ECONOMIE ET FINANCES: Bheenick ne lâche pas prise

Le gouverneur de la Banque de Maurice, Rundheersing Bheenick, poursuit sa croisade d’explications sur la conjoncture économique et la nécessité d’approfondir les réformes pour renforcer la résilience face à la crise. La plate-forme n’est autre que le magazine de la Chambre de Commerce et d’Industrie (CCI), dont les dernières prévisions de la croissance s’inscrivent dans une Colliding Course avec celles de la Banque Centrale. Il a mis l’accent sur les 7 principales lacunes de l’économie et rappelé que le danger de l’inflation ne peut être négligé. Il n’a pas manqué de lancer des piques aux politiciens en les critiquant pour leurs agendas cachés.
Dans cette interview accordée à Renganaden Padayachy et Proya Seewoochurn Dey, de la Chambre de Commerce et d’Industrie, Manou Bheenick fait un vibrant plaidoyer pour éliminer la complaisance caractérisant la gestion dans les institutions publiques aussi bien que les sociétés privées. Il n’est pas passé par quatre chemins pour dénoncer les aspects désuets du processus de prises de décision avec pour résultat que des préjudices sont causés aux intérêts de Maurice.
“Paradoxically, our great weaknesses are the rampant complacency that still plagues a number of public sector institutions and private companies and our lack of unity that makes the decision-making process much too rusty and at times unfortunately jeopardizing our own chances”, lâche le gouverneur de la Banque de Maurice, connu pour ses propos acides et son franc-parler.
Manou Bheenick ne surprendra personne quand, poursuivant sur sa lancée, il accule la classe politique. “It is important that many of our politicians and future ones get out of their many hidden agendas and come out clear when they propose alternatives to what is being done, in a holistic manner”, dit-il.
L’agenda économique défini par le gouverneur de la Banque de Maurice se résume à une étroite collaboration de tous les partenaires pour assurer “more inclusive and diversified growth.” “In addition to social protection and state-owned enterprise reform, we need investments in human and physical infrastructure (water, electricity ans transport) as well as further improvements on the business environment”, poursuit-il.
Manou Bheenick s’est permis d’identifier et d’énumérer les 7 lacunes de l’économie, qui exigent une attention urgente, à savoir
— l’absence de planification stratégique de l’économie;
— une trop grande dépendance sur des marchés d’exportations, avec l’Union Européenne représentant plus de 60% des exportations, accroissant du même coup la vulnérabilité de l’économie à la crise dans la zone euro;
— développer une culture de recherche et développement au lieu de se contenter du rôle d’imitateurs (copycats) en forgeant cette identité nationale;
— l’absence de technological preparedness avec une pénurie d’initiatives venant du secteur privé pour pousser le niveau de la technologie encore plus haut;
— le mismatch entre les compétences techniques et les emplois disponibles, un déficit en capital humain difficile à combler dans des secteurs-clés de l’économie;
— la très faible productivité de la main-d’oeuvre, et
— la nécessité de lutter contre l’endettement excessif par des mesures de recapitalisation et de restructuration en vue d’assurer la cohésion sociale, de combattre les inégalités et d’accroître l’épargne et les investisseurs, moteurs de la croissance de demain.
Lutte contre l’inflation
Le gouverneur de la Banque de Maurice ne ratera pas, pour autant, son mantra en faveur de la lutte contre l’inflation. Se félicitant du fait que ce fléau économique ne constitue pas une préoccupation majeure, il affirme que “it doesn’t mean that we must not be prepared for the battle because it can rear its ugly head anytime, especially because we depend so much on imports.”
Le patron de la Bank of Mauritius Tower enchaîne: “We don’t have much control over external factors. But we should not complicate things by following the wrong policies domestically. To me inflation is an ever-present danger, so we should always be on the look out for it.” Une façon de dire que la dernière décision du Monetary Policy Committee où l’Establishment de la Banque centrale avait été mis en minorité sur la baisse conséquente du Repo Rate ne devrait pas se reproduire lors la prochaine réunion.
Commentant l’évolution de l’économie, Manou Bheenick ne se fait aucune illusion au sujet des répercussions de la crise en Europe sur Maurice. “Like it or not, our Euro-centric economy will be affected by the fall-out”, fait-il comprendre en brandissant le spectre des répercussions de la flambée du cours mondial du pétrole, avec le prix du baril supérieur à 100 dollars pour une grande partie de 2012. ‘These two factors along with the ongoing global uncertainty will continue to weigh on our economy in 2012 and 2013”, prévoit-il.
“La facture pétrolière représente 19% de la note d’importations du pays contre 10% il y a dix ans de cela. Entre-temps, le coût des importations a plus que doublé de Rs 70 milliards à Rs 140 milliards. Cette augmentaion a été alimentée davantage par les effets de prix que des changements dans le volume”, commente-t-il.
Même si le gouverneur de la Banque de Maurice concède que “there are many opportunities that we are missing because we are not bold enough to capitalise on them”, il se dit confiant quant aux perspectives d’avenir. “Ce n’est pas la première fois que nous sommes confrontés à un environnement difficile. Nous avons traversé des épisodes pires dans le passé. Mais nous avons su relever les défis. In the past, we may have undertaken policies which were potentially sub-optimum. But sustained policy and institutional reforms over the years have enabled us to reach where we are today”, devait-il s’appesantir en évoquant avec force la nécessaire diversification des marchés.

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