Cour suprême – NMH SAGA – Motion stratégique de l’ICAC enflammant les débats

La semaine marquée par l’objection de l’ICAC à la présence de ENL, Rogers et Swan aux côtés de la FSC

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ICAC : « The involvement of the third parties in the present matter will allow them at this stage to peek into the investigation where they themselves could be potential witnesses or suspects »

Le groupe ENL-Rogers-Swan : « L’enquête du Special Investigator Kriti Taukoordass a causé un préjudice grave aux “third parties”, à leur réputation, à leurs employés et à leurs intérêts commerciaux, notamment par sa fuite immédiate et illégale »

Les auditions autour de la NMH Saga en Cour suprême de mercredi à vendredi se sont déroulées sous haute tension, avec des débats enflammés. Deux motions étaient au centre des débats, soit la démarche stratégique de l’Independent Commission Against Corruption (ICAC) objectant à la présence de NMH, ENL, Rogers et Swan aux côtés de la Financial Services Commission (FSC) lors de ce procès. Ensuite, celle de la FSC réclamant l’annulation de l’ordre émis par le juge David Chan, qui avait ordonné à cette dernière de remettre tous les documents relatifs à la NMH Saga à l’ICAC. Cette dernière motion est soutenue par ENL Land Ltd, Rogers, Swan Life Ltd et NMH Ltd, qui s’opposent vivement à la remise du rapport du Special Investigator de la FSC, Kriti Taukoordass, à l’ICAC, un rapport qui contient des findings accablantes contre ces entités cotées en Bourse. Le ruling des juges Devat et Joseph sur la première motion a été mis en délibéré.

L’ICAC maintient sa demande d’accès au rapport d’enquête du Special Investigator de la FSC et s’interroge sur les arguments mis en avant pour contester les findings du rapport au sujet des infractions potentielles commises lors des transactions boursières du groupe hôtelier et l’OPA avortée de février 2016. En prélude aux débats à cette demande, l’ICAC a ouvert un autre front en objectant à la présence des parties prenantes, soit NMH, ENL, Rogers et Swan, qui se sont alignées sur la position de la FSC. Elle réclame que les protagonistes clés de cette NMH Saga « soient écartés » de ce procès en affirmant que seule la FSC est concernée par la demande de l’ICAC et non les compagnies qui sont ciblées directement par l’enquête initiée.

L’ICAC ajoute que le rapport Taukoordass, qui a été soumis au Board de la FSC du 25 mai 2017, contiendrait des éléments « cruciaux » sur les controverses autour des transactions boursières de NMH. L’ICAC veut puiser de ce rapport les facteurs sur lesquels le régulateur s’est appuyé pour « blanchir » NMH ou du moins les conditions dans lesquelles les manœuvres des actionnaires majoritaires de NMH ont été validées.
« Témoins potentiels ou encore des suspects »

Pour l’heure, la FSC n’a remis à l’ICAC que les documents liés à la supervision de ces transactions, mais a refusé de produire le rapport Taukoordass. L’ICAC a rappelé que « the FSC has agreed being in possession of the requested document, which is an interim report, but has, however, so far refused and failed to communicate  » Elle ajoute que « it is important for it to have the said interim report so as to enable its investigation on the NMH matter to progress ».

L’ICAC dit disposer d’informations suite à des témoignages de plusieurs protagonistes de la NMH Saga au sujet de l’existence de liens entre le groupe hôtelier et certaines personnes bien placées à la FSC. Selon l’ICAC, le régulateur des services financiers a modifié sa position à plusieurs reprises sur ce « deal » contestable de NMH, condamné notamment par des actionnaires minoritaires, mais aussi par les militants de Rezistans ek Alternativ. Au nom de l’ICAC, Me Atish Roopchand soutient que l’ordre du juge Chan est en conformité aux règlements et exige que NMH, ENL Land, Swan Life et Rogers ne soient pas partie prenante des délibérations. La raison principale est que ces entités pourraient devenir des « témoins potentiels ou encore des suspects ».
Tous derrière la FSC

De leur côté, les hommes de loi de NMH, d’ENL et Rogers expliquent que la FSC « ne peut procéder à la remise de ce document », car une médiation à huis clos avait été conclue à la Mediation Division en décembre 2018, mettant un terme au rapport du Special Investigator. Pour rappel, Rs 3 millions avaient été payées aux hommes de loi de Kriti Taukoordass par les compagnies qui s’étaient pourtant senties lésées par son rapport Ces actionnaires de NMH estiment qu’il y avait « fundamental breach of fairness and due process » dans la conduite de l’enquête par le Special Investigator au nom de la FSC.

Pour sa part, Me Désiré Basset, Senior Counsel, dont les services ont été retenus par la FSC, s’est vivement opposé à un quelconque rôle de l’ICAC dans la NMH Saga. La FSC a fait sienne l’argumentation de New Mauritius Hotels et ses actionnaires majoritaires, notamment, ENL Land, Swan Life et Rogers face à l’ICAC concernant le  handing-over  du rapport Taukoordass. La FSC a demandé à la Cour suprême de « set aside » l’ordre émis en juin 2018 par le juge Chan. Ellea aussi plaidé pour que cette motion de l’ICAC ne soit pas agréée par la cour. Pour Me Basset, l’ICAC « should disclose this case fully and fairly » et il ne suffit pas que la commission se cache derrière le fait qu’elle mène une enquête et mette en avant la confidentialité.

Feux de tout bois contre Taukoordass

Dans le même souffle, NMH, représenté par Me Anwar Moollan SC, ENL Land par Me Patrice Doger de Spéville SC, Swan Life par Me Rishi Pursem SC et Rogers par Me Salim Moollan QC ont ont tous soutenu les arguments de Me Basset en demandant des précisions sur le bien-fondé de cette enquête de l’ICAC en affirmant : « We support the motion made by the FSC. We oppose the motion of ICAC. »

Pour Me Salim Moollan QC, « la FSC a déjà désavoué le rapport Taukoordass. » Il a fait valoir que la FSC avait, en février 2017, confirmé qu’il n’y avait eu aucun acte répréhensible et qu’aucune autre mesure réglementaire n’était nécessaire. « Ce rapport a causé un préjudice grave aux third parties, à leur réputation, à leurs employés et à leurs intérêts commerciaux, notamment par sa fuite immédiate et illégale », a-t-il ajouté craignant que « the third parties now stood threatened with another ill-conceived investigation, this time by a regulator with no jurisdiction or expertise in financial market wrongdoing who is trying to rely on the discredited’draft report’without any heed to the flaws therein or the unlawfulness thereof ».

Les hommes de loi des groupes ENL Land Ltd, Swan Life Ltd et New Mauritius Hotels Ltd ont aussi pris pour cible le Special Investigator de la FSC. Me de Spéville a avancé que pour les « third parties », le rapport du Special Investigator était erroné et que ce rapport ne pouvait être remis à l’ICAC, car cela nuirait aux intérêts d’ENL et de Rogers. « La nomination de Kritinand Taukoordass était à l’origine non conforme à l’article 44 (a) de la Financial Services Act étant donné que sa nomination n’était pas conforme », et que le nominé de la FSC a mené son enquête sans que les parties concernées n’aient été entendues. « Kritinand Taukoordass n’est pas légalement qualifié et a pourtant été mandaté pour enquêter sur des questions réglementaires complexes et juridiques en vertu de la Securities Act », a-t-il soutenu.

Me Pursem a avancé que le Special Investigator a abusé de sa position et a poursuivi son enquête alors que sa nomination n’était pas conforme à la loi. « The investigation and the report were made without providing the facts giving rise to it. » Si l’ICAC mène une telle enquête, ce sera contre la règle d’équité, dit-il.
« Where is the report ? »

Intervenant à la fin des débats, l’avocat de l’ICAC s’est interrogé sur les réserves émises à l’encontre du Special Investigator et son rapport. « How come we’re discussing on M. Taukoordass in the absence of the report ? Flaws are now being identifi ed but where is the report ? ICAC doesn’t have the report. M. Taukoordass is not even a third party ». Il s’est voulu rassurant en affirmant que NMH, ENL, Swan et Rogers auront l’occasion de consigner leurs versions dans l’enquête diligentée par l’ICAC. « We are asking for the report in the course of the investigation. We are not asking it at this stage to prove a charge against any party », a-t-il conclu.

Les 6 points de l’ordre du juge David Chan

L’ordre émis par le juge David Chan, siégeant en référé, en date du 15 jun 2018, porte sur six points spécifiques. À partir de cette date, la Financial Services Commission disposait d’un délai de deux semaines pour remettre à l’ICAC les documents suivants :
l les procès-verbaux des réunions du board de la FSC avec à l’agenda la NMH Saga
l les rapports des comités qui avaient fait des enquêtes préliminaires sur cette affaire
l les correspondances, soit lettres ou messages électroniques, échangées entre stakeholbers et non seulement limitées à NMH, ENL Land Ltd, Swan Life et Rogers
l une liste complète de tous les plans de pension administrés par Swan Life à février 2016 et les underwriting conditions
l tous les documents soumis par Swan Life au terme des dispositions de la loi régissant les fonds de pension et
l tous les documents aux archives informatiques de la FSC par rapport à NMH en 2015, 2016 et 2017

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