Commission d’enquête : Gurib-Fakim acculée sur la Platinum Card de Sobrinho

  • Le président de la commission d’enquête à l’ex-présidente: « Plus de 75% de l’argent utilisé avec la carte de crédit ont trait à vos achats personnels ? »
  • Ameenah Gurib-Fakim : « Aucune implication dans l’octroi d’une “investment banking licence” au groupe Sobrinho »

Après le grand déballage de l’ex-présidente de la République, Ameenah Gurib-Fakim, c’était hier après-midi au tour du Senior Puisne Judge Asraf Caunhye, présidant la commission d’enquête, de la confronter à une série de questions. Cette commission d’enquête vise à établir si elle a violé l’article 64 de la Constitution en annonçant l’institution d’une commission d’enquête dans le sillage de l’affaire Platinum Card.

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Face aux questions du SPJ Caunhye au sujet de l’utilisation de la Platinum Card offerte par Planet Earth Institute (PEI) du milliardaire Angolais Alvaro Sobrinho et sur ses relations avec ce dernier, Ameenah Gurib-Fakim devait insister n’avoir « jamais bénéficié des fonds de PEI » et qu’elle n’a « aucune implication dans les démarches pour l’octroi d’une “investment banking licence” à l’ASA Group ». De ce fait, elle contredit les propos de Dass Appadu, son ex-secrétaire, sur son rôle en tant que facilitatrice pour le groupe d’Alvaro Sobrinho.

Lors de cette nouvelle audition d’Ameenah Gurib-Fakim, le SPJ Asraf Caunhye, assisté par les juges Nirmala Devat et Gaytree Jugessur-Manna dans cette commission d’enquête, a voulu dans un premier temps en connaître un peu plus sur la riche carrière de l’ex-présidente de la République comme scientifique et entrepreneuse, avec notamment de nombreux titres et des reconnaissances à travers le monde. Elle a rappelé avoir plus d’une centaine de publications sur des recherches scientifiques à son actif. Le président de la commission d’enquête est ainsi arrivé à la conclusion qu’elle est un « high calibre person, mature and experienced » et qu’elle était ainsi censée avoir assez de discernement pour ne pas s’engager dans des actions non conformes aux règlements.

Asraf Caunhye (A.C) : Donc, selon votre riche carrière, vous avez attribué beaucoup d’importance à votre serment comme présidente de la République ?

Ameenah Gurib-Fakim (A.G.F) : Bien sûr.

A.C : Quand vous assumiez vos responsabilités comme présidente de la République, vous aviez compris qu’elles étaient vos fonctions ? Qu’avez-vous fait pour vous assurer que vous alliez respecter votre serment ?

A.G.F : Le 8 juin 2015, j’ai obtenu une copie de la Constitution par le secrétaire à la présidence pour avoir une idée de mes prérogatives, mais je n’ai pas vraiment reçu de “briefing” sur mes fonctions et mes responsabilités.

A.C : Mais vous pouviez comprendre quelles étaient vos fonctions et qu’une fois en poste, vous ne pourriez assumer un autre poste ? »

A.G.F : Oui.

A.C : Donc, vous agissiez en fonction des avis du conseil des ministres ?

A.G.F : On discutait de toutes mes actions prises avec le Premier ministre les jeudis. Il approuvait ce que je faisais.

Par la suite, Gurib-Fakim a été interrogée sur ses réticences par rapport à un article de presse concernant ses dépenses faites avec la carte de crédit avec une limite de Rs 1 M que lui avait offerte Planet Earth Institute (PEI). Le SPJ Caunhye voulait plus d’éclaircissements sur ce que l’ex-présidente contestait dans cet article.

A.G.F : Je conteste le fait qu’il a été dit que j’ai bénéficié des fonds de Planet Earth Institute. Je n’ai jamais reçu de rémunération de PEI ni d’autres institutions.

A.C : Mais Alvaro Sobrinho avait bien signé pour que vous ayez accès à ces cartes de crédit ?

A.G.F : Oui, il devait le faire car cela faisait suite à un accord avec PEI et la Bill Gates Foundation dans le cadre d’un PhD Programme pour la promotion des sciences.

A.C : Est-ce vrai de dire que les cartes de crédit avaient été utilisées essentiellement pour couvrir vos frais de voyage et les dépenses logistiques lors de vos missions à l’étranger sur le compte de PEI ?

A.G.F : Oui, en partie. Toutefois je tiens à préciser que je n’ai reçu qu’une carte de crédit et non deux comme il est indiqué dans l’article de presse.

A.C : Vous serez surprise si je vous dis qu’après avoir procédé à des calculs, il a été trouvé que plus de 75% de l’argent utilisé avec la carte de crédit ont trait à vos achats personnels ?

A.G.F : C’est probable, mais il y avait aussi d’autres coûts, notamment des frais d’hôtels pour animer des conférences.

A.C : Qu’avez-vous trouvé d’infondé et de faux dans l’article de presse ?

A.G.F : Je tiens à préciser que c’étaient des “grants” obtenues et j’étais redevable pour toutes sommes dépensées. J’avais à rembourser toutes les sommes débitées pour mes dépenses personnelles par la suite.

Activités au sein de PEI

A.C : Vous n’aviez aucun soupçon sur Alvaro Sobrinho ?

A.G.F : Je l’avais rencontré en juillet 2015 lors d’une conférence de PEI, accompagnée de Dass Appadu. Alvaro Sobrinho et Mauricio Fernandes (ex-CEO de PEI) sont par la suite venus à Maurice en août 2015.

A.C : Quel était l’objet de la visite d’Alvaro Sobrinho à Maurice ?

A.G.F : Nous avons discuté du PhD Programme et nous étions d’accord sur le fait que Maurice pouvait être une référence pour la promotion des sciences.

A.C : Quel rôle avez-vous joué en tant que présidente de la République pour faciliter l’octroi d’une “investment banking licences” au groupe Sobrinho ?

A.G.F : Je n’ai jamais été impliquée dans un quelconque projet d’investissement ou pour l’octroi d’une “investment banking licence”.

A.C : Vous n’êtes jamais intervenue pour faciliter l’octroi d’une “banking licence” ou pour l’acquisition de terres pour l’Alvaro Sobrinho Africa Group ?

A.G.F : Je ne suis jamais intervenue pour cela.

Dénonciations de Dass Appadu

A.C : Votre ex-secrétaire, Dass Appadu, a soutenu que vous lui aviez donné des instructions pour appeler le CEO de la FSC pour avoir des détails sur les démarches de l’ASA Group en vue de l’obtention de “banking licences”.

A.G.F : Je n’ai jamais donné de telles instructions. Ce sont des mensonges. Mon unique intérêt était de promouvoir le PhD Programme, rien de plus.

A.C : Dass Appadu a donné moult détails sur la nature de vos relations avec Alvaro Sobrinho et Mauricio Fernandes, dont vos demandes pour l’extension de “VIP facilities”.

A.G.F : Je n’ai donné que deux instructions pour des “VIP facilities”. La première fois, c’était lors du lancement de PEI à Maurice et la seconde lorsque des représentants de PEI m’ont rendu visite, en février 2017. Les autres demandes de “VIP facilities” ne sont pas passées par mon bureau.

A.C : Dass Appadu a soutenu que vous aviez fait des “express requests” pour des “VIP facilities” à Alvaro Sobrinho et aux membres de PEI. Et qu’en octobre 2016, vous avez fait une demande au Chief Executive du PMO pour qu’il accorde l’accès VIP aux membres de PEI.

A.G.F : Ce sont des mensonges flagrants de Dass Appadu.

A.C : Quel était votre rôle en tant que présidente de la République de Maurice lors d’un sommet de l’Union africaine comprenant une dizaine de chefs d’État ?

A.G.F : C’était un forum pour discuter des projets continentaux.

A.C : Ne vous êtes-vous pas embarquée dans un lobbying pour PEI afin de permettre que des fonds soient crédités dans un “escrow account” à la Barclays Bank ?

A.G.F : Le but de ce sommet d’État concerne également la mobilisation des fonds pour des projets continentaux.

A.C : Une somme de Rs 3 748 751 avait été créditée sur ce compte bancaire à la Barclays Bank au nom de la PEI Foundation. Etes-vous au courant que cette somme a été utilisée pour financer vos déplacements à l’étranger avec votre délégation et qu’aucune somme n’a été utilisée pour des causes philanthropiques ?

A.G.F : Ce compte bancaire avait été ouvert par Dass Appadu, et de ce que je sais, une certaine somme avait été utilisée pour les déplacements concernant des “board meetings”.

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