DÉCOUVERTE : Le tourisme religieux, un nouveau créneau à exploiter

Quel est le point commun entre la Jummah Mosque, la pagode Kwan Tee, Grand Bassin, le Sockalingum Meenatchee Amman Tirukovil, l’église St-François d’Assises ? Certes, ce sont des sites religieux. Mais au-delà, ce sont aussi des sites touristiques. Des lieux que les touristes aiment à connaître pour découvrir et apprendre de la diversité culturelle coexistante qui fait la beauté et la particularité de la destination mauricienne. Il y a là un créneau à développer : le tourisme religieux. C’est ce que suggère la Commission du tourisme du Diocèse de Port-Louis qui — en marge de la journée mondiale du tourisme qui sera célébrée le 27 septembre sous le thème «Voyager pour rencontrer dans le respect» — a initié quelques membres de la presse, lors d’une sortie en début de semaine, à un parcours spirituel atypique. Week-End y a participé.
Faire du tourisme autrement. C’est ce que propose la Commission diocésaine du tourisme, qui estime que les acteurs de l’industrie disposent à travers le tourisme religieux un nouveau créneau à exploiter. En effet, selon les estimations de l’Organisation mondiale du tourisme, quelque 300 à 330 millions de touristes visitent chaque année les principaux sites religieux à travers le monde. On peut distinguer trois approches importantes, soit l’approche spirituelle, qui concerne principalement les croyants ; l’approche sociologique, qui est un moyen pour les croyants de mieux connaître l’histoire de leur groupement religieux ; et une approche culturelle, une forme de tourisme donnant accès à la culture émanant des grandes religions mais aussi de l’histoire d’un pays.
La destination mauricienne n’est pas en reste face à cela, estime la Commission diocésaine. L’idée a germé dans l’esprit de Monique Dinan, fondatrice de la Commission. « Ayant travaillé un petit peu sur tout ce parcours des églises construites, je m’étais dit qu’il y a là une très belle histoire qui intéresserait les touristes aussi bien français, italiens, anglais que polonais», explique-t-elle. Ainsi, tout comme le Mauricien qui se rend à Lourdes, à la Mecque ou encore en Asie, entre autres, en quête spirituelle ou de découvertes culturelles, les touristes qui viennent à Maurice peuvent aussi avoir l’occasion de découvrir les sites religieux locaux, de véritables livres d’histoire. L’histoire de Maurice et de son architecture patrimoniale pourrait ainsi être contée au travers des sites religieux dont une majorité à Port-Louis, à l’instar du caveau de Père Laval, la Jummah Mosque, la mosquée Al Aqsa, la pagode Kwan Tee, Marie Reine de la Paix, le temple Kaylasson, etc.
Les symboles historiques  à Pamplemousses
Lors de la sortie organisée par la Commission diocésaine, nous avons ainsi pu découvrir quelques sites dans les alentours de la capitale et plus au nord. Direction l’église St-François d’Assises à Pamplemousses. Région qui démontre que l’histoire religieuse de Maurice n’est pas uniquement basée sur l’histoire chrétienne, mais va bien au-delà, avec une diversité religieuse et culturelle surprenante. En effet, selon les historiens et les guides touristiques, c’est cette région de Maurice qu’ont été construits les premiers temples hindous et les premières mosquées. 
« Pendant la période coloniale française, nulle autre pratique religieuse n’était tolérée si ce n’est la religion catholique. Et pour avoir accès à l’éducation, il fallait se convertir au catholicisme », rappellent les guides, qui font ressortir également que les édifices religieux étaient construits à l’entrée du village. « La personne qui a permis l’expression des religions libres, c’est celui qui a dessiné le Jardin botanique de Pamplemousses, Pierre Poivre, qui était aussi l’intendant de la Compagnie des Indes françaises à Maurice », disent-ils. Monique Dinan ajoute que «les premiers pèlerins du Maha Shivaratree sont partis de cette région de Maurice, d’un temple pas loin de l’église de Pamplemousses traversant toutes les villes jusqu’à Grand Bassin. » Une des raisons pour lesquelles il y a un peu partout des kalimayes, c’est pour que les pratiquants puissent s’adonner à leurs rites qui ne leur étaient pas permis.
Pamplemousses est un lieu regorgeant de sites religieux, dont St-François d’Assises, la plus vieille église de Maurice, construite en 1643 sous la colonisation française. Un site qui peut conter non seulement l’histoire religieuse de Maurice, mais aussi celle du développement du pays, soit l’histoire dans sa pluriculturalité. À côté de l’église St François d’Assises, le cimetière de Pamplemousses. Autre lieu empreint d’histoire, où reposent certes plusieurs inconnus, mais aussi des personnalités qui ont contribué à l’édification du pays.
Cela fait 21 ans que Raymond Govart, retraité français, s’occupe du cimetière. À sa façon, il ramène à la vie des histoires et des anecdotes du passé. C’est un peu lui “l’âme” de ce cimetière. Et pour les intéressés, il n’hésite pas à expliquer l’importance de ce site où reposent le Chevalier de Magon, Adrien D’Epinay ou encore l’un des aumôniers de Napoléon dans des tombeaux aux symboles français, comme la fleur de lys, la Croix de Jérusalem ou encore la porte en fonte ornée de flambeaux à l’envers représentant ainsi une bougie éteinte symbole de mort.
Non loin du cimetière de Pamplemousses, à la rue Céré, trône un autre lieu chargé d’émotions, témoin de la période d’esclavage : le Bassin des esclaves, où ils étaient entassés avant d’être lavés et menottés pour être vendus. Quelques kilomètres plus loin, le restaurant à la carte mauricienne Chez Tante Athalie est une parfaite escale pour découvrir les plats typiques du pays.
Grand Bassin  sur la carte du monde
Port-Louis, Pamplemousses, Mahébourg, Poste de Flacq, Trou d’Eau Douce, Rivière Noire, Albion: à chaque coin de Maurice, il existe des sites religieux qui peuvent agrémenter le voyage d’un touriste féru de découverte.  « Bientôt à Grand Bassin sera érigée la plus haute statue au monde d’une déesse hindoue », indique Monique Dinan. Déjà, certains promoteurs, dont des tours opérateurs ou encore des organisations, comme mymoris.mu ou Mauritius Conscious, proposent de découvrir l’île sous une nouvelle facette, hors plages et tourisme de luxe.
Pour Shakti Callikan et Maya Essoo, de Mymoris.mu, « c’est ce contact humain, cette authenticité que recherchent les touristes. Proposer un tourisme religieux pourrait être une façon de découvrir Maurice autrement ». Nadine Hitilambeau, blogueuse et globe-trotteuse, abonde dans le même sens. Lors de ses visites dans différents pays du monde, c’est aller à la rencontre des autres et découvrir à travers eux la culture, la richesse et l’authenticité d’un pays qui émeut et laisse des souvenirs impérissables.
« Au vu de notre richesse culturelle et religieuse, établir un parcours culturel religieux aurait toute son importance à Maurice », estime la Commission diocésaine. Pour lancer ce projet qui sera prochainement proposé aux tours opérateurs mauriciens, elle compte sur la volonté conjointe du ministère du Tourisme et de la Mauritius Tourism Promotion Authority. Il faudra aussi, pense-t-elle, le concours d’organisations motivées à structurer un parcours spirituel, ainsi que des billets d’avion à un prix abordable. Ce qui serait un plus, c’est que les hôtels proposent des packages intéressants d’une semaine pour les touristes aussi bien pour les Mauriciens.
Affaire à suivre

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