EMPRUNTS, PROCÉDURES ET PERMIS… — Logement décent à Maurice : la classe moyenne souffre !

J’ai lu avec beaucoup d’intérêt des articles ces derniers temps où l’on évoque le ralentissement du secteur du bâtiment, attribué entre autres à un trop large éventail d’impôts, etc., qui pénalisent à la fois le constructeur et le particulier – qu’il soit vendeur ou acquéreur. Il est vrai aussi que l’on a noté nombre de critiques ces dernières années sur le trop-plein de béton, et l’enlaidissement du paysage mauricien parce qu’il y aurait un manque d’esthétique dans la conceptualisation des maisons et des bâtiments, quitte à flatter et à favoriser les grands promoteurs « écolo » et « bio » qui vous remercient de sauver la planète en leur faisant confiance et qui profitent de la propagande que leur font des amis d’autres secteurs…
Mais un constat demeure : malgré le Droit Humain basique d’avoir un toit, ils sont nombreux les Mauriciens – surtout de la classe moyenne et ceux des plus nantis parmi les vrais pauvres – à se plier en quatre pour avoir un logis. D’abord, les procédures pour l’obtention d’un permis de construction sont lourdes, et dépourvues de bon sens. Après de nombreuses photocopies de l’acte notarial du petit terrain que vous avez acquis après maints sacrifices et des usuels actes de naissance, carte d’identité, etc., l’on (District Council / municipalité) vous demandera un plan détaillé de construction avec plan de ferraillage, etc.
Si vous n’avez pas les moyens de vous payer un architecte, un dessinateur et un ingénieur peuvent vous aider, moyennant une dizaine de milliers de roupies pour leurs services. Mais avant de soumettre tout ceci, munissez-vous d’autres photocopies de vos documents pour aller un à un les déposer à la Wastewater Authority (WWA), la Central Water Authority (CWA) et le Central Electricity Board (CEB), pour avoir leur « clearance » … Tout ceci vous coûte un peu d’argent, des journées de perdu, et environ 1-2 mois pour avoir l’aval des « autorités » et enfin faire votre demande auprès de votre collectivité locale…
Ensuite, il faut prendre son mal en patience. Un mois, deux mois, voire plus : on peut vous appeler pour vous dire qu’il manque telle ou telle chose dans votre plan, qu’il faut modifier ceci ou cela. Finalement, votre permis en main, d’autres démarches restent à faire. Par exemple pour avoir une connexion d’eau, il faudra un va-et-vient incessant entre votre municipalité / District Council et la CWA, en faisant d’autres photocopies et en dépensant encore plus d’argent… quelque 2 à 3 mois après, vous êtes enfin pourvu d’eau pour la construction… Que de temps perdu, alors que tout le système aurait pu être centralisé en une « one-stop-shop » pour faciliter la vie des gens…
Enfin, lorsque la construction démarre, le mauricien moyen est souvent à la merci du contracteur et de l’institution financière à laquelle il a fait une demande d’emprunt. Comme d’habitude, il a l’embarras du choix avec toute la gamme de “réclames” de certaines banques promettant monts et merveilles pour le « loan » maison. Mais la réalité risque d’être tout autre. Non seulement certaines institutions bancaires traitent leur client avec dédain – en « oubliant » de les appeler après plus de 2 mois pour indiquer que leur demande aura été rejetée et / ou en omettant de négocier un autre montant plus ajustable –, mais certaines procédures sont tellement longues et on vous demande tant de documents et de détails confidentiels que vous vous en lassez et risquez de dire ‘stop’…
Que dire des taux d’intérêts aussi, sinon qu’en général ils sont très élevés et qu’ils ‘plument’ les gens moyens. Car, qu’on se le dise, sans « housing loan », le mauricien moyen peut difficilement acquérir un logement. Le décaissement en amont lui permet de se payer la construction et l’aménagement de sa demeure, mais c’est après qu’il ressentira les coûts énormes auxquels il a souscrits… Car il n’a pas grand choix au final…
Si en cours de route, vous décédez, votre banque et l’assurance-vie à laquelle elle vous aurait presque contraint à souscrire, vont jouer au ping-pong et pourraient demander à vos héritiers / successeurs de rembourser, le tout derrière votre « dos » (même si vous brûlez en enfer – certaines banques / assurances pourraient trouver toutes sortes de prétextes selon lesquels vous n’aviez pas dit que vous aviez telle ‘maladie’, qu’il manque des précisions dans votre rapport de décès…) et malgré les lois régissant les contrats et l’équité. « Quel mari toupet, bonhomme ! »
Et si vous cherchez un appartement sympa, à Maurice, c’est quasiment impossible d’en trouver à prix abordable pour la classe moyenne. Tous les promoteurs vous vendent du RES – pour Mauriciens-glamour même si les marbres et meubles viennent de Fu Shan… Les quelques rares qui disent cibler cette classe moyenne vont jouer de votre naïveté et votre argent avec maints retards dans la livraison, du matériau bas-de-gamme, des défauts de construction et toutes sortes d’ennuis administratifs, de communication, de signature de contrat, etc., le tout frisant l’escroquerie. Mais comme votre argent est « bloqué », vous vous résignez à subir leurs caprices…
J’espère que les autorités – principalement les dirigeants de ce nouveau millénaire – pourront faire quelque chose pour abolir le « red-tapism », assouplir les procédures, offrir un cadre légal et régulateur plus rigoureux pour tout le secteur, et permettre à cette large classe moyenne de Maurice de s’affranchir des fardeaux imposés par des élites historiques et les nouveaux riches… Moins de taxes pour ceux acquérant leur première résidence serait aussi un plus.

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