Enjeu – Commission d’enquête sur la drogue : Le quitte ou double de l’ADSU

  • L’enquête devant être initiée par l’ICAC sur la récompense de Rs 1 million décaissées pour payer l’informateur sur le «tip-off» des 135 kg d’héroïne de Navind Kistnah du 9 mars 2017 se transforme en cauchemar au QG de l’ADSU
  • L’ombre de l’ex-juge Paul Lam Shang Leen plane toujours sur ce qui fut jadis un fleuron des Line Barracks au sujet du mystère des 16 kg manquants de la cargaison du même Navind Kistnah
  • La surprise à anticiper : le nom de ce courtier maritime, spécialisé dans l’importation d’héroïne dans des compresseurs, constitue une «recurrent feature» dans les différents diaries de Veeren Peroumal, le Parrain version Melrose High Security Prison

La prise de position du Premier ministre et leader du MSM, Pravind Jugnauth, le week-end dernier en faveur de l’Anti-Drug and Smuggling Unit (ADSU) en dépit des coups de semonce dans le rapport rotin bazar de la commission Lam Shang Leen pourrait s’avérer un boulet politique difficile à traîner. En effet, indépendamment du chapelet de critiques dressées contre l’ADSU par la commission d’enquête sur la drogue, ce département de la police, qui fut jadis le fleuron des Line Barracks, joue presque à quitte ou double dans conjoncture post-rapport Lam Shang Leen avec, d’une part, des éléments des plus compromettants dans l’enquête sur la première saisie record de 135 kilos dans le port le 9 mars 2017, dont le dernier en date concerne des allégations au sujet du décaissement de Rs 1 million en faveur de l’indicateur ayant fourni le tip-off au sujet de la réception des sandblasters contenant les colis d’héroïne pesant une vingtaine de kilos chacun. Cette question de reward money est very high on the investigation agenda de l’Independent Commission Against Corruption (ICAC), avec un risque d’ouvrir une boîte de Pandore d’indicateurs fictifs pour le paiement de reward money.

- Publicité -

Toujours en ce qui concerne le dossier Navind Kistnah, le soutien du Premier ministre à l’ADSU ne devrait pas être suffisant pour conjurer le spectre de l’ancien juge Lam Shang Leen avec une nouvelle enquête sur les 16 kilos d’héroïne manquants d’une valeur marchande de Rs 240 millions sur les 135 kilos de la saisie de l’opération conjointe de la Customs Anti-Narcotics Section’CANS) de la Mauritius Revenue Authority (MRA) avec l’ADSU. Ce sera une occasion pour le président de la commission d’enquête sur la drogue de poser ses empreintes sur l’une des plus importantes opérations de lutte contre la drogue. Les circonstances ont fait que le dénommé Navind Kistnah n’a pu faire partie des 306 témoins entendus lors des 318 séances d’audition de la commission. Les conclusions de cette enquête confiée à l’ancien juge de la Cour suprême pourraient bien sceller le sort de l’ADSU dans son format actuel.

Le soutien public exprimé par Pravind Jugnauth à l’ADSU et à son patron, le Deputy Commissioner of Police Choolun Bhojoo, un des aspirants à la succession prochaine de Karl Mario Nobin au poste de commissaire de police, aurait constitué une goutte d’eau dans cet océan de critiques et de réserves étalées dans le rapport Lam Shang Leen. Même si le poids politique de ces remarques pourrait peser lourd au final, les findings à venir des enquêtes diligentées par l’ICAC ou par l’ancien juge de la Cour suprême sur les frasques de l’ADSU pourraient contrarier le schéma de sauver l’ADSU de la débandade. Le dernier développement en date portant sur la pratique de reward money alimente de graves appréhensions, notamment parmi les Top Guns de l’ADSU. De graves allégations ont été portées à l’attention de l’ICAC, par voie de dénonciations, dans le cas spécifique de la saisie record de 135 kilos d’héroïne à l’arrivée du MSC Ivana d’Afrique du Sud le 9 mars de l’année dernière.

Les Police Headquarters avaient autorisé le décaissement de Rs 1 million à la demande de l’ADSU en guise de reward money à l’informateurayant fourni des indications fiables sur la réception de cette importante quantité d’héroïne à Maurice. Or, tout indique à ce stade que l’indicateur, un habitué de la prison, n’aura bénéficié de rien de cette somme de Rs 1 million. L’ICAC, qui est en présence de certains détails troublants au sujet de cette demande de reward money, s’apprête à les contre-vérifier, même si des recoupements d’informations effectués par Week-End tendent à confirmer que le prompter de cette opération a été complètement écarté.

Les procédures mises en place sont qu’en cas d’importantes saisies de drogue, la direction générale de l’ADSU est en mesure de réclamer le reward money en vue d’en répartir le montant aux différents informateurs. Cette demande est transmise à la Reward Money Section, logée au QG du Central CID qui, après vérification, décide du montant à être autorisé par les Police Headquarters. Dans la majorité des cas, le montant initial réclamé dans la requête officielle de l’ADSU est rarement entériné, car il est considéré comme élevé. Dans le cas de Rs 1 million décaissées avec la saisie des 135 kilos d’héroïne, la requête de reward money pouvait être supérieure à Rs 2 millions. Avec le décaissement agréé, plus personne, sauf des limiers de l’ADSU concernés, n’a de contrôle sur la distribution.

Ainsi, pour les besoins de cette enquête sur Rs 1 million de reward money du cas de Navind Kistnah, il faudra s’attendre à voir une escouade de l’ICAC réclamer du Central CID le Reward Money Register, avec tous les détails sur le montant réclamé, l’identité de l’officier de l’ADSU ayant soumis la demande, de même que celle de l’Authorising Officer, la somme payée, la date du décaissement. Et face aux allégations formulées dans les dénonciations, il n’est pas exclu que l’ICAC décide d’étendre son investigation pour couvrir les paiements de reward de ces dernières années. Cette démarche éventuelle des hommes du commissaire Navin Beekarry est suivie avec angoisse accrue au QG de l’ADSU.
Les relevés au Central CID du décaissement de reward money en faveur de l’ADSU devraient apporter un éclairage particulier aux chapitres de la commission Lam Shang Leen consacrés à l’absence d’un reward fund et au paiement de reward money. « The commission was informed that there used to be a reward fund put at the disposal of the investigating and intelligence officers to pay their informers and which had been scrapped In the absence of a reward fund, the investigating officers find it difficult to obtain cogent information », note le paragraphe 11.1.5.

Pour pallier cette lacune, les limiers de l’ADSU avancent avoir puisé de leurs ressources financières personnelles pour graisser la patte des informateurs et qu’en cas de condamnation des trafiquants de drogue, ils peuvent recouvrer le montant avec des réclamations de reward money. Le paragraphe axé sur le reward money souligne que « for every successful conviction, the team is given a reward which officers share amongst themselves on an agreed ratio. »
Informateurs fictifs

De par les pratiques existantes, les procédures établies dans le décaissement de Rs 1 million dans la saisie des 135 kilos de Navind Kistnah semblent avoir été by-passed, car même 17 mois après, il n’y a pas eu de condamnation des suspects en détention et l’enquête n’a même pas été complétée par l’ADSU, d’autant que le principal suspect, Navind Kistnah, aspire au traitement de star witness-in-waiting, qui refuse de confirmer l’identité du principal commanditaire allégué, attestant que l’étape de la « successful conviction » est encore très éloignée. À l’ADSU, l’on appréhende avec sueurs froides les conclusions et répercussions de l’enquête de l’ICAC dans le reward money de Rs 1 million sur un background de dénonciations d’informateurs fictifs pour se faire payer.

D’autre part, toujours sur la saisie du 9 mars 2017, avec le dénommé Navind Kistnah prenant la fuite la veille sur instructions du trafiquant Veeren Peroumal, qui purge une longue peine d’emprisonnement, honte encore au QG de l’ADSU. Dans un premier temps, l’ADSU avait cru pouvoir convaincre avec des explications bateau de wrappings d pour justifier le discrepancy de 16 kilos dans la cargaison de 1356 kilos. Même le ministre Mentor, sir Anerood Jugnauth, a refusé d’avaler cette couleuvre. Le Premier ministre, en voulant déborder le ministre Mentor, qui aurait préféré voir l’ancien juge Bushan Domah enquêter dans ces 16 kilos manquants, devra permettre à Paul Lam Shang Leen de compléter le tableau des failles et lacunes de l’ADSU.

À son retour de voyage, l’ancien juge de la Cour suprême devra s’atteler à la tâche en vue de comprendre les raisons derrière cette différence de 16 kilos dans le poids de la cargaison d’héroïne saisie en l’espace de 17 mois. Cette enquête constitue une occasion en or pour le président de la commission d’enquête sur la drogue de s’installer au cœur des day to day operations de l’ADSU, soit des procédures avec l’opération initiale jusqu’à la confirmation des exhibits, en passant par les mesures de sécurité de stockage. Ce scandale qui secoue l’ADSU depuis six semaines déjà, en dépit de tous les dispositifs de l’opération Lakaz Mama, monopolisera l’attention à partir de la fin de ce mois.

Cette incursion de l’ancien juge de la Cour suprême est considérée comme extrêmement vitale, car au paragraphe 3.22 du rapport, cette zone d’ombre de différence de poids et des risques de tampering with exhibits avait été effleurée. Le cas de Navind Kistnah devra complémenter l’exercice inachevé. « The commission also looked into the delay caused by the Forensic Science Laboratory which is an essential partner of the ADSU and heard the Director of FSL who explained difficulties met by that institution. The commission received complaints of possible tampering of the exhibits secured from drug abusers/mules and the responsibility could not be pinpointed because of the involvement of so many officers », affirme le rapport.

Damning evidence

Les first hand informations recueillies prochainement avec les 16 kilo manquants devront servir à élucider cet aspect des travaux de la commission, mais aussi à contre-vérifier les allégations venant de témoins devant la commission d’enquête au sujet du tampering des exhibits par des officiers de l’ADSU substituant de la drogue par d’autres substances en vue de remettre cette drogue sur le marché. Paul Lam Shang Leen aura également la possibilité d’évaluer les méthodes d’investigation de l’ADSU dans ce cas spécifique, car la commission est déjà en possession de damning evidence au sujet de la participation préméditée de Navind Kistnah dans ce réseau de trafic de drogue opérant à partir des côtés de l’Afrique subsaharienne.

Les diairies récupérés dans la cellule de Veeren Peroumal et celle de ses acolytes à la prison par l’Investigation Team de la commission d’enquête menée par l’assistant-surintendant de police Hector Tuyau recèlent de preuves irréfutables pouvant mettre à mal la stratégie de l’ADSU, dont le statut de star witness-in-waiting à Navind Kistnah. Le nom de ce dernier suspect fait partie de ces Karne Laboutik de Veeren Peroumal aussi bien que ses numéros de téléphone cellulaire dans le répertoire de ce trafiquant de drogue, qui peut retenir les services et payer rubis sur ongles et en avance les meilleurs criminal barristers du pays. Des contacts réguliers entre Navind Kistnah et Veeren Peroumal sont relevés, de même que la description des caractéristiques des compresseurs et autres bétonneurs à être dédouanés par le courtier maritime attitré des trafiquants, dont les révélations à l’ADSU au sujet du réseau ont tari depuis longtemps déjà.

« Avec ces informations présentant Navind Kistnah comme un major player dans ce réseau de trafic de drogue et son attitude de vouloir tout mettre sur le dos de son partenaire en affaires Homunchal Ramdin, porté manquant depuis mars 2017, l’ADSU aurait dû arriver à la conclusion que le courtier Kistnah a emprunté une voie de non-retour dans cette enquête et le moment est venu remettre en question sa détention dans le confort du QG de l’ADSU, avec comme partenaire d’exercices réguliers en plein air aux Casernes centrales un autre suspect, dont le nom figure aussi dans les mêmes diaries des partners in crime de Veeren Peroumal », laisse-t-on entendre dans certains milieux aux Casernes centrales fondant beaucoup d’espoir que les prochaines observations de l’ancien juge de la Cour suprême pourraient débloquer un statu quo qui n’a que trop duré, avec les trois saisies d’héroïne d’une valeur marchande de plus de Rs 2,5 milliards de mars 2017.

Autant de commentaires et facteurs défavorables apportant de l’eau au moulin de ceux qui épousent la thèse du démantèlement de l’ADSU et son remplacement par la National Drug Investigation Commission (NDIC) ayant un ancien juge à la tête en vue d’insuffler un nouvel élan pour casser les reins aux big bosses de la drogue, au lieu que de se contenter d’emprisonner des small fries.

Toutefois, les instigateurs de l’opération Devir Komisyon, bénéficiant de puissants lobbies, ont déjà entamé des manœuvres de sappe pour rendre les recommandations caduques. Mais petit à petit, la résistance citoyenne contre ces tentatives de cover-up commence à se mettre en place, alors que le comité interministériel présidé par le Premier ministre ne s’est réuni pour la première fois, vendredi, soit quinze jours après la publication du rapport rotin bazar et que la date limite imposée par le gouvernment aux ministères et départements pour soumettre leurs observations sur les findings de la commission d’enquête arrivera à échéance à la fin de la semaine. Le document-vedette de cette étape, précédant des décisions dans un sens comme dans l’autre, viendra des Police Headquarters des Casernes centrales sur le projet de National Drug Investgation Commission, dépouillant la police de tous ses pouvoirs et prérogatives en matière de lutte contre la drogue.

Rodrigues : la motion de blâme de Von Mally contre Serge Clair

Le Mouvement Rodriguais (MR) de Nicolas Von Mally est passé à l’offensive avec la publication du rapport de la commission d’enquête sur la drogue présidée par l’ancien juge de la Cour suprême Paul Lam Shang Leen. Après avoir lancé un ultimatum au chef commissaire et leader de l’Organisation du Peuple de Rodrigues (OPR), Serge Clair, de soumettre sa démission de l’Assemblée Régionale de Rodrigues et de l’Executive Council, le Minority Leader a déposé une motion de blâme contre le chef commissaire au secrétariat à la mi-semaine. La prochaine séance de l’Assemblée Régionale de Rodrigues ayant été ajournée au mardi 28 août, tout semble indiquer que les débats sur cette motion de censure se dérouleront lors de cette séance, à moins d’un changement entre-temps.

Nicolas Von Mally, qui a entamé une tournée à Maurice en fin de semaine, comprenant une série de rencontres politiques, dont avec le Premier ministre, Pravind Jugnauth, et le leader de l’opposition, Xavier-Luc Duval, maintient qu’avec les accusations d’ingérence sur la police débouchant sur le transfert punitif du DCP Samoissy de l’Anti-Drug and Smuggling Unit (ADSU) de Rodrigues, le leader de l’OPR doit impérativement step down. Il a cité le cas de l’ancien chef commissaire de Rodrigues Johnson Roussety, qui avait soumis sa démission « to and clear his name in Court. »

Le leader du MR lance un appel aux élus régionaux de la majorité de l’OPR pour qu’ils votent en leur âme et conscience sur cette motion de blâme, tout en faisant fi de la discipline du parti. L’OPR détient une majorité de deux sièges au sein de la présente Assemblée Régionale de Rodrigues. Nicolas Von Mally croit que le tour de renverser le Père de l’Autonomie à Rodrigues est jouable dans la conjoncture politique.

Roubina Jadoo-Jaunbocus en mode de Judicial Review

L’ex-ministre de l’Égalité du Genre et membre du MSM, Roubina Jadoo-Jaunbocus, a complété en fin de semaine la première étape de la demande de judicial review contre le rapport de la commission d’enquête Lam Shang Leen. La requête, par voie d’affidavit à la plus haute instance judiciaire du pays pour éliminer toute allusion à son encontre, soutient par rapport à la commission Lam Shang Leen que « the findings, as the case may be, in breach of natural justice, in breach of fairness, unreasonable, biased and wrong in law. » Elle s’appuie sur le fait que « the commision has failed to allow me to challenge any information which was detrimental to me. »

L’ancienne ministre du gouvernement Piti-Papa rejette catégoriquement les accusations portées à son encontre au sujet des Rs 50 000 du deal Cupidon-Kamasho, ou encore de l’appel reçu sur son cellulaire du trafiquant Veeren Peroumal. « As soon as the caller identified himself as Veeren Peroumal ,I told him that I was putting an end to the conversation because it was commonly known that M. Veeren Peroumal was in Prison. I told him that I would visit him at the Prison on the following day », soutient-elle à ce sujet.

Toutefois, dans la soirée de vendredi, elle a reçu une invitation du leader du Parti travailliste, Navin Ramgoolam, en vue de soumettre sa démission de l’Assemblée nationale.
Les autres compères de la majorité gouvernementale, soit Raouf Gulbul et Sanjeev Teeluckdharry, mis en cause pour des connexions avec des trafiquants de drogue, n’ont pas encore emprunté le chemin de la judicial review en Cour suprême.

Le CCID et l’ADSU “tainted” pour le Temwin Sok Samachar

Le Temwin Sok Samachar avait mis la commission d’enquête sur la drogue sur d’importantes pistes vu qu’il s’est présenté comme étant un des principaux lieutenants du trafiquant Curly Chowrimoottoo. Jusqu’à l’épisode des huit kilos de ciment présentés comme de la drogue le 18 décembre dernier, jour de la proclamation ds résultats de la partielle au N°18 (Belle-Rose/Quatre-Bornes), la commission avait placé une forte prime sur ses révélations, d’autant qu’au lendemain de sa première déposition à huis clos, il avait été victime d’une intimidation flagrante de l’Anti-Drug and Smugglng Unit (ADSU) sous la forme d’une perquisition de son domicile.

Avec les résultats des analyses du Forensic Science Laboratory, « the commission believes that no weight can be attached to his testimony. » Le rapport recommande « an in-depth enquiry be carried out on the fading star witness to see whether he has not committed perjury and to find out who is pulling the strings. » La question cruciale qui se pose est à quelle institution sera confiée cette enquête?

L’ADSU et le Cental CID se sont disqualifiés vu qu’ils sont “tainted” dans cette affaire. L’ADSU avait organisé cette descente d’intimidation. Le Central CID avait enquêté sur « the call from the office of the Commisioner of Police which triggered the search ». Le Central CID de l’assistant-surintendant de police Devanand Reekoye n’a relevé aucun élément compromettant dans cette enquête sur cet appel suspect du bureau du CP et également sans informer la commission des conclusions de cette enquête.

Ainsi, il est impossible de demander à l’ADSU et au Central CID d’enquêter sur le Temwin Sok Samachar

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour

- Publicité -