CRASH À PLAISANCE : 55 ans après, il s’en souvient…

Remonter l’histoire est toujours un exercice passionnant. Plus passionnant encore l’occasion de recueillir «viva voce» le témoignage d’acteurs ou de témoins qui ont connu ou vécu un événement exceptionnel et qui arrivent, à partir d’un tout petit déclic, à extirper du fond de leur mémoire un fait lointain et souvent fl ou. Reviennent, alors, en de petites incursions dans le passé, des bribes de souvenirs qui s’imbriquent les unes dans les autres formant, peu à peu, un parfait relief d’un moment vécu. Uniques souvenirs qui, tout juste, sommeillaient quelque part dans un coin du subconscient.  
Puisée de la collection photos du State Library de l’Etat de New South Wales, l’arrivée de la famille Thompson à l’aéroport de Mascot, Sydney, une semaine après l’accident. Ronald, au premier plan, avec ses soeurs Joy et Carole ( à droite). Sue est dans les bras de sa mère, Una.
Dans son récit, Maurice Pickens (en médaillon dans la photo du haut) avait raconté comment il avait éloigné deux fi llettes de l’avion en feu: “ Outside the front emergency exit, between the Navigator’s door and the burning wing, was a little girl about three years old (*) being held by her arms outside the Aircraft. I raced back and shouted over the roar of the fl ames: “Drop her” and I caught her safely as she fell, before she hit the ground. As I ran, I found  another girl about eight years old lying sobbing on the ground. I scooped her up under the other arm and shouted “Run”. Their feet weren’t touching the ground. I almost felt like an hero at that point, even if I was about to get cooked..”
Durant de longues années, Maurice Pickens voulut savoir ce qu’était advenu de ces enfants. C’est grace à l’Internet qu’il a pu renouer avec eux, en l’an 2000, 40 ans après. Il nous confi era: “Emouvant de voir une belle dame se présenter à moi en disant ‘c’est Carole’. Elle avait en sa possession un petit morceau de plâtre qu’elle avait précieusement gardé depuis l’accident.”
* Il s’agissait bien, là, de Carole Thompson, qui s’était fracturé le bras lors de sa chute   Il y a quelques jours, un coup de fil venant d’un hôtel de la côte ouest. À l’appareil, Ron Thompson, un Australien, qui voulait me rencontrer pour parler d’une série de six articles que j’avais publiés dans Le Mauricien il y a cinq ans, au mois d’août 2010, pour marquer les 50 ans du crash de la QANTAS.
Dans ce dossier, je relatais alors un fait, isolé, peu après le crash, qui parlait d’un garçonnet qui, s’échappant de l’avion en feu, affolé, avait pris la mauvaise direction et semblait courir vers les fl ammes et qui s’immobilisa en heurtant un arbuste. C’est un pompier qui, l’attrapant par les cheveux, lui fi t retrouver les siens qui étaient déjà à l’abri avec les sauveteurs.
Ce garçonnet, alors âgé de 5 ans, n’est nul autre que Ron Thompson, la soixantaine aujourd’hui. S’il en conserve encore un impérissable souvenir, c’est que sa mère, Una, (85 ans, aujourd’hui,) et ses deux soeurs aînées, Joy et Carole ainsi que la benjamine, Sue, avaient déjà pris place dans un car qui s’était rapproché à une centaine de mètres des lieux de l’accident pour, justement, en éloigner les rescapés. Il nous expliquera ainsi l’absence, dans la photo souvenir prise le lendemain au Park Hôtel, à Curepipe, de sa famille, restée au chevet de sa soeur Carole, qui avait été blessée dans l’accident.
«En première classe..»
Interrogé quant à une quelconque émotion particulière ressentie lors de son arrivée à Plaisance – il en était à sa première visite, 55 ans après – Ron Thompson nous avoue ne pas trop y avoir songé. «L’escale de Maurice était une étape dans un long processus de retour en Australie. Mon père, dentiste, originaire de Sydney exerçait au Nigeria, grande métropole de la côte ouest africaine quand éclata la guerre civile. Il avait jugé plus prudent de nous rapatrier, ma mère, mes soeurs et moi, et c’est ainsi que nous nous sommes retrouvés sur ce vol Johannesburg/Sydney, via Maurice. Vous savez, toute la famille voyageait alors en 1ere classe…»
La plus confortable des places, certes, mais pas la plus sûre quand l’avion rate son envol et prend feu en contrebas de la piste…

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