Covid-19 et confinement : Les couacs de la communication officielle

C’est au jour le jour, et cela on peut le comprendre. On est en pandémie et en confinement général, mais la communication doit, elle, être vraiment informative, utile et persuasive. Or, depuis l’éclatement de la pandémie, il n’y a que des couacs au niveau de la communication officielle.

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Il y a certes eu des jours où cela a été acceptable et d’autres où on n’a pas trop compris le massage à faire passer ni le sens de certaines présences, comme celle de Joe Lesjongard. La présence du ministre du Tourisme, député du N°4 Port-Louis Nord/Montagne Longue, répondait visiblement à un besoin d’affichage, quelqu’un de son profil ayant cruellement fait défaut, selon les calculs de représentation scientifique, au plateau des intervenants sur le Covid-19.

Et ce jour-là, à ses côtés, il y avait bien, ce mercredi 25 mars, le ministre du Commerce et de l’Industrie, Yogida Sawmynaden, qui n’a pas eu un mot à dire alors que de nombreux consommateurs, surtout ceux qui ont fait preuve de comportement citoyen en ne vidant pas tous les jours les rayons des grandes surfaces, attendaient et attendent encore de savoir comment se réapprovisionner en produits de base, dont les aliments.

Une première mondiale
On ne reviendra pas sur la saga du jeu de cache-cache du Premier ministre et de ses rendez-vous manqués avec les médias la semaine dernière avec l’annonce du confinement assorti d’une ouverture partielle des commerces suivi, deux jours plus tard, d’une injonction contraire et brutale signant la fermeture de tous les commerces. Une première mondiale puisqu’aucun pays au monde n’a fermé tous ses points de commerce alimentaire. Il est évident que, malgré la horde de conseillers en communication de Pravind Jugnauth et de ses ministres, payés par les contribuables, la manière de communiquer sur la pandémie et de ses conséquences laisse toujours fortement à désirer.

Le point culminant de cette faillite de la communication aura été enregistré le jeudi 26 mars. Zouberr Joomaye, le candidat battu, devenu conseiller en stratégie bénévole de Pravind Jugnauth, choisi pour porter la parole officielle sur la pandémie en raison de son statut de médecin, avait tenu son habituel point de presse à la mi-journée pour annoncer que le nombre de cas testés positifs au Covid-19 était de 48. Soit 6 cas avérés de plus que la veille.

Or, branle-bas de combat quelques heures plus tôt avec la rumeur d’un possible point de presse du Premier ministre lui-même à une heure inconnue. Ce n’est que bien plus tard que la presse apprendra que Pravind Jugnauth allait procéder à une allocution télévisée à 19h30. La pandémie avait connu un pic de progression, plus 33 pour totaliser 88 cas dans la même journée qui justifiaient, certes, cette intervention impromptue mais, n’aurait-il pas été plus judicieux que le point de presse quotidien soit décalé et qu’il intervienne après que les tests du jour eurent été complétés et leurs résultats obtenus et confirmés avant de venir avec des chiffres, pour ne pas les voir pratiquement doubler en quelques heures ?

Le piètre communicateur
Quant à la story invraisemblable de l’approvisionnement, l’échec des autorités et du ministre Yogida Sawmynaden aura été tout aussi patent. Il a peut-être été lui-même pris de court pas l’annonce son chef de tout fermer le 24 mars sans l’assortir de conditions afin que la population n’en soit pas pénalisée et privée du gaz et des denrées de base. Rien de la part des autorités jusqu’au lendemain, où c’est le plus piètre communicateur du gouvernement, Renganaden Padayachy, qui a été envoyé au front pour tenter d’apaiser une frustration qui gagnait en intensité.

Tout le monde a eu l’occasion de le voir à l’Assemblée nationale. Il n’a ni le vocabulaire ni les outils qu’il faut pour bien communiquer. Autant le laisser, de temps en temps, lire ses classiques de licence en économie si cela peut lui donner l’illusion d’être celui qui est aux commandes de la trésorerie nationale. En bon ancien cadre de la Chambre de Commerce et d’Industrie, c’est évidemment vers elle que le nouveau ministre des Finances s’est tourné pour explorer des voies de sortie de cette impasse. A ainsi été annoncé un système de commandes en ligne auprès de cinq fournisseurs avec paiement électronique. Une initiative déjà prise par la compagnie Proxifresh, producteur et distributeur de produits de l’agriculture raisonnée.

Pour les plus démunis, soit ceux au nombre de 35 000 figurant sur le registre social et les bénéficiaires d’autres allocations, la distribution de cartons avec des produits de première nécessité. Quant à la vente en ligne annoncée, cela s’est révélé un désastre. Un ou deux paniers avec des produits arbitrairement choisis par les fournisseurs pas du tout au goût de tous les consommateurs, avec le sucre comme première commodité offerte alors qu’on est un pays avec un taux très élevé de diabétiques. Et il y a aussi le prix : pas moins de Rs 1 000 pour un panier supposé basique et jusqu’à Rs 2 500 pour le plus cher.

Bref, une arnaque sur toute la ligne qui n’a pas semblé déranger outre mesure Yogida Sawmynaden, scandaleusement absent durant ces derniers jours de gros soucis pour les consommateurs qui ne savaient plus comment cuire leurs aliments, le gaz étant, en plus, introuvable dans beaucoup de localités. Lorsqu’il s’agit de se faire remarquer à l’Assemblée nationale pour épater son chef et colistier au N°8, le ministre du Commerce répond toujours présent, mais en situation de crise, il joue aux abonnés absents. Alors qu’il n’est pas un néophyte comme Renganaden Padayachy ou Kailesh Jagutpal.

Ce dernier, autrement plus humble que ceux précités, a eu du plomb dans l’aile depuis sa prestation à la télé indiquant qu’il n’y avait aucun cas à Maurice pendant que le Premier ministre annonçait des cas le 18 mars. Ils sont tellement pressés d’aller se montrer à la MBC qu’ils en oublient le plus élémentaire, l’information en temps réel à communiquer à la population.

S’inspirer d’ailleurs
Ceux à qui a été confiée la responsabilité de communiquer sur le Covid-19 devraient profiter du week-end pour se documenter et se former à la communication de crise et peut-être regarder comment cela se passe dans les autres pays. S’inspirer d’ailleurs, c’est le meilleur recours lorsqu’on se trouve démuni face à une situation que l’on n’avait pas prévu. Dans les pays à tradition démocratique, non seulement les journaux et les télés ont de temps en temps accès aux unités de soins, mais les informations sur la pandémie sont annoncées par des professionnels de la santé, en direct et à des heures fixes tous les jours, avec la possibilité pour les journalistes de poser leurs questions, ne serait-ce que par visioconférence, et que les décisions politiques sont laissées aux président et premier ministre dont les interventions sont, en plus, annoncées avec un certain préavis.

Communiquer est un art, les amateurs qui se sont succédé devraient enfin le reconnaître et faire appel à l’aide des professionnels.

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