COVID-19 : Les arts de la scène à l’arrêt

Lundi, on comptait encore les événements et rendez-vous culturels annulés ou reportés sur les doigts d’une main. Depuis hier, ce sont les événements maintenus que l’on compte sur les doigts d’une seule main… Les artistes et les différents professionnels du secteur culturel – particulièrement tout ce qui relève des arts de la scène, musique, danse et théâtre – s’inquiètent pour les jours et semaines à venir, qui vont rimer avec chômage technique et perte d’emploi.

- Publicité -

Des lettres ont été adressées aux ministères des Finances ainsi que des Arts et du Patrimoine culturel, une plateforme s’est créée. Certains parviennent à trouver des solutions alternatives, comme le Conservatoire Frédéric Chopin, qui va mettre en place des cours en ligne à partir de la semaine prochaine.

Miselaine Duval a envoyé dès le 12 mars une lettre par e-mail au ministre des Arts et du Patrimoine culturel pour demander qu’une aide soit prévue pour les artistes et professionnels du secteur théâtral, en prévision de la baisse de fréquentation des théâtres, voire de leur fermeture au cas où le Covid-19 venait à se développer à Maurice.

Elle regrettait jeudi de n’avoir toujours pas reçu de réponse : « Mais j’attends, nous explique-t-elle par téléphone, parce que j’ai confiance dans notre nouveau ministre. J’espère de tout cœur qu’il respectera sa parole et les engagements qu’il a pu prendre pour le secteur culturel lorsque je l’ai rencontré il y a plus d’un mois. Il a déclaré vouloir améliorer les relations entre les artistes et le ministère. C’est le moment ou jamais de réagir dans cette période de crise sans précédent. »

Mercredi dernier, un des représentants des Komikos et de Karavann Events a pris contact avec le ministère des Finances, où il lui a été demandé de détailler par écrit comment le Covid-19 affectera leurs activités, ce qu’ils ont dû faire par la suite. Le soir même, le Premier ministre annonçait à toute la nation les trois premiers cas de personnes malades.

Komiko et Karavann Events emploient dix personnes, dont cinq à temps plein. Outre les salaires à verser, les crédits et taxes à payer, cette petite entreprise a aussi le loyer du Komiko Comedy Art Club à honorer au centre commercial de Bagatelle, où ils se sont installés il y a plus d’un an. La fréquentation de la salle a commencé à baisser la semaine dernière, ses exploitants ne sachant trop s’ils devaient attribuer cette tendance aux fortes pluies ou au coronavirus.

« Le théâtre, reprend Miselaine Duval, tombe souvent aux oubliettes dans le vaste secteur culturel. Déjà en temps ordinaire, la situation des métiers du spectacle n’est pas des plus florissantes. On a du mal à joindre les deux bouts et n’oublions pas que les artistes n’ont toujours pas de statut. On fait se détendre le peuple avec toutes nos productions, que ce soit en live au théâtre six jours sur sept, au cinéma avec nos films, à la télévision avec les émissions humoristiques ou en DVD, et pourtant : on n’existe pas ! Faut-il que nous allions fabriquer des piments confits pour exister ? »

Toujours dans le secteur théâtral, on apprenait aussi que la tournée de la pièce de théâtre de Shenaz patel, Niama, qui devait avoir lieu dans plusieurs villes réunionnaises du 30 mars au 10 avril, a été annulée pour le moment, et que l’adaptation en créole de la pièce d’Albert Camus, Les Justes, que Sapsiway et Dharma Mootien devaient présenter du 3 au 5 avril au Théâtre Serges Constantin, était reportée à une date encore indéfinie…

Le cri d’alarme des
industries musicales

Cette semaine historique, où Maurice entre clairement dans la crise du Covid-19, a vu aussi la naissance de la toute nouvelle plateforme Kollektif Lindistri Lamizik Moris (KLLM), créée pour représenter le secteur musical, qui a mené sa première action hier. Gérard Louis, dernier artiste décoré lors des fêtes de l’indépendance, a été en personne déposer à l’attention du ministre des Finances, Renganaden Padayachy, une missive de deux pages, dont une copie a également été transmise au bureau du Premier ministre ainsi qu’au ministre des Arts et du Patrimoine culturel.

Intitulée « Impact Covid-19/Scène musicale de Maurice », cette lettre signée par Stephan Jauffret-Rezannah, le directeur du Momix (Mauritius Music Expo), en tant que porte-parole du KLLM, tire la sonnette d’alarme : « Si nous comprenons parfaitement l’urgence sanitaire et le besoin nécessaire de protéger la santé et la sécurité de la population, nous lançons un appel, un cri d’alarme au gouvernement, en le sollicitant pour une mise en place de mesures exceptionnelles de soutien aux acteurs de l’industrie musicale de Maurice. »

Dans ce document, le collectif demande un rendez-vous avec le ministre afin d’examiner les propositions de mesures, formulées en annexe, à savoir : un moratoire sur les crédits (personnel et entreprise) destinés au secteur culturel, pendant la période de la pandémie ; un Welfare Programme exceptionnel pour les entrepreneurs et artisans de l’industrie musicale ; un soutien et une aide d’urgence au niveau de la MASA, à travers une avance ; et une mise à jour des comptes sur les droits d’auteurs pour ses membres.

Y est aussi détaillée la liste des métiers de la filière musicale : les musiciens, chanteurs et techniciens son du circuit hôtelier, les prestataires techniques (son, photo, vidéo), les organisateurs et producteurs de spectacle, les sociétés de production et de distribution, les studios d’enregistrement, les lieux de diffusion (bars, pubs, restaurants, salles de spectacle), les artistes et musiciens, les agences de booking et de management d’artistes et les agences de communication. Cette annexe reprend aussi une citation du ministre de la Culture français, qui a le mérite de situer les enjeux de la crise pour le secteur culturel : « La crise sanitaire sans précédent qui touche notre pays frappe de plein fouet les acteurs de la culture. Nous devons tout mettre en œuvre pour assurer leur survie… » a en effet déclaré Franck Riester, qui est par ailleurs lui-même personnellement affecté par le virus.

La crise du Covid
s’ajoute à la précarité

C’est bien de survie dont il est question, particulièrement à Maurice, où le secteur culturel souffre déjà au préalable de différents maux, qui tiennent à la précarité de certains emplois dépendant de l’actualité culturelle, à l’absence de politique culturelle, et à l’absence de statut et de reconnaissance officielle des artistes et acteurs de l’ensemble du secteur. Aussi n’existe-t-il en temps ordinaire aucun programme de soutien visant à compenser cette précarité inhérente à ces activités.

Stéphane Rézannah, qui dirige le label de musique Jorez Box et organise la promotion musicale et les tournées internationales de plusieurs artistes mauriciens, tels qu’Éric Triton, Shakti Chane Ramchurn pour sa tournée El tabla, Blakayyo ou encore le groupe réunionnais Ziskakan, évoque 80 dates de concerts annulées sur 95 au total. Elles pourraient être reportées sous réserve que cela soit possible dans le nouveau contexte économique qui suivra cette pandémie mondialisée.

« L’ensemble des cachets d’artistes que cela englobe, nous explique-t-il, représente un manque à gagner d’environ Rs 3,2 millions, sur lequel la production prélève un pourcentage de 10 à 15 %. Les 20 dates réservées pour Éric Triton aux États-Unis et en Amérique Latine, les dates de Ziskakan en Inde et en Corée, la première tournée internationale de Shakti Ramchurn avec El Tabla en Europe et au Cap Vert, sans compter la tournée de Blakkayo pour son nouvel album, tout cela tombe à l’eau. Certains réceptifs nous parlent de report, mais ça risque d’être des annulations, car ils ont déjà d’autres programmations l’année prochaine ou en fin d’année. »

Stephan Rezannah gère aussi la programmation locale de Kafe Kiltir, qui consiste à associer deux artistes ou ensembles en résidence et leur faire présenter une production commune, dans différents lieux de musique mauriciens, et il dirige le marché musical Momix, qui représentent chacun des budgets annuels de Rs 7 et 5 millions… « C’est aussi un an de préparation réduit à néant pour les mois de mars, avril et mai, où l’on se retrouve littéralement au chômage technique. Tous les projets sont en « stand by » jusqu’à la fin juin, et pour nous, le défi consiste clairement et simplement à trouver des alternatives pour payer les loyers et remplir le réfrigérateur… Alors, nous nous demandons évidemment si l’enveloppe de Rs 9 milliards que le gouvernement a débloquée pour faire face à la crise du Covid-19 prévoit de venir en aide au secteur culturel. Il faut bien comprendre que les artistes, les producteurs et les prestataires techniques se retrouvent subitement au chômage technique sans indemnités. Tous ces gens travaillent à plein-temps dans le secteur culturel. Il est encore temps d’y remédier, mais il faut que des décisions soient prises au plus vite. Voilà pourquoi nous avons créé cette plateforme du secteur musical, ouverte à tous les acteurs du secteur, y compris ceux qui interviennent dans le secteur hôtelier. »

Annulations en série

Également producteur et tourneur dans le secteur musical, le directeur de Culture Event, Jimmy Veerapen, additionne lui aussi les annulations sur les mois de mai et de juin, qui vont du groupe jamaïcain Chronixx à Third World, en passant par Maytal, qui devrait accueillir quatre groupes de rock sur une date à déterminer en fonction de la pandémie en mai… Aussi se demande-t-il ce qu’il en sera du festival de rock métal Underworld Rock Festival, qu’il espère pouvoir maintenir au mois d’août, sans compter bien sûr le One Live Festival, que sa société organise déjà depuis plusieurs années, en octobre. « Avec les différents groupes dont je m’occupe, nous explique-t-il, Cassiya, les Inkonnus, Mannyock, etc., nous avions des concerts toutes les semaines, sur mars, avril et mai, qui sont tous placés dorénavant en mode pause jusqu’à nouvel ordre. Nous avions des lancements d’albums, qui devaient occasionner des concerts. Pour nous, ces sorties représentent des soutiens au live, et non l’inverse. On ne peut pas compter sur la vente d’albums pour remplacer le live par exemple. Je veux bien organiser des concerts diffusés en ligne, mais cela coûte de l’argent et cela ne rapporte rien. Comment allons-nous gagner de l’argent pour faire vivre les artistes et vivre nous-même ? L’Internet sert surtout à communiquer sur les créations musicales, mais ne peut pas remplacer le spectacle vivant. Alors comment fait-on ? Que fait-on pendant l’épidémie ? Il y a lieu d’alerter l’État, c’est certain. »

Bruno Raya ne s’inquiète pas pour le nouvel espace de spectacle, le Live’n Direk Espas Kiltirel, qui est encore en phase de construction à Pointe-aux-Sables, et qui pourra accueillir environ 6 000 spectateurs une fois qu’il sera couvert. En revanche, il regrette amèrement de devoir annuler la 2e édition du Festival 6/8, qui célèbre les musiques de tous les pays de l’océan Indien, à travers sa rythmique ternaire. Programmé sur la plage de Mon-Choisy le 25 avril, il devait attirer les percussionnistes en tous genres de la région. Pour l’heure, le producteur et la tête d’affiche d’OSB maintient le festival Seggae Zoue à Bel-Ombre le 6 juin, avec tout de même un point d’interrogation. « Seggae Zoue présente des groupes mauriciens. Mais pour Reggae Donn Sa, le 1er août, la question se pose de voir quand nous commençons la promotion, et si nous allons pouvoir réserver les stars internationales que nous avons prévu de faire venir, car il faut verser une partie du cachet à l’avance… Deza nou pena okenn rekonesans. Covid, sa prouve ki ankor enn fwa nou bizin enn statu ek enn plan daksyon pou develop sekter kiltirel. Pa bliye ki li enn sekter ki ena pli gro potansiel developman ! »

Du côté de Lively Up, Lionel Permal regrette de reporter, si ce n’est annuler, la venue de Sona Jobarteh, cette artiste exceptionnelle, reconnue mondialement comme la première femme joueuse de kora. Programmé le 18 avril, son concert était prévu dans le cadre du programme Off du festival Kaz’Out. « Nous sommes en discussion avec la production de Sona Jobarteh pour envisager un report, mais dans la situation où nous sommes, il est difficile de dire ce qu’il en sera. On clôture Sona et à partir de maintenant tout est en « stand by ». En tant que citoyens responsables, on respecte les mesures mises en place, et on garde espoir que les autorités vont trouver des solutions. Je crois qu’il est important que les gens gardent une attitude positive, même si c’est la crise, autant la passer dans une attitude où on avance. De notre côté, on essaie d’avancer sur la préparation de Kaz’Out, qui n’a lieu qu’en novembre, heureusement ! Mais comme nous n’aurons pas de rentrées pendant quelques semaines ou quelques mois, nous sommes obligés de réfléchir à deux fois sur l’argent que nous allons engager dans le festival… Nous avions un contrat d’un an qui devait être renouvelé maintenant, et qui est remis en question. Les hôtels avec lesquels nous travaillons nous ont déjà prévenus que s’ils n’ont pas de clients, ils ne nous feront pas travailler. Laura Hébert et moi continuerons de préparer Kaz Out sans rémunération, d’autant plus que de mon côté, je n’aurai plus d’activité en tant que musicien. Dix personnes travaillent à temps plein chez Lively Up, et si on n’a pas de revenu, on va être obligé de fermer pendant un temps. »

Si la crise devait durer, elle pourrait aussi indirectement diminuer l’importance du festival, qui fait travailler 50 personnes en septembre et en octobre, puis 200 pendant le festival… Un festival de ce type génère aussi des activités indirectes telles que la location de matériel et les prestations des équipes techniques, des transports et des réservations d’hôtel pour les artistes étrangers, etc. Lionel Permal s’inquiète aussi du soutien du secteur privé pour cet événement : « Kaz’Out existe en grande partie grâce aux sponsors, et je crains qu’ils soient moins généreux dans les mois qui viennent s’il y a une récession économique. »

Animations hôtelières en berne

Pascal Cimiotti, directeur de Musik Connexion Ltd, organise des animations, concerts et spectacles dans l’hôtellerie dans différents genres musicaux, tels que la variété, la musique indienne et les musiques de l’océan Indien. Il fait tourner de cette manière quelque 40 artistes, dans des formations de différentes tailles, selon la demande du trio à l’ensemble de dix artistes, danse et musique comprises. Sur six hôtels avec lesquels il est sous contrat, cinq ont déjà décidé de suspendre ces prestations faute de clients et en raison des mesures de précaution à venir, tandis que l’un d’eux a demandé à réduire le tarif des prestations de 50 % pour les quelques clients qui ont décidé de prolonger leur séjour. « Reste à savoir s’ils vont quand même prolonger après l’annonce des cas de Covid-19 à Maurice… soupire notre interlocuteur. Depuis quelques jours, je passe mon temps à appeler les musiciens pour leur annoncer ces mauvaises nouvelles. Il faut comprendre que ces artistes sont complètement dépendants du tourisme. »

Lorsque nous l’interrogeons sur la manière dont le gouvernement pourrait venir en aide au secteur, Pascal Cimiotti pense par exemple à l’exemption de la TVA, dès maintenant, pour le mois de mars et les mois à venir, tant que la situation ne sera pas revenue à la normale. « Nos prestations sont taxées à 15 %, ce qui ne serait pas négligeable et cela permettrait d’aider les petites compagnies comme la nôtre. Je sais que tôt ou tard les musiciens vont nous demander de les aider. Je me demande aussi si les banques ne pourraient pas venir en aide au secteur culturel avec des prêts à taux très bas. » Quand nous lui demandons combien de temps il pourrait tenir sans revenu, il nous répond : « Deux mois pour nous. Mais vous savez, la plupart des artistes du secteur vivent au mois le mois. » Et d’ajouter dans l’unanimité avec ses différents confrères et consœurs de la grande famille des arts de la scène que l’absence de statut pour les artistes les plonge totalement dans le flou… Allan Marimootoo, en tant que doyen de l’animation hôtelière, se souvient qu’il a démarré son activité il y a plus de 50 ans, après le cyclone Gervaise. « C’est dans les périodes de crise comme ça qu’on peut sortir grandi. Si Maurice gère bien cette crise, on en sortira gagnant, j’en suis sûr. Et on saura mieux apprécier nos voisins, nos amis, nos repas, nos concerts ! Dans un moment pareil, il est clair qu’il faut prévoir quelque chose pour les artistes qui ne travaillent pas. Ils font partie de la nation mauricienne ou pas ? »


Ce que nous ne verrons pas

L’artiste belgo-congolais Baloji, ayant reporté sa tournée à l’année prochaine à cause du Covid-19, l’IFM a dû annuler dès lundi le concert qui devait avoir lieu hier soir. Aujourd’hui, Journée internationale de la francophonie, ce sont la remise des prix du concours d’éloquence à l’IFM et la soirée littéraire du Centre culturel d’expression française qui sont annulés. Sans prétention à l’exhaustivité, les autres annulations à suivre sont pour l’heure :

– 21 mars : Café des lecteurs sur les auteurs francophones à la médiathèque de l’IFM

– 26 mars : Conférence d’Arnaud Carpooran et Moïra Méo sur le français des affaires, à l’IFM

– 28 mars : Untitled Goose Game, séance de jeux vidéo à l’IFM

– 28 mars : Kafé Kiltir de Big Frankii et Mister Love

– 1er et 4 avril : Materclass et atelier d’écriture de Fabienne Jonca.

– 3, 4 et 5 avril : Les Justes, d’Albert Camus, adapté par Sapsiway et Dharma Mootien, au théâtre Serge Constantin

– 5 avril : A million O’Clock, concert d’ouverture du festival Mamajaz, au Caudan Arts Centre

– 7 avril : Lydian Nadhaswaram, petit prodige indien du piano, au Caudan Arts Centre

– 18 avril : Blakkayo à Lakaz

– 18 avril : Sona Jobarteh, Off Kaz’Out

– 19 avril : Mo maloya de Meddy Gerville, Mamajaz au CAC

– 24 avril : Face à la mère, pièce de théâtre d’Alexandra Tobelaim, proposée par l’IFM au Caudan Arts Centre

– 2 mai : Kafé Kiltir avec Éric Triton et Ras Natty Baby

– Début mai : Replay conjugal, spectacle de marionnettes réunionnais, au CAC

– 9 mai : Chronixx, concert du groupe de reggae jamaïcain

– fin mai : les Théâtrales de l’Île Maurice, au CAC, reportées à l’année prochaine

– 16 mai : Festival de littérature jeunesse, proposé par l’IFM au CAC

Les concerts de Gina Jean-Charles et Belingo Faro le 12 avril ainsi que le concert de création Mama Jaz d’Éric Triton, prévu le 26 avril, ne seront pas ouverts au public, mais ils auront lieu et seront diffusés en ligne, gratuitement, et à la télévision sur la MBC.

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour

- Publicité -