présents et ont présenté une exposition consacrée à cette île où Nelson Mandela et ses compagnons ont été incarcérés pendant quelque 25 ans.

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Abordant le dossier de la création du musée de l’esclavage, Ivan Collendavelloo s’est référé à la déclaration du père Romaine lors de la messe célébrée en l’église du St-Sacrement, à Cassis. Ce dernier avait fait un appel en faveur de la création d’un musée intercontinental de l’esclavage. « Je tiens à rassurer le père Romaine, la communauté des descendants d’esclaves et toute la population à ce sujet », a-t-il dit avant de rappeler qu’un budget pour la création d’un tel musée a été adopté dans le cadre de l’exercice budgétaire présenté l’année dernière par le Premier ministre et ministre des Finances, qui avait pris l’engagement de réaliser ce projet. « Ce musée n’est plus un projet ni un rêve : il devient réalité. L’argent a été mis de côté. Sa création fait partie des recommandations de la Commission Justice et Vérité. Il faut une plus grande visibilité de l’esclavage et de la traite négrière dans l’océan Indien. Il nous faut promouvoir l’histoire des esclaves et montrer la contribution de la diaspora africaine dans le développement du monde », a-t-il expliqué.

Selon Ivan Collendavelloo, ce musée reliera des pays comme Maurice, le Mozambique et Madagascar, qui faisaient partie du réseau du commerce d’esclaves entre les 18e et 19e siècles. Parmi les attributions de ce musée figurent l’étude de l’esclavage et de la traite négrière et l’obtention des documentations ainsi que la création d’un catalogue d’artefacts liés à l’esclavage dont la préservation doit être assurée. Le musée disposera d’une exposition permanente, organisera plusieurs expositions itinérantes et aura un rôle à jouer dans l’éducation et l’histoire. Il s’agira de développer un curriculum afin de développer du matériel éducatif et pédagogique sur l’esclavage et développer un programme éducatif. Le musée sera situé dans les locaux qui avaient abrité l’hôpital miliaire à Port-Louis, construit en 1740, soit l’un des plus anciens bâtiments à Maurice ayant occupé une place importante dans l’histoire des esclaves, qui l’ont bâti. De plus, ce lieu a accueilli les esclaves malades.

Le Premier ministre adjoint a également expliqué que l’hôpital militaire est devenu un patrimoine national et qu’il dispose d’un espace de 6 300 mètres carrés. La MPA a accepté de louer le site au ministère des Arts et de la Culture en vue de la création de ce musée. « Le Premier ministre m’a dit de vous donner l’assurance qu’il suivra personnellement de près ce projet appelé à devenir un centre de référence dans la région », a dit Ivan Collendavelloo.

Le Premier ministre adjoint a profité de l’occasion pour évoquer indirectement l’affaire Gaiqui. Il a ainsi expliqué que l’abolition de l’esclavage s’inscrit dans le cadre de la révolte des esclaves contre le piétinement des droits fondamentaux. « Ce combat n’a pas pris fin le 1er février 1835. Le Premier ministre, à son arrivée au pays, m’a dit sa détermination de s’assurer que personne ne piétine les droits fondamentaux des citoyens. Dans n’importe quel secteur du service public, si les enquêtes démontrent que des employés de l’État ont agi contre les droits fondamentaux des citoyens, l’État sera sans pitié et appliquera la loi afin de réprimer et d’empêcher la violation des droits fondamentaux des citoyens », a dit Ivan Collendavelloo.

Inscrivant la lutte des esclaves pour leur liberté dans un contexte international, il a ensuite rappelé que l’abolition de l’esclavage n’est pas le fait des Européens. Il l’a attribué aux « révoltes simultanées organisées dans plusieurs régions et plusieurs pays », dont Haïti, qui avait créé un premier « État libéré », mais encore la Jamaïque, où les esclaves avaient failli vaincre les forces britanniques. « Ici même, à Maurice, Ratsitatana, qui n’était pas un esclave, avait créé une révolte contre les esclavagistes. Il avait été arrêté et décapité par la suite. L’abolition de l’esclavage avait permis de s’assurer que cette pratique ne se termine pas dans un bain de sang. » Selon Ivan Collendavelloo, la fin de cette pratique n’avait cependant « pas mis un terme à la souffrance des descendants d’esclaves ». Sur le territoire mauricien, les esclaves étaient répartis à Maurice, à Rodrigues, à Agaléga et aux Chagos. « Aujourd’hui encore, le gouvernement lutte pour la décolonisation complète de son territoire et pour qu’il puisse exercer son droit de souveraineté sur l’archipel des Chagos. » Et d’affirmer que le Premier ministre lui a parlé du soutien obtenu des membres de l’Union africaine a ce sujet et a demandé que les membres du corps diplomatique soutiennent Maurice dans son combat alors que la Cour internationale de justice s’apprête à se pencher sur les revendications mauriciennes.

Pour sa part, le ministre de la Culture, Pradeep Roopun, a évoqué la contribution des esclaves dans la construction de Maurice. « Nou pa kapav blie ki bann esclav finn parmi bann premie abitant nou zil. Zot ti prezan depi lepok Olandai, plus ki 300 an de sela. E se zot ki ti tap premie kout pioss e ki ti koumans defrechi la fore pou fer develpoma », a-t-il lancé avant d’estimer qu’en « cette année où nous célébrons le 50e anniversaire de notre indépendance, il est important de reconnaître que les esclaves et leurs descendants, génération après génération, ont apporté une grande contribution dans le développement de Maurice et ont aidé à transformer le pays en un pays d’avenir ». Et de poursuivre : « L’empreinte des esclaves, leur sueur et leur sang sont présents dans chaque mètre carré de la terre de la République. C’est un fait historique que personne ne peut effacer. »

La cérémonie a pris fin avec un spectacle culturel de haut niveau concocté par la troupe de danse de Stephan Bongarçon et l’inauguration d’une exposition consacrée à Robben Island en présence du Premier ministre adjoint, du ministre mentor, sir Anerood Jugnauth, du ministre de la Culture et d’autres personnalités.

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