Copropriété des immeubles à Maurice : Entre le droit de propriété et l’intérêt collectif

Chaque année, depuis trois ans, l’Institute for Judicial and Legal Service, avec le soutien et la coopération française et l’appui technique de la Faculté de droit de La Réunion, organise des journées de rencontres et d’échanges entre les professionnels du droit de Maurice et de La Réunion. Ces ateliers sont l’occasion de confronter leurs points de vue, d’identifier des difficultés, d’échanger et de débattre. Cette année, le choix s’est porté sur la copropriété des immeubles bâtis. Le doyen honoraire de la Faculté de droit et d’économie de La Réunion et directeur du Diplôme universitaire de droit civil mauricien, Jean Baptiste Seube, ont abordé les lois en France et à Maurice et les difficultés auxquelles nous sommes confrontés. « Il faut trouver le juste milieu entre la préservation du droit de propriété privée et la satisfaction d’un intérêt collectif. Mais ce juste équilibre est bien délicat à trouver », disent-ils.

- Publicité -

Face à la pression démographique et l’urbanisation croissante, indique le Pr Seube, il a fallu construire des immeubles collectifs. Les pouvoirs publics ne sont évidemment pas restés insensibles face à cette nouvelle réalité sociale. Ainsi, la copropriété, souligne le Pr Seube, est profondément enracinée dans les besoins actuels de la société Mauricienne. La France, dit-il, a voté sa loi sur la copropriété en 1965 et Maurice, en 1966. « Les deux lois sont très proches, mais cependant différentes. Si la loi française est devenue une sorte de maquis impénétrable, la loi mauricienne, elle, a conservé, en dépit de sa complexité, une plus grande cohérence», a fait ressortir l’intervenant. Le Pr Seube indique que la loi mauricienne possède 90 articles qui contiennent à la fois des règles très techniques et très pratiques, et des règles qui rejaillissent sur des notions fondamentales, telle la propriété, la personnalité juridique ou encore l’action en justice. Malgré ces différences, le succès de la copropriété est assuré dans nos deux pays. Il répond, à Maurice, aux programmes IRS, mais aussi à l’érection des Smart Cities. Il y a donc un avenir radieux pour la copropriété. Mais en dépit de cet avenir radieux, le succès de la copropriété est peut-être menacé : le droit de la copropriété répond à des attentes.

Le directeur du Diplôme universitaire de droit civil mauricien est d’avis qu’il faut trouver « le juste milieu » entre la préservation du droit de propriété privée et la satisfaction d’un intérêt collectif. Mais ce juste équilibre, dit-il, « est bien délicat à trouver ». Il y a en effet, selon lui, des difficultés telles que de savoir quelle est la juridiction compétente. Il convient aussi de savoir quels sont les délais pour agir et quelle est la nature des actions que l’on peut intenter et qui peut en être demandeur. « Dans l’analyse unitaire, d’inspiration germanique, les copropriétaires sont comme des indivisaires. Ils exercent des droits concurrents sur l’immeuble mais bénéficient de droits de jouissance exclusifs sur une partie de cet immeuble. Dans l’analyse duale, d’inspiration latine, les copropriétaires ont un droit composite. Ils bénéficient d’une partie privative, à laquelle se trouve annexée une quote-part des parties communes », a soutenu le Pr Seube.

Il a aussi fait allusion au rôle des syndicats des immeubles. « La deuxième difficulté théorique, dit-il, c’est cette étrange personne morale que constitue le syndicat des copropriétaires. » Alors que la profession est réglementée en France, elle est libre à Maurice. L’absence de professionnalisation du syndic serait une des raisons de l’échec du modèle anglais de la copropriété, si proche du nôtre.

À noter que lors de ce colloque, les lauréats de la 2e promotion du Diplôme universitaire de droit civil mauricien ont été récompensés. Ce Diplôme universitaire, copiloté par l’IJLS et la Faculté de droit de La Réunion, soutenu par la coopération française, existe depuis 4 ans. Il est né du constat que de plus en plus de professionnels allaient faire leurs études à Londres et que, lorsqu’ils revenaient au pays, ils s’apercevaient qu’il y avait des pans entiers du droit mauricien, issus du droit civil, qu’ils ne maîtrisaient pas assez. Ces étudiants ont suivi des cours en français, ont rédigé un mémoire en français et ont subi des examens en français.

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour

- Publicité -