ENFANTS ET ÉCRANS: Quels dangers et quelle attitude adopter ?

Dans une société de plus en plus liée aux nouvelles technologies, quels dangers peuvent présenter les écrans – télé, ordinateur, jeux vidéo – pour les enfants ? Selon Serge Tisseron, psychiatre et psychanalyste, auteur des livres Les dangers de la télé pour les bébés et Faut-il interdire les écrans aux enfants ?, l’exposition à la télé avant l’âge de trois ans retarderait le développement de l’enfant. Elle pourrait même, selon des études américaines, aggraver des troubles déjà présents chez un enfant comme ceux de la concentration, de l’attention, du sommeil et de la prononciation. Face à ces risques, quelle attitude adopter ?
En 1999, l’Académie américaine de pédiatrie a sorti un guide suggérant aux parents de ne pas proposer l’écran avant deux ans. Mais, les spécialistes ont repoussé cette limite à l’âge de trois ans. Entre trois et six ans, une heure peut être permise et deux heures entre six et neuf ans. Le temps conseillé est un temps global incluant la télé, l’ordinateur et la console portable.
L’Association française de pédiatrie ambulatoire, elle, s’appuie sur la règle du 3-6-9-12 du Pr Serge Tisseron : pas de télévision avant trois ans, avec discernement après trois ans. Pour les moins de six ans, pas de console de jeu personnelle dans le but de privilégier la créativité. À partir de neuf ans, l’Internet est autorisé avec accompagnement afin de préserver son enfant. Et, à partir de 12 ans, l’enfant peut utiliser l’Internet seul mais avec prudence.
Mais, selon Serge Tisseron, contrairement aux activités de jeu répétitives, stéréotypées et solitaires, qui sont « inquiétantes », tout ce qui, sur les écrans, « socialise l’enfant à travers l’écran et tout ce qui l’invite à se poser des questions et à résoudre des problèmes imprévus, favorise son développement ».
En réponse à un parent qui se demande si c’est vraiment partir sur de bonnes bases en interdisant les écrans aux petits, le Pr Serge Tisseron indique dans Le Monde qu’il importe de « bien distinguer ce qui se passe avant trois ans et après trois ans. Avant trois ans, les seules interactions dont l’enfant profite sont les interactions en vis-à-vis avec un autre humain ou avec les jouets qu’il manipule. La télévision n’apporte rien à l’enfant parce qu’elle n’est jamais interactive ». Après trois ans, il s’agit de limiter la durée de consommation de l’écran à une heure ou une heure et demie par jour et « d’inviter l’enfant à choisir les programmes qu’il a vraiment envie de voir ; l’inviter à parler de ce qu’il voit pour créer des interactions autour de ce qu’il a regardé ». Selon le psychiatre, les études menées sur les conséquences de la télévision chez l’enfant ont montré deux choses. D’abord, que « l’enfant qui regarde la télévision développe plus lentement l’acquisition du langage ; et la seconde montre qu’un bébé qui joue dans une pièce où un téléviseur est allumé a des périodes de jeu moins longues. Or, la durée des jeux spontanés d’un bébé est le meilleur indicateur de son développement futur. C’est pourquoi les chercheurs déconseillent même actuellement de faire jouer un bébé dans une pièce où un téléviseur est allumé ».
Dans ce même ordre d’idées, Serge Tisseron soutient que des études ont montré qu’entre trois et six ans, « il est essentiel que l’enfant ait des activités impliquant l’utilisation de ses dix doigts. C’est pour cela que traditionnellement, l’enfant à cet âge était invité à réaliser des découpages, des pliages, des collages, des coloriages… C’est en effet cette activité des dix doigts qui permet la maturation des régions cérébrales qui permettent l’appréhension des objets en trois dimensions. C’est pourquoi il vaut mieux éviter le plus possible que l’enfant à cet âge-là utilise une console de jeu qui ne mobilise que deux ou quatre doigts. Et il faut en particulier bannir complètement les consoles mobiles (Nintendo DS ou PSP), qui accaparent toute l’attention de l’enfant ».
De toute manière, comme l’indique le psychanalyste, un enfant de trois à cinq ans ne peut avoir une consommation d’écran dépassant une heure et demie. « Son attention ne peut pas être maintenue si longtemps ». Si à six ans, deux heures d’écran sont envisageables, « il peut regarder deux heures la télévision ou bien jouer deux heures aux jeux vidéo, mais il faut évidemment éviter qu’il ait quatre heures en tout ».
À un autre parent qui demande quelle alternative il y a lorsqu’on interdit la télé à un enfant de moins de trois ans, Serge Tisseron répond : « Un bébé de moins de trois ans peut jouer tout seul en présence d’un adulte qui fait autre chose à condition que cet adulte prenne tous les jours un petit moment pour accompagner le jeu du bébé et le renforcer ».
Par ailleurs, la consommation de télévision « excite l’enfant sans jamais le calmer et peut donc provoquer des troubles de la concentration et de l’attention dans les moments qui suivent. C’est pour cela qu’il vaudrait mieux qu’un enfant ne regarde pas la télévision le matin avant d’aller à l’école et le soir, juste avant de se coucher », estime l’auteur de « Les dangers de la télé pour les bébés ».
Ce dernier se penche davantage pour le visionnage d’un DVD car outre le fait que l’enfant peut choisir le dessin animé qu’il veut regarder, il peut le revoir à plusieurs reprises et ainsi graduellement comprendre l’histoire et développer sa mémoire. « Les parents peuvent également, si l’enfant regarde des DVD, parler plus facilement avec lui de ce qu’il regarde, puisqu’ils peuvent les regarder eux aussi. »

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