CONFLUENCES : Tous ensemble, nous serons plus forts sur le transport et les prix des livres, selon Marie-Noëlle Perrine

Confluences a permis, pour la première fois, à La Réunion des Livres, de se faire connaître à Maurice. Créée en 2007, cette organisation regroupe maisons d’édition, bibliothèques, librairies et toutes les professions qui oeuvrent autour du livre avec bien sûr les auteurs, les professionnels de la lecture et les éditeurs soutenus par ces organisations afin notamment de promouvoir la littérature, d’encourager la coopération éditoriale régionale, et aussi de développer les rencontres littéraires entre les artistes et les différents publics, en particulier les enfants.
La Réunion des Livres est une association interprofessionnelle des métiers du livre qui a été initiée par le documentaliste Yannick Le Pohan, qui était notamment à l’origine de diverses manifestations autour du livre à La Réunion. Aujourd’hui présidée par Marie-Noëlle Perrine, cette organisation disposait d’un espace central au Salon international du livre, tout près du podium où s’est tenu l’essentiel des conférences, colloques et tables rondes. Les visiteurs ont ainsi pu découvrir de nombreux ouvrages édités à La Réunion, à Madagascar et à Maurice.
Cette association s’est par exemple intéressée à Amarnath Hossany à travers l’éditeur réunionnais Orphie qui publie depuis plusieurs années les ouvrages Jeunesse, du presque seul écrivain mauricien spécialisé dans ce domaine, Margareth Li Yin, et Nazal Rosunally mis à part. Amarnath Hossany a ainsi pour la première fois eu la possibilité d’animer des ateliers d’écriture autour de ses propres livres avec des petits Réunionnais dans le cadre scolaire et en bibliothèque, opportunité qui ne lui est que rarement offerte à Maurice, et jamais de manière aussi cadrée et organisée. Aussi peut-être cet auteur mauricien est-il plus connu des jeunes lecteurs réunionnais que des jeunes lecteurs mauriciens en raison de ces activités et de la maison d’édition qui a choisi de la soutenir dans l’île soeur.
« Nous sommes là, nous explique Marie-Noëlle Perrine, pour encourager l’écriture, la valoriser, et aussi la faire sortir de nos îles… Nous nous appuyons aussi sur les salons nationaux comme le Salon du livre à Paris, le Salon Jeunesse de Montreuil ou encore Étonnants voyageurs, Ouessant, etc. Nous nous associons aussi aux manifestations culturelles qui dépassent le cadre strict des livres, comme le festival musical Sakifo, les festivals pour la jeunesse tels que Allon zenfan au Séchoir ou encore Zetinsel pour les 0 à 6 ans, à l’Entre-Deux. »
Encourager la création
Cette association essaie de créer du lien entre les lecteurs et le monde éditorial. La littérature Jeunesse a explosé à La Réunion, encouragée aussi par un Salon du livre qui se consacre régulièrement à ce type de livre. Et si en littérature adulte, il y a du chemin à parcourir par rapport par exemple aux nombreux auteurs mauriciens et malgaches qui sont édités par les grandes maisons d’édition, La Réunion des Livres se maintient en quête de projets éditoriaux novateurs qu’elle ne manque pas de soutenir et d’encourager par ses diverses actions. Elle présente des nouveautés et encourage la création, à l’instar par exemple du poète comorien Papana, des éditeurs Coccinelle et Petite scène qui bouge sur cet archipel, et des adhérents de l’association des éditeurs de Madagascar, les auteurs indépendants et toutes petites structures comme celle qui a lancé récemment un livre musical réunionnais.
Par sa présence à Maurice, cette organisation a pu s’approcher un peu plus de ses ambitions régionales, ne serait-ce qu’en rencontrant les éditeurs mauriciens, certains Malgaches présents qu’ils ne connaissaient peut-être pas encore et nombre d’auteurs mauriciens. « Nous nous inscrivons vraiment dans le soutien aux éditeurs, reprend pour nous Marie-Noëlle Perrine. Nous animons le livre, nous le faisons connaître et nous voulons donner envie de le lire. Sur le plan régional, et en ce qui concerne l’économie du livre, nous estimons que si nous sommes tous ensemble, nous serons plus forts sur le transport, la diffusion et les prix des livres. Aussi avons-nous la vocation et les moyens de faire la promotion de la zone océan Indien et des ouvrages qui y sont publiés ici et ailleurs dans le monde francophone. »
Les représentantes de La Réunion de Livres organisent aussi des activités de valorisation du livre dans les bibliothèques publiques, ainsi que dans les établissements scolaires. « Même si le pouvoir d’achat est d’une manière générale plus fort à La Réunion qu’à Maurice, reprend notre interlocutrice, nous sommes quand même confrontés chez nous à la problématique du prix unique, qui est le même qu’en métropole, avec en plus le coût du fret qui représente un surcroît de 1,46 % sur les prix. Compte tenu non seulement du pouvoir d’achat mais aussi et surtout de l’illettrisme encore très présent, il importe particulièrement de favoriser l’accès gratuit au livre, l’adhésion aux bibliothèques et médiathèques en soutenant ces dernières. Nous avons à La Réunion énormément de jeunes en grande difficulté. »
Appartenances régionales
Bien sûr dans le contexte spécifique du département d’outre-mer qu’est La Réunion, une telle organisation ne pouvait exister sans se positionner clairement sur la question linguistique ainsi que sur la question de l’identité et de la culture réunionnaise. Si ses représentantes défendent les ouvrages en français, elles le font tout autant pour la littérature en créole, en veillant notamment à ce que cette langue ne soit pas folklorisée comme c’est souvent le cas dans certains médias réunionnais. « Le créole n’est pas une langue tout à fait à l’honneur à La Réunion dans la vie de tous les jours, estime Marie-Noëlle Perrine. On peut facilement se sentir à La Réunion dans l’esprit d’un rapport dominé/dominant. C’est souvent très duel. Le français domine et l’approche du créole par les médias a souvent tendance à folkloriser la langue et à la traiter comme un épiphénomène, une spécificité secondaire. Pourtant, le créole réunionnais est en soi un magnifique creuset de créativité comme l’ont prouvé et le prouvent toujours nos grands poètes et chanteurs qui animent régulièrement des kabar et du fonker… des gens comme Axel Gauvin, Patrice Treuthard, Teddy Affar, Danyel Waro, etc. Là encore, je crois que nous parviendrons à progresser à La Réunion dans la valorisation de la création en créole réunionnais et de l’identité réunionnaise, grâce à la région. C’est par ce biais que nous pourrons mettre nos langues en valeur, aux côtés des Malgaches, des Mauriciens, Comoriens, Mahorais et Seychellois. Nous avons certes le français en commun, mais nous avons aussi nos langues créoles, le malgache, les langues de l’archipel comorien et celles qui sont pratiquées à Maurice… Nous envisageons la création littéraire de sorte que les langues ne soient pas un problème. On doit pouvoir aussi au sein de La Réunion des livres défendre ses appartenances et toutes les langues humaines de la région, le français comme la langue maternelle. » Inscrite dans une démarche créative, accessible à tous tant sur le plan de la création que de la lecture, La Réunion des Livres agit en tant que maillon facilitateur !
La Réunion des Livres est physiquement basée à Saint-Denis dans un espace qu’elle partage avec la Lanterne magique, une association qui oeuvre à la vulgarisation du cinéma. Renseignements sur Facebook, sur www.lrdlL.re ou encore contact@lrdl.re

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