Cour international de justice — Chagos : « La voix de Liseby Elysé ne peut être occultée »

Namira Negm (UA): « The humanitarian sufferings as a result of the continued colonization of Chagos is a human rights law matter, an international humanitarian law issue »

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L’Advisory Opinion sur les Chagos mise en délibéré par la Cour internationale de justice à l’issue des auditions d’hier, le Ruling étant annoncé pour la fin du premier trimestre 2019

L’Union africaine a mis l’accent sur la souffrance humaine engendrée par le détachement des Chagos du territoire de Maurice en 1965 et le déracinement des Chagossiens de leur archipel natal. Certes, dans la première partie de leur exposé oral, hier, en conclusion aux auditions de la Cour internationale de justice, les représentants de l’Organisation panafricaine, Namira Negm, ambassadeur et conseillère juridique, Mohamed Gomaa, conseiller juridique et Makane Moïse Mbenger de l’Université de Genève, ont explicité en complément aux exposés en écrit « la cristallisation du droit à l’autodétermination comme règle du droit international coutumier en 1965 ».

Mais la flèche du Parthe ciblant les Anglais a été tirée par la cheffe de la délégation de l’Union africaine, Namira Negm, s’exprimant au nom des 55 États africains. Elle est revenue sur le poignant témoignage de la Chagossienne, Liseby Elysé, en ouverture des travaux, lundi dernier. D’autre part, la CIJ, présidée par Andulqawi Ahmed Yusuf de la Somalie, a situé l’Advisory Opinion sur les effets juridiques du détachement des Chagos de Maurice en 1965. En principe, la publication des attendus de cette décision est annoncée pour la fin du premier trimestre de 2019. À 18h25 (heure de Maurice), le président de la Cour de La Haye a clos la session en annonçant que « the Registrar will in due course inform all participants and all members of the United Nations General Assembly of the date and time when the Court is to announce its opinion ». Auparavant, il avait remercié tous les participants engagés dans cette procédure.
Après avoir fait la démonstration de l’illégalité en droit international de l’Order in Council des Britanniques du 8 novembre 1965, confirmant l’excision de l’archipel des Chagos, l’Union africaine souligne que « tous les discours savants devant la Cour internationale de justice ne doivent pas faire taire la voix de Liseby Elysé ». Cette dernière, présente à La Haye, avait témoigné par le biais d’une vidéo sur le drame humain des Chagossiens. « All the statements we heard this week could not and should not stop us from hearing the voice of Ms Elysé… which shows the humanitarian sufferings as a result of the continued colonization of Chagos », a affirmé Namira Negm alors qu’elle entamait la conclusion de son exposé.

« This is a human rights law matter, this is an international humanitarian law issue not only a subject of colonization. This is a voice to be heard, it is not only the voice of Ms Elysé or the Chagossians, this is the voice of justice, self-determination…ending colonization… which should not be forgotten during the Court’s deliberations because it is the voice of a continent that has suffered from colonization; it is the voice of Africa », devait faire comprendre la Legal Counsel de l’Union africaine sur le dossier des Chagos. « La voix de Liseby Elysé ne peut être coccultée », dit-elle en substance. Systématiquement, elle a rappelé que le point de vue de l’Union africaine sur le processus de décolonisation non-complété de Maurice, avec le démantèlement de son territoire par les Anglais, représente celui des 55 Etats-membres de l’Union africaine entre autres.

L’Union africaine poursuit que dans la conjoncture, le Royaume Uni n’a qu’un seul et unique choix. « We reiterate that the best contribution the United Kingdom can provide to the African continent is to instantly – today, not tomorrow – free Chagos and acknowledge the right to return of the Chagossians », dit Namira Negm. Elle ne manque pas d’ajouter que « this feels like an episode of the dark inconsistent history. It hurts to come in the twenty-first century before Your Honours to contest a call by a colonizer debating the consent of the colonized for keeping part of its territory, otherwise there would be no independence ».
L’Union africaine devait également stigmatiser la perfidie de Londres sur la question des Chagos. « A colonial power speaking about the free will of our colonized at the time they were under its power. Is history being rewritten? Or it’s that our countries had witnessed such freedom without our knowledge? More astounding that a colonizer is requesting the colonized to bring documents from its archives », s’est demandée la conseillère juridique de l’Union africaine.

Dans le cadre des procédures initiées devant la Cour internationale de justice, Maurice doit accomplir une dernière étape, soit répondre à la question du juge italien Giorgio Gaja. Celui-ci était intéressé de prendre connaissance du « will of the Chagossians » sur les développements envisagés. En principe, Maurice a jusqu’à 20 heures ce soir pour communiquer au Registrar du Tribunal de La Haye ses éléments de réponse.

Pravind Jugnauth: « J’ai de l’espoir que l’opinion sera favorable »
Le Premier ministre Pravind Jugnauth, qui a assisté à la dernière séance des auditions de la Cour internationale de justice, se dit optimiste quant à cette requête de Maurice pour une Advisory Opinion. « J’ai de l’espoir que l’opinion sera favorable », a-t-il indiqué en déclarant avoir suivi à distance le déroulement de ces auditions devant la Cour internationale de justice de La Haye même s’il était pris par ses missions à Beijing et à Paris.
«  C’est un moment historique d’être présent ici pour assister aux dernières interventions qui ont été extraordinaires. Non seulement parce qu’elles ont été favorables à Maurice mais aussi par la qualité des arguments et les points mis en avant », a dit le Premier ministre.
« L’intervention de l’Union africaine au nom des tous les pays de l’Afrique était extraordinaire. Maintenant les juges vont délibérer. Cela va prendre du temps pour éplucher tous ces arguments y compris ceux contre nous. Mais moi j’ai grand espoir. Nous bataillons pour une cause juste et légitime. La décolonisation de Maurice n’est pas complète en 2018 et je n’ai aucun doute, dans mon esprit, que l’opinion sera favorable », a-t-il conclu.

Philippe Sands QC : « The level of professionalism has been astonishing »
Le Leading Counsel de Maurice à La Haye, Philippe Sands QC, se félicite du déroulement des auditions qui ont eu lieu durant ces quatre jours.  « It is different from any case that I have worked before. I am working for an African country. It is not just commercial activities for a lawyer. There is a real commitment here to a much bigger cause. It is one of the reason I went to International Law to ensure that a greater sense of justice somehow emerge. But something very special happened to me this week in terms of what I saw in the Court. I am acting for an African country; Africa is a continent of many countries and faces many challenges. But I have never worked for a country in which the professionalism of the civil service and the organisation of people I have been priviledged to work with in the capital of Port Louis has been better. It is a level of professionalism that is astonishing for any country and that compounded with what happened in the Court this week », a-t-il déclaré hier soir. L’équipe légale de Maurice finalisera aujourd’hui ses Written Submissions pour répondre à une question du juge Gaja au sujet de la pertinence de la volonté des Chagossiens pour cette requête d’Advisory Opinion.

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