Drogues synthétiques : 122 jeunes traités dans nos hôpitaux en un an

Danny Philippe (CUT) : « Ce n’est plus une situation alarmante. C’est catastrophique quand on a des gosses de 10 ans qui prennent des drogues ! »

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Le ministère de la Santé a mis en ligne le rapport annuel du National Drug Observatory. Ce document établit dans le détail les habitudes des consommateurs des produits nocifs et illicites, telle l’héroïne, mais surtout les nouvelles drogues synthétiques. Celles-ci occupent d’ailleurs une place importante dans ce présent rapport.

Le rapport du ministère de la Santé indique que pour la période de juillet 2016 à juin 2017, 536 cas sur les 1 158 rapportés dans le milieu hospitalier concernent la consommation de drogues synthétiques. Une des tranches d’âge touchées : les 10 à 14 ans. Selon le président du Collectif Urgence Toxida (CUT), Danny Philippe, « puisqu’il est établi que des gosses de 10 ans touchent à ces produits illicites, on ne peut plus parler de situation alarmante, mais carrément catastrophique ! »

Danny Philippe a été l’un des premiers, dès 2013, avec l’avènement des drogues synthétiques à Maurice, à évoquer les dangers que représentent ces substances pour les plus jeunes. « Aujourd’hui, le National Drug Observatory Report 2018 vient confirmer nos craintes ! », soutient le travailleur social Danny Philippe. « Chiffres à l’appui, il est prouvé que de plus en plus de jeunes, et notamment un nombre grandissant de filles, sont touchées par le phénomène des drogues synthétiques. » En effet, le rapport de 2018 établit que sur les 1 158 cas enregistrés dans le service médical public, 536 cas « were specified as suspected use of new psychoactive substances. »

De fait, par le biais d’un tableau avec des tranches d’âges, l’observatoire des drogues indique que pour les 10 à 14 ans, 2 filles et 12 garçons ont été répertoriés. De même, 11 filles et 97 garçons de la tranche des 15 à 19 ans sont concernés. Ce qui amène à un total de 122 jeunes de 10 à 19 ans qui ont été traités dans nos hôpitaux, pour la période de juillet 2016 à juin 2017, pour des troubles liés à la consommation de drogue synthétique. Si le pourcentage le plus élevé, soit 29,9 %, touche les 25 à 34 ans, le président de CUT relève que « le mal est fait ! On a eu beau crier sur tous les toits, depuis 2013, que la drogue synthétique allait toucher les plus jeunes de notre population, certains nous ont taxés d’exagérer la situation. Aujourd’hui, les chiffres en attestent : des gosses de 10 ans touchent aux produits illicites ! »

Et Danny Philippe de poursuivre : « Car l’on sait que si un gosse de 10 ans a consommé de la drogue synthétique, il est plus que probablement déjà familier avec l’alcool, la cigarette, qui sont les drogues légales, sans oublier le gandia ! Si à cet âge, ces gosses touchent déjà à tout cela, que feront-ils à 25-30 ans ? Et dans quel état seront-ils à cet âge, après avoir ingurgité toutes ces substances dans leurs corps ? » Le travailleur social soulève d’autres interrogations : « Le Premier ministre a annoncé, en janvier, dans son discours pour la nouvelle année, la mise sur pied d’une structure rôdée s’agissant de la drogue et du sida, et l’élaboration d’un plan directeur revient régulièrement sur le tapis… Mais à maintenant, rien ! » Et le président de CUT de se demander : « Quelle structure d’accueil avons-nous pour ces gosses ? Quels traitements on va leur donner ? »

Et de rappeler : « Comme l’a souligné le directeur du Centre Idrice Goomany (CIG), Imran Dhannoo, récemment, c’est bien de voter Rs 10 m pour la répression, mais qui va s’occuper des malades ? » Il note que « la plus grosse part du gâteau va à la répression. Soit, puisque cela fait partie de la réponse. Mais ce n’est pas tout ! La police n’a rien demandé et pourtant, dans le dernier budget, le Premier ministre leur a octroyé des millions pour stopper le trafic. Nous, travailleurs sociaux, quémandons depuis des années des sous pour optimiser la prévention et demandons qu’il y ait plus de développement en matière de traitement, d’écoute, d’approche et de conseils, mais en vain ! »

Selon Danny Philippe, il n’est pas défaitiste, mais il sait que malgré tous les efforts de répression, on ne peut mettre un terme au problème de la drogue dans un pays. « On peut en diminuer l’étendue, certes. Mais pour ce faire, il faut, en parallèle avec le travail de répression, des saisies, décourager la prise, la consommation. Cela passe principalement par la prévention, l’approche, le dialogue, l’écoute et la mise en place de structures pour aller vers les consommateurs. » En point d’orgue, le travailleur social lance un énième appel au gouvernement : « Investissez un peu aussi dans la création de structures dans toutes nos villes et villages pour toucher ces jeunes répertoriés via l’observatoire des drogues ! »

Héroïne, mais aussi haschisch et coke au hit parade !
Au hit-parade des produits les plus rapportés dans l’usage par les consommateurs auprès des hôpitaux et d’autres sources officielles, le rapport 2018 de l’Observatoire national fait mention de l’héroïne, du cannabis, des cannabinoides, du haschish, de la méthadone, de la cocaïne, de la méthamphétamine, de l’Ecstasy (MDMA), du Rivotril, du Valium, du Mogadon, de la Panadeine, des sirops contre la toux, du Tramadol, des nouvelles substances psychoactives, du Subutex (Buprénorphine) et de Nova (pregabalin), entre autres. Le document fait également ressortir que « nombre des consommateurs mauriciens ont révélé être polytoxicomanes, c’est-à-dire qu’ils touchent à plusieurs produits simultanément. » Les différents maux recensés auprès des patients qui ont été vers les centres de santé durant cette année écoulée vont des troubles mentaux et physiques liés à la consommation des substances, à d’autres symptômes tels que les hallucinations, la dépression, l’anxiété, des complications liées à l’overdose, la perte de connaisance et le manque de respiration. A noter que des cas d’addiction à l’héroïne auprès de femmes enceintes ont également été rapportés.

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