POUR UN CONSEIL DES MINISTRES MAURICIEN : M. le Premier ministre, croyez-vous vraiment dans l’égalité des chances ?

Navin Ramgoolam en est à son troisième mandat comme Premier ministre à la tête du pays. Et je n’ai toujours pas compris pourquoi Nita Deerpalsing, Stéphanie Anquetil et Reza Issack ne sont pas encore ministres. Nonobstant les écarts de langage, frisant souvent la démagogie, de la première, qu’est-ce qui explique que Nita n’ait jamais été ministrable ? Quid de Stéphanie Anquetil, porteuse d’un nom illustre qui a fait la gloire du Parti travailliste, alors que Reza Issack a fait ses preuves comme lord-maire, député et PPS ?
Une première voix me soufflerait : « Le conseil des ministres n’a que faire des gens intelligents. Il suffit d’être de la bonne caste et communauté… » Soit. Mais alors que Patrick Assirvaden brandit les résultats du sondage entrepris par DCDM, pour le compte d’un journal, et qui place le Premier ministre « comme le Premier ministre des Mauriciens », quand va-t-on justement tenir compte de l’avis (ou du voeu) des Mauriciens ?
Je n’en ai rien à faire de la caste/communauté de Nita Deerpalsing, Stéphanie Anquetil ou Reza Issack. Tout ce que je sais, c’est que le Premier ministre n’a rien à perdre en injectant du sang neuf (et purement “rouge”, si vous voyez ce que je veux dire) au sein de son gouvernement. A ce jour, Duval, Beebeejaun et Bachoo feraient office de pantins ethniques, ou de numéros communautaires, et jusqu’à preuve du contraire, les Créoles, les musulmans et les Hindous ne sont pas mieux lotis malgré la présence « rassurante » de ces trois personnes aux postes de Vice-Premiers ministres.
Or, si le sondage DCDM dit vrai, et que Navin Ramgoolam serait vraiment « le Premier ministre des Mauriciens », pourquoi ne pas tenir compte de l’aspiration des Mauriciens, non représentés au conseil des ministres, puisqu’y siègent des Hindous, déclinés en Marathi, Tamoul, Télougou, Vaish, des Musulmans, un Créole, et un « Sino/Population Générale » ?
Une deuxième voix me soufflerait : « Il ne reste que deux ans à Ramgoolam pour boucler son mandat. Il ne peut prendre le risque de mettre son gouvernement en minorité. »
Pas faux. Mais n’est-ce pas se tirer des balles dans le pied, au vu de ce qui se passe, d’aller jusqu’en 2015 avec des ministres qui commettent bourdes sur bourdes ? Prenons Anil Bachoo. Cela ne gêne nullement ce monsieur qu’il soit appelé « Pandit », semble-t-il, alors qu’il est payé des fonds publics, c’est-à-dire de la poche de tous les Mauriciens. Pire, quand des responsables d’associations « socioculturelles » prennent position en sa faveur, il se croit obligé de parler de « religion ». Anil Bachoo, votre salaire, puisé de la poche des contribuables, vous donne-t-il le droit de parler de religion ? Je suis bien placé pour savoir que vous maîtrisez les livres sacrés hindous, mais est-ce une raison pour oublier votre tâche première : être ministre pour tous ?
François Hollande, au plus bas dans les sondages en France, après un an de mandat, parle déjà de remaniement. Ici, malgré de grossiers écarts, des ministres seraient « indéboulonnables », à cause de leur carte ethnique ! Or, Navin Ramgoolam lui-même, prenant la parole à une cérémonie marquant le 60e anniversaire de l’Union Tamoule, a « exprimé ses réserves au sujet de la multiplication des centres culturels et a tiré la sonnette d’alarme contre le risque de balkanisation ». Soit vous êtes effectivement sincère quand vous dites cela, M. le Premier ministre, soit vous prenez les Mauriciens, c’est-à-dire ceux qui ne sont pas représentés au conseil des ministres, pour des demeurés !
J’en ai donc marre de savoir qu’une Nita Deerpalsing, un esprit brillant, ne peut être ministre en lieu et place de Xavier Duval ou Anil Bachoo. Que Stéphanie Anquetil ne peut pas remplacer Sheila Bappoo ou Mireille Martin, et que Reza Issack ne peut être à la place de Rashid Beebeejaun ou Jim Seetaram. Jusqu’à quand donc cette comédie de dupes va-t-elle durer, M. le Premier ministre ? Quand vous frayez aux côtés des grands de ce monde, qu’ils s’appellent Chirac, Obama, Blair, Cameron, Mukherjee, vous reçoivent-ils en tant que « Vaish », » Hindou » ou Premier ministre de tous les Mauriciens ? Quand des inondations meurtrières ont fait onze morts à Port-Louis, et quand un autobus de la CNT cause la mort de dix personnes, lisez-vous dans la presse que des « Créoles, Hindous, Musulmans, etc » ont péri dans ces accidents ?
Non, M. le Premier ministre, la nation toute entière (incluant la presse bien sûr) a pleuré pour ses morts, indistinctement de leur caste et communauté. Les larmes ont coulé tant pour le chauffeur et les passagers de la CNT que pour ceux qui ont péri dans le parking souterrain du Harbour Front, le tunnel du Caudan ou derrière le KFC. Et savez-vous pourquoi les Mauriciens sont comme ça ? Parce que voyez-vous Navin Ramgoolam, et Alain Gordon-Gentil, votre ami et conseiller, peut en témoigner, lui qui aime souvent citer Jacques Brel, « on n’a que l’amour à offrir en partage ».
N’est-ce donc pas honteux que seul le conseil des ministres, censé chargé de s’occuper du destin de la nation, serait plus préoccupé par le levain de la division que par le pain de l’unité ? Si donc vous croyez vraiment dans l’égalité des chances, l’Equal Opportunity, donnez donc la chance aux représentants des Mauriciens de siéger au conseil des ministres. Ainsi, je dormirai content que vous pensiez également à ceux qui n’ont que « l’amour à offrir en partage » !

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