ENJEU : Anil Bachoo épinglé avec une double charge

L’interrogatoire under warning et l’arrestation de l’ancien vice-Premier ministre et ministre de l’Infrastructure publique, Anil Bachoo, dans l’affaire des contrats de Rs 500 millions alloués dans le cadre de l’Emergency Rehabilitation Programme après les flashfloods du mercredi 13 février 2013, a donné lieu à de vives controverses. Le principal contentieux est que cette quinzaine de contrats n’avait pas obtenu le feu vert du Conseil des ministres des 15 et 22 février 2013, alors que tous les travaux de réhabilitation ont coûté Rs 1,2 milliard. Pendant la première partie de cet exercice, dans la chambre 16 du QG du Central CID, connue comme The Pirates’ Room, soit toute la journée de vendredi, le Chief Investigative Officer, le chef inspecteur Kokil, s’est refusé à révéler les charges retenues contre Anil Bachoo. Et cela, en dépit des demandes répétées de ses hommes de loi. Le Leading Counsel, Me Rama Valayden, a considéré cette démarche comme une tactique pour placer son client en détention policière pendant la nuit de vendredi à samedi. Cela aurait failli être le cas, car Anil Bachoo avait été « committed to police cell » au Moka Detention Centre. Toutefois, suite à une intervention in extremis, il a été libéré sur parole alors que les formalités de détention étaient sur le point d’être bouclées en fin de journée de vendredi.
Finalement, Anil Bachoo, qui est retourné aux Casernes centrales, hier matin, pour sa comparution devant la Bail and Remand Court, a été remis en liberté provisoire contre des cautions de Rs 50 000 et une reconnaissance de dettes de Rs 500 000. Deux inculpations provisoires ont été logées contre lui, soit Conspiracy to do an Unlawful Act sous le Code pénal, notamment avec le dénommé Hurrydeo Bholah, ingénieur à la National Development Unit et l’époux de  l’ancienne Private Parliamentary Secretary, Prathiba Bholah, en 2013 et 2014 pour commettre des infractions au Public Procurement Act et autres réglements relatifs par rapport aux contrats alloués sous les Emergency Procurement Procedures alors que « the works were being executed beyond the limited period of extrement urgency, thus benefitting the contractors and as such the approprtiate competitive procurement methods were not being used » et Public Official using his Office for Gratification sous le Prevention of Corruption Act avec des contracteurs bénéficiant de contrats sous l’Emergency Rehabilitation Programme sans passer par les procédures d’offres au profit de ces mêmes contracteurs.
L’ancien numéro 4 du précédent gouvernement travailliste, qui a fait valoir son droit constitutionnel au silence pendant ces cinq heures d’interrogatoire au Central CID, vendredi, a rejeté les accusations portées contre lui sur cette affaire de contrats alloués après les pluies diluviennes du Mercredi des Cendres de 2013 : « I avail my constitutional right to remain silent on this question and any other questions that would follow. If ever I have to answer it will be in Court », devait-il soutenir quand il fut informé initialement par le chef inspecteur Kokil que l’interrogatoire allait être axé sur des « possible breaches of the Procurement law and possibly conspiracy ».
Dès le début de l’exercice et subséquemment, que ce soit Anil Bachoo ou ses conseils légaux, ils devaient réclamer comme un leitmotiv que « the charges be put to Anil Bachoo ». De son côté, Me Valayden devait se demander « whether the questions are to enlighten the police investigation or is the police going on a fishing expedition? ». En tout cas, pendant ces cinq heures, ces deux parties se sont livrées à une partie de cache-cache au chapitre des charges avec Anil Bachoo Committed To Cell sans être informé formellement des charges retenues contre lui.
Les conseils légaux d’Anil Bachoo, en l’occurrence Mes Valayden et Yatin Varma, ont stigmatisé la manière de faire des enquêteurs du Central CID, dont le principal motif aurait été tout simplement de créer les conditions, en l’absence d’inculpations provisoires et sans la possibilité d’une Bail Motion, pour une détention policière de cet ancien ministre. Ils ont ajouté que ces limiers du Central CID ont fait fi des clauses 5 et 10 de la Constitution au sujet des charges. Le Leading Counsel compte soumettre un dossier consacré aux violations présumées des droits d’Anil Bachoo à la Human Rights Commission d’ici la fin de la semaine.
Entre-temps, dans une correspondance adressée au commissaire de police, Mario Nobin, dès vendredi, les hommes de loi de la défense ont dénoncé l’attitude des enquêteurs du Central CID, soit que « this whole process smacks of a political ploy against Anil Bachoo to destroy his reputation, credibilty and deeply hurt his fabric as a person ». Ils devaient même tenter une parade avec une motion Habeas Corpus en Cour suprême tard vendredi pour éviter la mise en détention de leur client. Mais cette demande, par voie d’affidavit juré par le frère de l’ancien vice-Premier ministre, fut set aside par la juge Rita Teeluck, siégeant en référé.
Séquences des cinq heures d’interrogatoire
Des recoupements d’informations effectués par Week-End auprès de sources concordantes permettent d’établir les principales séquences des cinq heures d’interrogatoire de vendredi. D’entrée de jeu, Anil Bachoo confirme son intention de garder le silence alors que le chef inspecteur parle de « possible breaches of the Procurement law and possibly conspiracy ». A partir de là, ce sera un véritable dialogue de sourds au sujet des charges contre Anil Bachoo. Ainsi, le chef inspecteur Kokil ne cessera de répéter que « as I explained earlier charges will be decided at the end of the interrogation ». Après l’une des premières questions à Anil Bachoo à l’effet que « the police informs you that you are suspected of having breached provisions of the public procurement laws between 2013 and 2014 at the NDU and that of conspiracy in that connection, and that charges would be preferred at the conclusion of the interrogation. What do you have to say? », ce sera un one-man-show du Central CID avec, au total, une quarantaine d’interrogations sans réponse.
La série initiale porte sur le parcours ministériel de Bachoo en 2013 et 2014 et l’organigramme du ministère qui lui avait été confié, notamment l’identité des Supervising Officers de son ministère et de la National Development Unit.
De la dixième à la vingtième question, le Central CID aborde l’essentiel de l’enquête avec les travaux sous l’Emergency Rehabilitation Programme après les pluies diluviennes du 13 février et du 30 mars 2013. Les sujets évoqués concernent le rôle de Hurrydev Bholah, déjà sous une double inculpation dans cette même affaire, à la NDU en 2013 et 2014, l’implication personnelle de l’ancien vice-Premier ministre et ministre de l’Infrastructure publique dans les procédures d’allocation de ces contrats sans passer par les appels d’offres ou encore les Work Orders sous l’Emergency Rehabilitation Programme.
A ce stade, deux questions des enquêteurs du Central CID retiennent l’attention, notamment : « How far was your final approval necessary before the award of the contracts and the issue of all work orders under the ERPs 2013? Why were you not giving all your approvals in writing on the corresponding project files? »
Anil Bachoo, qui est également confronté à des allégations à l’effet que les structures de la NDU avaient été By-Passed, a été interrogé sur l’aval du Conseil des ministres pour la mise à exécution de ces projets de réhabilitation. Peu avant le break de 13 heures pour le déjeuner, le CID abat quatre questions engageant la responsabilité de l’ancien ministre à l’effet que « NDU reports show that you, as Minister for the NDU regarding the Emergency Rehabilitation Programme of 2013, have added projects which had not been duly sanctioned by the Cabinet? What do you have to say? », ou encore que des projets sous l’Emergency Rehabilitation Programme furent confiés à la Road Development Authority (RDA) alors que « these projects were not extreme emergency nature ».
Après le break de 80 minutes pour le déjeuner, Anil Bachoo est informé officiellement qu’il a été placé en état d’arrestation, tandis que les questions continuent à fuser, dont des Work Orders pour les programmes d’urgence en février et mars 2013 émis en mai et juin de la même année sous l’Emergency Procedures alors que la loi précise que « the scope of the emergency procurement shall as far as possible be limited ».
A ce stade, soit à 14 h 37, Me Valayden intervient pour faire état de la prochaine fermeture des tribunaux. Il ajoute que « procedures are well known to police and CI kokil has informed us that Mr Bachoo is under arrest without informing latter under what charge/charges, I pray that my client be brought forthwith to court and/or police gives undertakin to my client that he will not be detained and would be allowed to go home ». Sur ce, le chef inspecteur Kokill quitte la salle d’interrogatoire pour revenir après avec des instructions que l’exercice doit se poursuivre.
Les firmes qui ont décroché des contrats
Les noms des firmes, qui ont décroché des contrats, dont Best Construct Ltd, Noarang Company Ltd, Super Builders Ltd, G Construction Co. Ltd, General Construction et par le truchement de la RDA Gamma Civic et Colas, sont cités par le Central CID avançant que « the police have reasons to believe that as then Minister for NDU you favoured particular contractors for the allocation of work orders under the ERP. What do you have to say? »
Ensuite, le cas spécifique de Best Construct Ltd, compagnie de construction, qui a raflé 87% des contrats alloués et autres Work Orders est mentionné, alors que les Legal Advice du Solicitor General étaient ignorés, ou encore sollicités après l’octroi des contrats.
Le dernier volet de l’interrogatoire concerne les faveurs à une autre société de construction avec Anil Bachoo acculé à l’effet « how do you explain that according to NDU records, Naorang Company Ltd, which was not a zonal contractor, was also awarded projects under the Emergency Rehabilitation Programme of 2013 under your instructions ? »
Il est alors 15 h 58. Le chef inspecteur Kokil quitte la salle d’interrogatoire pour revenir une demi-heure après, soit à 16 h 28 pour demander à Anil Bachoo s’il a quelque chose à ajouter. Celui-ci se lancera dans une longue déclaration, soulignant que « I am really aggrieved to note that the police have succeeded in keeping me under arrest and delaying the process before I am taken to Court, against all fundamental and basic rights. I fear that the political machinations against me have reached a new height ». Il renchérira en rappelant que « the witch hunting business will definitely discouraged the patriotic staff from doing their job ».
En guise de conclusion, l’ex-vice-Premier ministre citera : « Cry my beloved but I hope the tears will dry up very soon »…

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