ESCALADE : Entre ciel et terre

Combien d’amateurs de sensations fortes n’ont-ils pas un jour rêvé de gravir nos plus hautes montagnes ? Dangereuse, l’escalade ? Pas vraiment, du moins lorsque l’on est accompagné d’un bon guide. C’est notamment le cas de Xavier Pompon. Depuis deux ans, ce spécialiste de l’escalade s’encorde à de jeunes Mauriciens, le temps d’une balade entre ciel et terre. Spiderman en herbe, accrochez-vous à vos crampons !
De tous les sports à sensations, l’escalade est sans doute l’un des plus prisés au monde. Et pour cause : outre de faire le plein d’adrénaline, la varappe permet aussi de découvrir d’autres facettes du monde tout en garantissant de brûler les calories superflues. Pour autant, pas question de se prendre pour Stallone dans Cliffhanger, car le sport reste malgré tout risqué. À moins, bien sûr, que l’on soit correctement accompagné.
C’est dans cette optique que nous sommes parti à la rencontre de Xavier Pompon. Depuis deux ans déjà, ce dernier offre aux jeunes Mauriciens la possibilité de faire de l’escalade. Rassurez-vous : Xavier est loin d’être un novice : il a même en poche un diplôme tout droit sorti de Nouvelle Zélande. Autant dire qu’avec lui, rien n’est laissé au hasard.
Il est 11 heures à Albion. La peur au ventre, mélangée à une curiosité naturelle, nous attendons impatiemment Xavier Pompon. Celui-ci arrive enfin. Aussitôt, il débarque son matériel. D’emblée, le jeune homme dégage une grande sympathie. Il cherche visiblement à nous mettre à l’aise. « Cela fait deux ans que j’ai commencé cette activité à Maurice », dit-il. Sans prétention, juste pour nous rassurer.
Et ça marche ! Enfin, juste un instant. Car une fois arrivées au pied de la falaise, la peur commence à se faire ressentir. Le jeune guide a beau être blindé de diplômes, rien n’y fait. Visiblement habitué, Xavier ressent nos appréhensions. Pas besoin de lui faire un dessin : il a devant lui deux demoiselles n’ayant pas beaucoup pratiqué de sports.
« Rien ne va vous arriver ! » lance-t-il. « Rien ? Vous en êtes certain ? » Et Xavier de reprendre : « Rien ! D’ailleurs, Manish est en bas. Il s’assure de la sécurité si toutefois il y avait un pépin. » Notre guide a un étrange sourire aux lèvres. Est-ce d’être face à deux novices ou par routine de ce genre de questions ? Nous optons pour la deuxième explication.
Le paysage, lui, est magnifique. Mais en le balayant davantage, nous commençons à voir naître des scénarios catastrophes, repris en Une des journaux. Finalement, nous décidons d’abandonner nos idées noires. Puisqu’on est ici, autant en profiter !
David Sabas passe en premier. Il faut dire qu’il n’en est pas à sa première escalade. « J’ai déjà fait de l’escalade avant, mais pas à Maurice », confie-t-il. Notre cobaye descend, visiblement à l’aise. À croire qu’il a fait ça toute sa vie. Bientôt, ce sera à notre tour. Xavier nous briefe brièvement. « Il faut garder vos deux mains sur ses hanches, du côté droit si vous êtes droitière. Surtout, il ne faut pas paniquer, ne pas regarder en bas. Il suffit de se laisser aller en arrière et de ne pas se coller à la paroi. Au moment de descendre, il faut écarter les jambes, pour éviter de se cogner contre la falaise, sur les côtés, mais aussi pour une question d’équilibre. »
Faire abstraction du vide
Notre coeur bat la chamade. Nous sommes prêtes à descendre. Mieux : nous descendons. Xavier, lui, reste en haut. Rien ne lui échappe. Il nous prodigue ses conseils pendant la descente. « C’est bien. Continue. Attrape la corde. Tire la doucement. » En bas, Manish, lui, s’occupe de la corde de sécurité. Même si nous n’avons rien à craindre, des voix intérieures se font persistantes. « Oublie le vide », disent-elles. « Ne regarde pas en bas », « Tu y es presque ». Oui, c’est ça, plus facile à dire qu’à faire ! « C’est ça. Rebondissez sur vos jambes pour descendre », lance notre guide, qui ne perd rien du spectacle.
Cette première descente est pourtant facile… lorsque l’on se trouve près de la falaise. « Si les cordes venaient à se rompre, l’on pourrait toujours s’accrocher aux rochers », se dit-on. Étrange idée, c’est vrai, mais combien rassurante. Malheureusement, les choses se corsent en contrebas. Cette fois, nous sommes littéralement suspendues dans le vide. Et même si notre corde semble « conforme », il est difficile d’imaginer que notre vie ne tient alors plus qu’à sa solidité. Xavier doit bien rire, là-haut !
Les derniers mètres arrivent péniblement. Ça y est, nous touchons enfin le plancher des vaches, heureuses de constater que nous sommes toujours entières. Le soulagement ne sera cependant que de courte durée. Un petit sourire aux lèvres, Xavier nous annonce qu’il faut maintenant remonter. « Pourquoi dans ce cas être descendues », nous demandons-nous. Pas le temps de répondre à la question : la falaise nous attend, cette fois en sens inverse. « C’est bien, vas-y ! » Xavier nous encourage à nouveau. Nous nous cramponnons aux rochers. Les premiers mètres sont faciles, mais le plus dur reste à faire. D’autant qu’arrivées à une paroi, il n’y a plus rien à « attraper ».
« Oh, mon Dieu ! Qu’est-ce que je fais maintenant ? » Xavier nous laisse réfléchir, sachant que nous sommes de toute façon en sécurité. De notre côté, nous espérons secrètement que notre moniteur nous fera redescendre. Devant son silence, nous retentons d’avancer. Mais pour essuyer un nouveau échec. Pathétique. Xavier nous lance enfin : « À votre gauche, cette paroi. Accrochez-vous. Vous y êtes presque. » Pas moyen d’avancer, nous sommes tétanisées. Xavier tente de nous encourager à nouveau : « Allez-y. Vous êtes presque arrivées. »
C’est trop. Les oies blanches décident de prendre leur envol. On lâche prise. On se retrouve suspendues dans les airs de sorte que Xavier n’aura plus le choix, il devra nous faire redescendre. Le guide comprend. Il capitule. Une fois en bas, il nous lance : « Reposez-vous et recommencez ! » Ha bon, c’est pas fini ? Nos jambes sont molles, notre estomac crie famine. « Ce qui est bien dans ce sport, c’est que l’on a toujours une petite équipe pour nous encourager », dit Xavier Koenig, assis à côté de nous.
Il est 13 h 30. Il nous faut prendre congé. Xavier est déçu. Le jeune homme n’a pas essuyé beaucoup d’échecs dans sa vie, mais ça, c’était avant de nous rencontrer. Pour autant, nous ne sommes pas prêtes d’oublier cette partie d’escalade. Après avoir remercié chaleureusement notre guide pour sa patience et son dévouement, il ne nous reste plus qu’à prendre congé. Celui-ci sourit et nous lance : « Vous allez revenir, hein ? Promis ? » Nous nous contentons de lui rendre son sourire mais espérons secrètement que nous reviendrons bientôt.

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