COVID-19 – Monde du travail : À l’imparfait avec licenciements et baisse des salaires

Alors que le monde se lamente de ses milliers de morts à cause du Covid-19, les conséquences de la pandémie sur l’économie sont aussi désastreuses. La menace de licenciements dans différents secteurs de l’économie se dessine clairement. Si certains, plus chanceux, parviendront à conserver leur emploi, une baisse de leur salaire sera toutefois une des premières mesures mises en place. La situation à Maurice ressemble à celle que vivent les entreprises dans les pays touchés par la pandémie. La récession économique est déjà annoncée et la peur des employés se fait réellement sentir.

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À Maurice, l’un des premiers secteurs directement touchés par la pandémie de COVID-19 est sans aucun doute, le tourisme. Ce secteur de service à hauts revenus est déjà à l’arrêt depuis plusieurs semaines avec des emplois en péril non seulement dans l’hôtellerie, mais aussi et surtout dans le réceptif. Employée dans ce secteur depuis plus d’une décennie, cette habitante des Plaines-Wilhems, qui travaille dans une agence de voyages très réputée, vit dans une crainte perpétuelle.

Le risque de perdre son emploi d’un moment à l’autre est une véritable hantise. « Nous vivons dans une forte angoisse tous les jours. À chaque fois que le téléphone sonne, nous avons peur de décrocher craignant qu’on nous dise que nous avons perdu notre travail », fait-elle comprendre tout en gardant l’anonymat. Les jours se conjuguent avec stress et la nuit, des cauchemars.

Cette situation est très dure car aucun choix ne se présente à elle. Ayant uniquement de l’expérience dans le tourisme, elle ne sait pas à quelle porte frapper pour qu’elle puisse trouver un emploi dans l’éventualité d’un licenciement. La situation se corse pour cette mère de famille vu que son époux travaille dans le même secteur. « Mon mari est guide touristique dans une autre compagnie. Il est le premier qui est touché », dit-elle.
Son époux ne travaille pas en ce moment et aucune communication n’a été établie entre lui et sa direction à ce jour. Malgré la période de confinement, elle avance que son mari a dû travailler pour déposer les clients à l’aéroport. Elle se demande si les chauffeurs comme son mari seront compensés alors que certains patrons « se la coulent douce chez eux ».

N’ayant aucune solution à sa situation actuelle, elle dit garder sa foi en Dieu et espère que des employeurs ne profitent pas de la situation pour mettre à la porte les employés.
De par son expérience dans le domaine, elle ne croit pas que le tourisme verra de beaux jours de sitôt. « Les touristes ne voyageront pas de sitôt. Je ne sais si les agences de voyages à l’étranger enverront des clients à Maurice. Mais je ne crois pas que le secteur redémarrera cette année ». Pour elle, il n’y a pas de visibilité en ce moment pour savoir ce qui se passera dans les mois à venir.

« C’est une situation sans précédent que nous vivons. Je ne pense pas qu’une personne pourra voyager même si elle est offerte un ticket d’avion », dit-elle et se demande si les gens auront de l’argent pour voyager avec la crise économique qui sévit déjà. « Je me demande si les touristes pourront payer les hôtels au prix qu’ils ont l’habitude de payer », dit-elle.

Cette employée n’a aucune assurance que les affaires iront bien pour ce secteur cette année. Tout comme elle, une autre employée opérant dans une autre agence de voyages située à Port-Louis connaît les mêmes incertitudes. Une baisse de son salaire est acceptable mais se retrouver sur le pavé sera une pilule très amère à avaler. Ayant eu vent que sa compagnie souhaite payer trois mois de salaire aux employés et ensuite les remercier, elle espère qu’une telle situation ne se produise pas.

Hormis le tourisme, le secteur de la construction subit également de plein fouet les effets de COVID-19. Un jeune Quantity Surveyor d’une enseigne incontournable sur la place se la coulait douce jusqu’à tout récemment. Puis avec le coronavirus, c’est la tourmente. Sa compagnie n’a plus de projets et tous les projets existants ont été gelés jusqu’à nouvel ordre. « Tous nos projets sont gelés et nous n’avons pas de travaux importants en ce moment », dit-il.

Croyant que le gel allait durer pour quelques semaines uniquement, ce qu’il vit actuellement est « sans précédent ». Sa compagnie, qui opère principalement dans le secteur du tourisme, fait face à un important manque à gagner. « La compagnie mise beaucoup sur la construction et la rénovation des hôtels et nous avons reçu des courriels où les promoteurs nous annoncent le gel de leurs projets. Ils ne savent même pas quand ils vont pouvoir redémarrer », confie-t-il.

Le manque de visibilité est si criant qu’il ne sait même pas si les projets immobiliers vont vraiment recommencer. « L’incertitude est très élevée. Je me demande si nous aurons des clients pour ces projets », se demande-t-il. Selon lui, d’ici six à sept mois, le secteur se portera très mal. Le portefeuille de projets de l’entreprise a drastiquement diminué, influant directement sur son Cashflow.

Pour que la compagnie puisse continuer à assurer son fonctionnement, il avance qu’une des mesures qu’appréhendaient les employés est la baisse du salaire. « Je préfère avoir une baisse de mes salaires que perdre mon emploi car j’ai des engagements financiers et perdre son emploi en ce moment est très dur. Comment trouver un emploi aussi vite ? », s’interroge-t-il. Si aucune communication officielle n’a été transmise aux employés à ce stade, cette mesure devra prendre effet très bientôt.

Pour l’instant, ce qui est dur c’est qu’il faut dire adieu aux Fringe Benefits. Les congés auxquels avaient droit les employés seront aussi mis au placard. Il craint que les nouveaux employés sont plus à risque de perdre leur emploi par rapport aux autres qui sont des anciens. Mais il dit ne pas être surpris si les anciens sont invités à prendre la porte de sortie dans la conjoncture.

La réduction des salaires est aussi l’une des premières mesures appliquées dans une autre compagnie privée et réputée dans l’installation et la maintenance d’ascenseurs et d’escalateurs. Ses activités fortement entamées, la réduction des salaires d’une catégorie d’employés est inévitable pour que personne ne perde son emploi.

« Une telle situation était attendue. Nous savons qu’un problème de Cashflow allait avoir lieu et qu’il serait difficile pour la compagnie de payer aux employés leur salaire habituel », explique un ingénieur de la compagnie, qui concède que le choix est entre accepter des salaires réduits et prendre la porte de sortie. « Il faut qu’on fasse des sacrifices par ces temps difficiles. Nous ne pouvons pas laisser les autres perdre leur emploi », dit-il. Comme lui, les cadres de la compagnie ont aussi vu des réductions de leurs salaires.

La pandémie n’épargne même pas le secteur de la santé. Les médecins du privé notent aussi une baisse conséquente de leur clientèle. Ils ne viennent qu’en cas urgent. « Depuis que le pays est en confinement, le nombre de clients a lourdement chuté. Ils préfèrent être diagnostiqués par téléphone ou l’automédication », déclare un médecin du privé dans les hauts Plaines-Wilhems. Selon lui, les gens ne sortent pas de peur de contracter le virus chez les médecins du privé.

Constatant cette baisse continuelle de sa clientèle, il préfère ne pas ouvrir son cabinet. Cette fermeture représente un grand manque à gagner. Même s’il travaille occasionnellement dans une clinique privée, il note également une baisse au niveau des patients. Une situation qu’il n’a jamais connue dans le passé. Pour lui, le stress gagne du terrain tous les jours dans son secteur et il ne peut s’empêcher de se demander à quand un retour de la situation d’avant COVID-19.

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